L’allemand (Deutsch en allemand, prononcé [ˈdɔʏtʃ] ) est l'une des langues indo-européennes appartenant à la branche occidentale des langues germaniques. Du fait de ses nombreux dialectes, l'allemand constitue dans une certaine mesure une langue-toit (Dachsprache).
Son histoire, en tant que langue distincte des autres langues germaniques occidentales débute au haut Moyen Âge, lors de la seconde mutation consonantique.
De nos jours, ses locuteurs, appelés « germanophones », se répartissent principalement, avec près de 100 millions de locuteurs, en Europe, ce qui fait de leur langue la plus parlée au sein de l'Union européenne (UE).
Le statut légal de l'allemand en Europe
Locuteurs germanophones par pays dans l'Union Européenne et quelques pays voisins. Noir : langue maternelle Marron foncé : ≥ 50 % Marron : 20-49 % Rouge : 10-19 % Rouge clair : 5-9 % Rose : < 5 % Gris : N/A
Répartition géographique
en Europe : L'allemand est la langue officielle en Allemagne, en Autriche, au Liechtenstein, en Suisse, au Luxembourg, en Belgique et dans la région italienne du Tyrol du Sud; Il est également parlé, sans toutefois avoir le statut de langue officielle au Danemark, en France (Alsace et Moselle germanophone autrefois nommée Lorraine allemande), République tchèque (Allemands en République tchèque, Slovaquie (Allemands des Carpates), Pologne, Roumanie (Transylvanie/Banat, Saxons de Transylvanie, Allemands de Bucovine et Allemands du Banat) ;
L'allemand est la langue officielle en Allemagne, en Autriche, au Liechtenstein, en Suisse, au Luxembourg, en Belgique et dans la région italienne du Tyrol du Sud;
Il est également parlé, sans toutefois avoir le statut de langue officielle au Danemark, en France (Alsace et Moselle germanophone autrefois nommée Lorraine allemande), République tchèque (Allemands en République tchèque, Slovaquie (Allemands des Carpates), Pologne, Roumanie (Transylvanie/Banat, Saxons de Transylvanie, Allemands de Bucovine et Allemands du Banat) ;
en Afrique : Namibie, Tanzanie;
en Amérique : Amérique du Nord (il s'agit souvent de parlers issus du moyen ou bas-allemand, présentant des traits archaïsants, tel le dialecte dit « pennsylvanien » usité par la communauté amish), Amérique du Sud (Paraguay, Chili, Argentine, Brésil, Venezuela).
L'allemand n'est langue officielle d'aucun État fédéré des États-Unis malgré une assertion récurrente fondée sur une confusion historique.
Langues dérivées
Le yiddish est une langue dérivée du moyen-haut-allemand médiéval, dans lequel ont été introduits des mots d'origine slave ou hébraïque.
L'unserdeutsch et le Küchendeutsch sont un créole et un pidgin respectivement formés à partir d'un lexique allemand.
Le suisse allemand : les Suisses parlent de multiples dialectes germaniques, parfois assez différents entre eux. En revanche, les documents officiels, la presse, l'édition et l'enseignement utilisent principalement l'allemand standard.
Histoire
Première mutation consonantique
Avec la première mutation consonantique (erste germanische Lautverschiebung) aux environs du V siècle av. J.-C., naissait le germanique commun à partir d'un dialecte indo-européen. Cette transformation explique des différences entre les langues germaniques (plus l'arménien) et les autres langues indo-européennes. On peut, pour simplifier, présenter les faits ainsi :
k → h : cor en latin — Herz en allemand, heart en anglais, hart en néerlandais
p → f : pater en latin — Vater en allemand, father en anglais, vader en néerlandais
t → th : tres en latin — drei en allemand, three en anglais, drie en néerlandais
d → t : decem en latin — zehn en allemand, ten en anglais, tien en néerlandais
g → k : gula en latin — Kehle en allemand, keel en néerlandais
bh → b : bhrātā en sanskrit (frater en latin) — Bruder en allemand, brother en anglais, broer en néerlandais
dh → d : adham en sanskrit — Tat en allemand, deed en anglais, daad en néerlandais
gh → g : *ghostis en indo-européen (hostis en latin) — Gast en allemand et en néerlandais, guest en anglais
Seconde mutation consonantique
On commence à parler de langue allemande (ou, en linguistique « haut-allemand ») lorsque les dialectes parlés dans le sud-ouest de l'Allemagne subirent la seconde mutation consonantique (zweite germanische Lautverschiebung ou hochdeutsche Lautverschiebung, que l'on situe grosso modo vers le VI siècle), au cours de laquelle la langue commença à se différencier des dialectes du nord (Niederdeutsch, bas-allemand).
Cette modification phonétique explique un certain nombre de différences entre l'allemand actuel et, par exemple, le néerlandais ou l'anglais :
k → ch : ik — ich (je) ; ook — auch (aussi) ; make/maken — machen (faire)
d → t : day/dag — Tag (jour) ; bed/bed — Bett (lit); do/doen — tun (faire)
t → s : what/wat — was (quoi) ; street/straat — Straße (rue) ; eat/eet — essen (manger)
t → (t)z : sit/zitten — sitzen (être assis) ; two/twee — zwei
p → f : sleep/slapen — schlafen (dormir) ; ship/schip — Schiff (bateau) ; help/helpen — helfen (aider)
p → pf en début de mot : pepper/peper — Pfeffer (poivre) ; paard — Pferd (cheval)
v, w, f → b : beloven/believe — belauben (promettre, croyance) ; avond/evening — Abend (soir)
pour résumer, *k / *p / *t ➜ ch / pf (ou f) / ts (ou s)
Les dialectes du nord qui n'ont pas ou peu subi cette seconde mutation phonétique sont qualifiés de bas-allemand. Cette appellation est jugée abusive par certains linguistes, notamment néerlandais (qui ne sont pas « allemands »). Mais le terme « allemand » n'est ici qu'un terme linguistique, un peu comme « roman », « slave » ou « scandinave ».
Moyen Âge
Entre le X siècle et le XV siècle eut lieu une diphtongaison dans les parlers du Sud-Ouest concernant l'articulation en deux phonèmes de ei, eu et au. Cela explique à nouveau certaines différences entre l'allemand standard et, par exemple, le néerlandais (les lettres dans les parenthèses expliquent la prononciation en utilisant la langue française):
û (ou), → au (aou): hūs — Haus (maison) ; mūs — Maus (souris)
î, (î) → ei (aille) : wīse — Weise (manière) ; zīt — Zeit (temps)
iu (û) → eu (≈oï): liute — Leute (des gens) ; hiute — heute (aujourd'hui)
Contrairement aux États voisins, les contrées germaniques sont restées morcelées (Kleinstaaterei) au cours de l'ensemble du Moyen Âge contribuant au développement de dialectes très différents et parfois mutuellement inintelligibles. Un premier pas vers une langue interrégionale correspond au Mittelhochdeutsch poétique des poètes de cour vers le XIII siècle, bien que l'influence sur la langue vulgaire fût quasiment nulle, en raison de la faible alphabétisation. Aussi les régions germaniques restèrent-elles longtemps coupées en deux régions linguistiques :
Au Nord, et en particulier du temps de la Hanse, le bas-allemand servait de langue véhiculaire de la mer du Nord à la mer Baltique.
Au Sud se développait petit à petit, essentiellement à l'écrit, depuis le XIV siècle une « langue compromis » entre les différents dialectes du haut-allemand qui devint l'allemand standard (Standarddeutsch). Ce processus est assez différent de celui des États voisins qui adoptèrent la langue de leur capitale.
Influence de la Réforme
En 1521, Martin Luther traduisit le Nouveau Testament dans cet allemand standard en développement et en 1534, l'Ancien Testament. Bien que Luther ne fût pas, comme il fut considéré autrefois, le pionnier dans l'établissement d'une langue interrégionale — en élaboration depuis le XIV siècle — il n'en reste pas moins que la Réforme protestante contribua à implanter l'allemand standard dans les administrations et les écoles, y compris dans le nord de l'Allemagne, qui finit par l'adopter.
Mais, jusqu'au début du XIX siècle, le Hochdeutsch resta une langue souvent écrite, que beaucoup d'Allemands, en particulier dans le sud, apprenaient comme une langue étrangère.
L'allemand en Europe centrale
Avec la domination de l'Empire austro-hongrois en Europe centrale, l'allemand y devint la langue véhiculaire. En particulier, jusqu'au milieu du XIX siècle, les marchands et, plus généralement, les citadins y parlaient l'allemand, indépendamment de leur nationalité : Prague, Budapest, Bratislava, Zagreb et Ljubljana constituaient des îlots germanophones au milieu des campagnes qui avaient conservé leur langue vernaculaire.
Normalisation de l'orthographe et de la grammaire
Johann Christoph Adelung publia en 1781 le premier dictionnaire allemand exhaustif, initiative suivie par Jacob et Wilhelm Grimm en 1852. Le dictionnaire des frères Grimm, publié en seize tomes entre 1852 et 1860, reste le guide le plus complet du vocabulaire allemand. La normalisation progressive de l'orthographe fut achevée grâce au Dictionnaire orthographique de la langue allemande de Konrad Duden en 1880, qui fut, à des modifications mineures près, déclaré comme référence officielle dans la réforme de l'orthographe de 1901.
Classification
C'est une langue germanique de la branche ouest, proche, notamment, du néerlandais.
Langues régionales
bas-allemand
bas-francique
bas-saxon westphalien ostphalien bas-saxon septentrional
westphalien
ostphalien
bas-saxon septentrional
bas-allemand oriental mecklembourgeois-poméranien brandebourgeois bas-prussien moyen-poméranien poméranien oriental
mecklembourgeois-poméranien
brandebourgeois
bas-prussien
moyen-poméranien
poméranien oriental
haut-allemand
moyen-allemand moyen-allemand occidental moyen-francique francique mosellan luxembourgeois francique ripuaire francique rhénan hessois de l'Est moyen-hessois hessois du Nord moyen-allemand oriental thuringeois haut-saxon haut-saxon du Nord Lausitzisch-Neumärkisch silésien haut-prussien yiddish
moyen-allemand occidental moyen-francique francique mosellan luxembourgeois francique ripuaire francique rhénan hessois de l'Est moyen-hessois hessois du Nord
moyen-francique francique mosellan luxembourgeois francique ripuaire
francique mosellan
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thuringeois
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Lausitzisch-Neumärkisch
silésien
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allemand supérieur haut-francique francique oriental francique méridional francique du Main allemand pennsylvanien bavarois bavarois du Nord moyen-bavarois bavarois du Sud alémanique alsacien souabe bas alémanique moyen-alémanique haut alémanique alémanique supérieur suisse allemand
haut-francique francique oriental francique méridional francique du Main
francique oriental
francique méridional francique du Main
francique du Main
allemand pennsylvanien
bavarois bavarois du Nord moyen-bavarois bavarois du Sud
bavarois du Nord
moyen-bavarois
bavarois du Sud
alémanique alsacien souabe bas alémanique moyen-alémanique haut alémanique alémanique supérieur suisse allemand
alsacien
souabe
bas alémanique
moyen-alémanique
haut alémanique
alémanique supérieur
suisse allemand
Écriture
L'allemand s'écrit avec les 26 lettres de l'alphabet latin, trois voyelles surmontées d'un Umlaut (sorte de tréma) ä, ö et ü, et un symbole graphique spécial ß, Eszett ou scharfes S (ligature de S long et de « s » ou « z »), utilisé en lieu et place de ss dans certains cas (principalement après une voyelle longue ou une diphtongue). La Suisse n'utilise plus le ß depuis les années 1930. Jusque dans les années 1940, l'allemand était imprimé en écriture gothique (Fraktur) et écrit en sütterlin, qui sont différentes versions de l'alphabet latin.
Orthographe
L'orthographe allemande se déduit en général de la prononciation et d'un minimum de connaissances. Mais les fortes disparités régionales dans la prononciation peuvent rendre la tâche ardue. Les principales difficultés orthographiques de l'allemand résident dans :
les Fremdwörter (mots d'origine étrangère) : ils sont souvent écrits conformément au mot d'origine (par ex. Milieu, Mayonnaise) mais la récente réforme de l'orthographe (voir plus loin) autorise la germanisation des termes importés comme l'écriture de Jointventure en un mot ;
les lettres ä et e (e ouvert ou fermé), dans certains cas homophones et dans d'autres de prononciations voisines (par ex aufwendig dérivé de Aufwand, où l'orthographe réformée permet d'aussi écrire aufwändig) ;
la distinction entre consonne simple et consonne double qui, dans un nombre limité de mots et contrairement à la règle habituelle, n'a pas d'influence sur la quantité vocalique (par ex. Platz [tz est considéré comme un double z] mais plazieren) (voir plus loin : Prononciation) ;
la séparation entre les mots (par ex. radfahren « aller à vélo » à côté de Auto fahren « aller en voiture ») et la (non-)capitalisation de certaines expressions (par ex. im dunkeln lassen « laisser incertain » à côté de (jemanden) im Dunkeln lassen « laisser (quelqu'un) dans un endroit obscur »).
Afin de supprimer une partie des difficultés décrites ci-dessus, les représentants allemands, suisses et autrichiens convinrent d'une réforme de l'orthographe. Elle est entrée en vigueur en 1998 en Allemagne et est devenue obligatoire à partir de la mi-2005. La dernière réforme datait de 1901 et portait entre autres sur la suppression du h dans Thor et sur l'ajout du e pour les voyelles longues et accentuées dans la conjugaison des verbes, par exemple kritisirt ➜ kritisiert).
Les principaux changements concernent :
l'homogénéisation de la graphie des mots de même famille (aufwändig de Aufwand, mais toujours aufwenden) ;
l'utilisation du ß uniquement après les voyelles longues et les diphtongues (on aura alors toujours der Fuß, die Geiß, mais der Fluss, ce qui est analogue aux règles pour les autres consonnes) ;
dans les mots composés (voir agglutination/Linguistique), aucune lettre ne sera plus supprimée (Geschirr + Rückgabe > Geschirrrückgabe) ;
la généralisation plus exhaustive de l'écriture en plusieurs mots des expressions figées (auseinander reißen), ce qui est la chose la plus critiquée et qui a aussi créé des nouveaux problèmes : « Furcht erregend » (intimidant, traditionnellement « furchterregend ») mais toujours « noch furchterregender » (encore plus intimidant)
la systématisation de la capitalisation des substantifs (der Dritte) ;
la simplification de la césure et de l'emploi de la virgule ;
la simplification (phonétisation) de termes issus du grec et l'abandon optionnel du ph (Fotografie â coté de Photographie)
Cette réforme rencontre une forte critique en Allemagne. Le Land de Schleswig-Holstein a voté le retour à l'orthographe traditionnelle en 1998 (décision annulée pourtant par le parlement régional) et certains journaux et éditeurs ont depuis décidé de revenir à la graphie conventionnelle.