L’espagnol ou le castillan, est une langue romane, parlée en Espagne et dans de nombreux pays d'Amérique, ainsi que d'autres territoires dans le monde associés à un moment de leur histoire à l'ancienne métropole.
La langue espagnole, issue du latin vulgaire parlé autour de la région cantabrique, au nord de la péninsule Ibérique, s'est diffusée en suivant l’extension du Royaume de Castille puis fut menée en Afrique, aux Amériques et en Asie Pacifique avec l'expansion de l'empire espagnol entre le XVet leXIX siècle, circonstances historiques qui en font la langue romane la plus parlée dans le monde actuellement.
L'espagnol est maintenant la langue maternelle d'environ 468 millions de personnes et est utilisé par près de 559 millions de personnes, ce qui la hisse au troisième rang mondial en termes de locuteurs, derrière le chinois mandarin et l'anglais, et au deuxième rang en termes de locuteurs de naissance. L'espagnol est l'une des principales langues de communication internationale, avec l'anglais ou le français.
Caractéristiques
Carte chronologique montrant le développement et l'évolution des langues parlées dans la péninsule ibérique de l'an 1000 à nos jours.
L'espagnol est de façon générale resté nettement archaïsant et demeure ainsi relativement proche du latin classique et de l'italien moderne, avec lequel il maintient un certain degré d'intercompréhension. Appartenant à la sous-branche ibéro-romane comme le portugais, l’espagnol permet également une certaine intercompréhension écrite, et dans une moindre mesure orale, avec celui-ci. L’espagnol est morphologiquement proche du français, du fait de leur origine latine commune, mais l'intercompréhension reste toutefois très limitée, bien que facilitée à l'écrit par le caractère archaïsant de l'orthographe française.
D'autre part, l'espagnol étant originaire de la région de Cantabrie, dans le nord de l'Espagne, il a reçu une forte influence du substrat formé par l'ancêtre du basque, en particulier au niveau morphologique, ainsi que, dans une moindre mesure, lexical.
Morphosyntaxe
L'espagnol partage avec les autres langues romanes la plupart des évolutions phonologiques et grammaticales caractéristiques du latin vulgaire, telles que l'abandon de la quantité vocalique, la perte des déclinaisons et la disparition des verbes déponents.
Les principales évolutions qui caractérisent l’espagnol sont :
diphtongaison spontanée des E (>ie) et O (>ue) brefs toniques (TEMPU(M)>tiempo ; PORTA(M)>puerta etc.)
palatalisation des groupes -LL- et -NN- latins en [ʎ] et [ɲ] (ANNU(M)>año etc.)
bêtacisme, c'est-à-dire disparition de l'opposition entre les phonèmes /v/ et /b/ (sauf dans certains contextes d'hypercorrection).
sonorisation des consonnes occlusives sourdes intervocaliques (VITA>vida ; LACU(M)>lago etc.), trait commun aux langues romanes occidentales.
aspiration puis disparition du F- initial latin, conservé sous la forme d'un « h » muet dans la graphie usuelle (FILIUM>hijo ; FACERE>hacer, FABULARE>hablar ; FOLIA>hoja). Ce trait, que l'on retrouve également en gascon, est sans doute une conséquence de l'influence du substrat bascoïde (le système phonologique basque ne connaît pas de F- à l'initiale). Dans certaines régions le H- initial est encore prononcé aspiré.
adoption d'un système vocalique simplifié à 5 voyelles (a, e, i, o, u) lui aussi peut-être influencé par le basque.
dévoisement puis évolution singulière des fricatives de l'espagnol médiéval dans le sens d'une simplification, débouchant sur la mise en place de deux phonèmes particulier : la fricative vélaire sourde [x] et, dans différents dialectes péninsulaires, incluant notamment les parlers prestigieux de Tolède, Madrid etc., l'interdentale [θ] (proche du th anglais).
adoption d'une accentuation tonique basée sur l'intensité et non (comme en italien par exemple) sur la quantité.
En comparaison aux autres langues romanes, l'espagnol possède une typologie syntaxique particulièrement libre et avec des restrictions bien moindres concernant l'ordre des mots dans les phrases (typiquement : sujet-verbe-complément).
Un des traits syntaxiques caractéristiques de l'espagnol est l'ajout d'une préposition « a » devant les compléments d'objet renvoyant à une personne ou un être animé. Il peut être considéré comme une conséquence de la liberté syntaxique précédemment évoquée, le fait de pouvoir intervertir facilement les groupes syntaxiques dans une phrase entraînant possiblement une confusion entre sujet et objet, évitée grâce à l’emploi de la préposition. Ce trait concourt à une confusion que l'on rencontre dans l'usage des pronoms compléments directs et indirects (phénomènes qualifiés de Leísmo, laísmo et loísmo, le premier étant considéré comme correct dans certains cas d'un point de vue académique).
L'espagnol fait fréquemment usage d'un pronom complément indirect redondant en cas de présence du groupe nominal référent : le digo a Carmen : « je dis à Carmen » (littéralement : « je lui dis à Carmen »), et même se lo digo a Carmen (« je le lui dis à Carmen »).
Comme en latin et dans la plupart des autres langues romanes, et à la différence du français, l'usage des pronoms sujets est facultatif. Il n'est utilisé que pour lever une confusion dans certains cas de conjugaisons ou pour insister sur le sujet : yo sabía la lección (« je savais la leçon ») face à ella sabía la lección (« elle savait la leçon ») ou bien trabajo muy bien (« je travaille très bien ») opposé à yo trabajo muy bien (tú no) « moi, je travaille très bien (pas toi) ».
Système verbal
De façon générale, le système de conjugaison de l'espagnol est resté morphologiquement très proche du latin.
Les quatre conjugaisons latines sont réduites à trois en espagnol. Les infinitifs latins en -ĀRE, -ĒRE et -ĪRE deviennent respectivement en espagnol -ar, -er et -ir ; la troisième conjugaison latine, en -ĔRE, est redistribuée entre les deuxième et troisième conjugaisons de l'espagnol, -er et -ir (ex. : FACĔRE > hacer, DICĔRE > decir).
L'espagnol conserve avec une grande vitalité son passé simple, issu du parfait latin, qui tend à être remplacé par des formes analytiques dans d'autres langues romanes.
Comme dans d’autres langues romanes, on observe en espagnol une auxiliarisation du verbe haber (« avoir, posséder »). Celui-ci va permettre de construire les temps composés (suivis du participe-passé des verbes conjugués, qui reste toujours invariable en espagnol) mais aussi les nouveaux paradigmes du futur de l'indicatif (infinitif + haber) pour remplacer le paradigme latin (CANTABO…) tombé en désuétude. Le conditionnel est construit par analogie, en utilisant l'auxiliaire simplifié à l'imparfait. haber a fini par perdre son sens original de « avoir, posséder » au profit de tener, pour n’être plus qu’un verbe auxiliaire. Il conserve encore sa valeur sémantique d’origine dans certaines expressions lexicalisées, en particulier haber de + infinitif pour signifier une obligation et la forme hay < ha allí (« il y a ») ainsi que ses variantes dans les différents temps et modes (había, habrá, hubo etc. et même ha habido au passé-composé).
L'espagnol dispose actuellement de deux paradigmes de conjugaison pour le subjonctif imparfait, issus du plus-que-parfait latin, indicatif pour les formes en -ra (AMAVERAM>amara), et subjonctif pour les formes en -se (AMAVISSEM>amase). Bien que tous deux soient également admis sur un plan académique, le premier tend à se substituer au second, surtout dans le langage oral. De plus, il conserve encore dans certains usages, en particulier littéraires, sa valeur originelle d'indicatif plus-que-parfait, et est utilisé comme deuxième variante (libre) du conditionnel présent pour quelques verbes (querer > quisiera ~ querría ; deber > debiera ~ debería ; haber > hubiera ~ habría ; poder > pudiera ~ podría). De même, le subjonctif plus-que-parfait peut remplacer le conditionnel passé pour exprimer l'irréel du passé.
Les pronoms personnels compléments sont placés en enclise, c’est-à-dire collés immédiatement après le verbe, lorsque le verbe est à l’infinitif (llamarse, « s’appeler » ; dejarme, « me laisser », etc.), au gérondif (mirándome, « en train de me regarder / me regardant ») ou l’impératif (comme en français : mírame, « regarde-moi » ; et comme en français le pronom redevient proclitique si l’impératif est négatif : no me mires, « ne me regarde pas »). Les pronoms sont susceptibles de se combiner, le pronom indirect se place alors en premier : déjamelo, « laisse-le-moi ». Dans une combinaison, le pronom indirect de troisième personne devient se (habituellement pronom réfléchi) et non le : díselo, « dis-le-lui ». Lorsque la forme verbale portant le pronom est associée à un semi-auxiliaire, on a la possibilité de rattacher le ou les pronoms à celui-ci en position proclitique : está levantándose ~ se está levantando (« il est en train de se lever ») ; ¿Quieres callarte?~¿Te quieres callar? (« Veux-tu te taire ? ») ; suele decirme la verdad ~ me suele decir la verdad (« il me dit habituellement la vérité »). La construction enclitique est perçue comme légèrement plus soutenue. Les cas d’enclises de pronoms étaient beaucoup plus nombreux en ancien espagnol (direvos, « je vous dirai », os diré en espagnol moderne, etc.) ; certains sont préservés dans des locutions figées. On trouve un phénomène analogue en portugais, en catalan, en occitan aranais, ainsi que, partiellement, en italien.
Jusqu'au XVII siècle, l'espagnol a maintenu un subjonctif futur en -re (à valeur fortement hypothétique), issu d'une fusion des paradigmes du subjonctif parfait et du futur antérieur (remplacé par la forme composée en utilisant haber au futur). Cette forme a pratiquement disparu de l’espagnol actuel et ne persiste que dans des expressions lexicalisées, des proverbes et certaines formules juridiques.
Lexique
En raison de ses contacts prolongés avec d'autres langues, le lexique de l'espagnol comporte bon nombre de mots issus d'emprunts, notamment aux langues paléo-hispaniques (ibère, hispano-celtique), au basque, à l'arabe et à différentes langues amérindiennes.
Fonds paléo-hispanique
Mots d'origine ibère
L'ibère se parlait tout au long de la côte orientale de la péninsule, soit la Catalogne. Le fonds ibère consiste principalement en éléments géographiques et zoologiques, comprenant pour l'essentiel : ardilla « écureuil », arroyo « ruisseau », balsa « étang », calabaza « potiron » (cf. catalan carabassa), cama « lit », conejo « lapin » (du latin cuniculus), cuérrago « lit de fleuve », galápago « tortue de mer » (cf. cat. calapèt « crapaud »), garma « éboulis », gazapo « lapereau » (cf. portugais caçapo), gusano ~ gusarapo « ver », manteca « saindoux », maraña « fourré », marueco ~ morueco « bélier » (cf. cat. marrà, mardà), parra « pied de vigne », perro « chien », autrefois « corniaud », rebeco « chamois, isard » (du latin ibex, emprunté à l'ibère), sima « gouffre, abîme », tamo « menue paille ».
Mots d'origine hispano-celtique
L'hispano-celtique regroupe plusieurs variétés, dont le gallaïque (au nord-ouest), le celtibère et le gaulois tardif (au nord-est). Le fonds celtique concerne notamment la botanique, la faune, le labourage et d'une moindre mesure l'artisanat. Au celtique remontent : álamo « peuplier blanc », ambuesta « poignée », amelga « champ défriché », beleño « jusquiame », berro « cresson » (cf. français berle), bezo « babine », bodollo « faucille » (cf. fr. vouge), breca « pandore (mollusque) » (cf. poitevin brèche « vache bigarrée »), brezo « bruyère », bruja « sorcière », cam(b)a « chambige », combleza « maîtresse (d'un homme marié) », corro « cercle », cresa « asticot », cueto « butte, petite colline », duerna « pétrin », galga « galet », gancho « crochet », garza « héron », greña « enchevêtrement », mocho « bouc ou bélier châtré » (cf. fr. mouton), rodaballo « turbot », sábalo « alose », sel « pâturage commun », serna « champ labouré », taladro « tarière », terco « têtu », varga « chaumière », yezgo « hièble ».
Mots d'origine basque
Le basque, adstrat du castillan, l'a aussi influencé, et ce dès sa naissance. Certains mots, comme (1) izquierda « le gauche », du basque ezkerra (cf. cat. esquerre, port. esquerda), (2) madroño « arbousier » (cf. arag. martuel, cat. maduixa), correspondant au basque martotx « ronce » et martuts « mûre », et (3) zarza « ronce » (cf. port. sarça), qui provient du basque anc. çarzi (auj. sasi), ont eu du succès en évinçant le vieil espagnol siniestro « gauche » (aujourd'hui « sinistre »), alborço « fraisier » et rubo « ronce ». Certains d'entre eux ne semblent pas avoir connu de concurrent, comme vega « plaine fertile riveraine » (v.esp. vayca, vajka), qui répond au basque ibai « fleuve », ou sapo « crapaud », du basque zapo, face à son équivalent latin escuerzo, et enfin d'autres, comme muérdago « gui » (du basque mihura) et cachorro « chiot » (du txakur, « chien») ont fait glisser de sens leurs anciens synonymes (visco « glu (à base de gui) », cadillo « caucalis »). D'autres encore sont de date récente, comme zorra « renard », emprunté au portugais et substantivisé à partir d'un zorro « oisif », lui-même tiré du basque zuur ~ zur ~ zuhur « prudent ». Ce mot est toujours concurrencé par le sobriquet raposa, « la touffue », plus ancien : synonymie recherchée parce que le renard fait l'objet d'un tabou lexical.
Quelques vêtements sont passés du basque à l'espagnol, comme chapela (< txapel, « béret basque »), face à boina (« béret »), chamarra (< zamar ou txamar, zamarra ou txamarra avec l'article défini singulier, « veste »), des activités comme pelotari (« joueur de pelote basque »), chistu (< txistu, « flûte basque »), chalaparta (< txalaparta, instrument de percussion), aquelarre (« sabbat, de akelarre, lui-même formé à partir de aker « bouc » + larre « pré », car ces rites, soi-disant présidés par Satan lui-même, sous la forme d'un bouc, avaient lieu dans des prés) et le nom de la langue basque, euskera, eusquera ou euskara (< euskara), face à vasco ou le plutôt vieilli vascuence.
Plus récemment, des emprunts ayant rapport au contexte politique, comme zulo (« cache d'armes », du mot zulo, « trou »), kale borroka (« guerrilla urbaine », de kale, « rue » et borroka « combat »), ikurriña (d'ikurrina, « drapeau basque »), gudari (de gudari, « soldat », surtout pendant la Guerre civile espagnole) ou abertzale (« nationaliste basque ») sont devenus courants dans les média espagnols. L'espagnol régional du Pays basque possède évidemment davantage d'emprunts, tels que sirimiri (« bruine, crachin», face à llovizna), chirristra (« toboggan», du basque txirrista, face à tobogán) ou bien aita (« père») et ama (« mère »), face à papá et mamá ; la gastronomie a également fourni des mots, tels que marmitaco ou marmitako (plat préparé par les pêcheurs avec du thon et des pommes de terre, du basque marmitako), cocochas (de kokots, kokotsa avec l'article défini singulier, « barbillon, menton »), chacolí (du substantif txakolin, sorte de vin blanc) ou chistorra (de zistorra et txistorra, saucisson fin).
À noter également le nom órdago, de la phrase basque Hor dago ([il] est là), « renvi », à l'origine utilisée dans un jeu de cartes et qui veut dire aussi « épatant » dans l'expression de órdago.
Mots d'origine arabe
Héritage de l'époque musulmane, l'arabe apporta un grand nombre de mots à l’espagnol (plus de 4 000).
Noms communs d'origine arabe
Mot espagnol Traduction Origine arabe aceite huile āz-zayt (أَلْزيت) aceituna olive āz-zaytūnah (الزيتونة), singulatif du collectif āz-zaytūn (الزيتون) alacena placard ⁰āl-ḫazána, du classique ḫizānah (خزانة) albahaca basilic ⁰āl-ḫabáqa, du classique ḫabaqah (حبق) albañil maçon ⁰āl-banní, du classique bannā' (بناء) albaricoque abricot āl-barqūq (الْبَرْقُوق) « la prune » alcachofa artichaut v.esp. alcarchofa, de l'ar. régional āl-ḫarchūf (الخرشوف) « l’épine de la terre » alcalde maire āl-qāḍī (القاضي) « le juge » aldea hameau ād-ḍaj’ah (الضيعة) « le village » alguacil alguacil āl-wazīr (الوزير) « le ministre en chef » alhucema lavande ⁰āl-ḫuzáma, du classique ḫuzāma (خزاما) almohada oreiller ⁰āl-muḫáḍa, du classique āl-miḫaḍah (المخدة) alquiler loyer āl-kirā’ (الكراء) alubia haricot āl-lúbijā’ (اللوبيا) arroz riz āl-’áruz (الأرز) baharí faucon ⁰baḥrí, du classique baḥrī (بحري) « marin » fulano untel, type, mec fulān (فلان) « quiconque » gandul feignant ⁰ḡandúr, du classique ḡundar (غندر) « gâté » hasta jusque v.esp. fasta, de l'anc. (h)ata, fata, de l'arabe ḥatta (حتى) he voici hā (ها) jabalí sanglier ⁰ǧabalí, du classique ǧabalī (جبلي) « montagneux » jarra carafe ⁰ǧárra, du classique ǧarrah (جرة) majara fou dérivé régressif de majarón, de l'arabe maḥrūm (محروم) « misérable » marfil ivoire ‘aẓam āl-fyl (عظم الفيل) « os d’éléphant » marrano cochon ⁰maḥarrám, du classique muḥarram (محرم) « interdit » ojalá pourvu que ⁰lawchalláh, du classique law cha‘a Allâh (لو شاء الله) « Si Dieu le veut » rehén otage rihān (رِهان), pluriel de rāhn (رهن) « gage, otage » zanahoria carotte v.esp. çahanoria, d'un ⁰safunnārjah, du maghrébin isfannārijja (اسفنارية)
Noms propres d'origine arabe
Albacete, de l'arabe : البسيط, Al-Basit, la plaine ;
Alcázar, de l'arabe : القصر al-qṣar, al kasr ; château/forteresse, terme utilisé pour désigner cette architecture défensive en Andalousie ;
Alhambra de l'arabe : الْحَمْرَاء, Al-Ḥamrā', littéralement « la rouge », (la forme complète est Calat Alhambra الْقَلْعَةُ ٱلْحَمْرَاءُ, Al-Qal‘at al-Ḥamrā’, « la forteresse rouge ») ;
Almería, de l'arabe : مرأى al-Miraya, tour de vigie, donjon, mirador ;
Almodovar, de l'arabe : المدور al-mudawwar, la ronde ;
Grenade de l'arabe : غرناطة, Gar-anat, Colline des pèlerins ;
Gibraltar, de l'arabe : جبل طارق, djebel Tarik montagne de Tarik ;
Guadalquivir, de l'arabe : الوادي الكبير wâd-al-kébir (la grande rivière ou la grande vallée) wâd (oued) signifiant plus la notion de vallée que rivière qui se dit nahr ;
Guadalajara, de l'arabe : وادي الحجارة wâd-al-ħijârä (la vallée des pierres ou la rivière des pierres).
Andalousie de l'arabe Al-Andalus (Voir : Étymologie d'al-Andalus et de l'Andalousie).
Nom propre d'origine européenne et arabisé
Alicante, de l'arabe : ألَقَنت Al-Laqant via le catalan Alacant, de la cité romaine Leucante (Lucentum).
Mots d'origine gitane
Le caló (dialecte espagnol du romaní, langue des Roms proche des langues indiennes, comme l'hindi, dont de nombreux mots sont similaires : pani, « eau », etc.) a apporté un grand nombre de termes d’argot comme gachó « mec », bato « père », biruji « vent très froid », camelar « aimer », chaval,a « jeune », currar « bosser », fetén « excellent », parné « fric », sobar « pioncer », pinrel « panard », pureta « vieux, ancien », chorar « chaparder » (cf. fr. chourer), terne « fort, robuste », diñar « donner », mangue « moi », pañí « eau », chingar « piquer, voler», lacha « honte », pirarse « s'en aller », canguelo « peur », chachi « super », chanelar « comprendre, piger », chungo,a « difficile », jiñar « caguer », mangar « piquer, voler», clisos « yeux », jalar « bouffer ».
Écriture
Comme les autres langues romanes, l'espagnol a adopté l'alphabet latin et recourt à des diacritiques et des digrammes pour le compléter. Les accents écrits, utilisés en espagnol moderne pour marquer la voyelle tonique dans certains cas, ou pour distinguer certains homonymes, ont été utilisés de façon spontanée jusqu'à la standardisation de leur usage à la création de l'Académie royale espagnole au XVIII siècle. De plus, le u porte un tréma dans de rares occasions, à savoir dans les suites güe et güi pour indiquer que le u se prononce (par exemple : bilingüe, « bilingue »).
Le tilde est peut-être le plus célèbre des diacritiques espagnols ; il donne naissance à un caractère considéré comme une lettre à part entière, ñ. Il s'agit à l'origine d'un digramme NN, le second N ayant été abrégé par suspension au moyen d'un trait devenu ondulé, ~.
Ce sont les scribes espagnols qui ont inventé la cédille (zedilla, « petit z »), qui n'est cependant plus utilisée depuis le XVIII siècle (le ç, qui se notait [ts], est devenu un [θ] interdental noté z : lança est devenu lanza, « lance », ou c devant e et i : ciego, « aveugle »).
Les points d'exclamation et d'interrogation sont accompagnés par des signes du même type inversés, ¡ et ¿, placés au début de la proposition concernée (et non au début de la phrase) : ¿Qué tal estás? (« Comment vas-tu ? »), ¡Qué raro! (« Comme c'est étrange ! ») mais Si vas a Sevilla, ¿me comprarás un abanico? (« Si tu vas à Séville, tu m'achèteras un éventail ? »).
De façon générale, l'espagnol, à l'écrit, est une transcription proche de l'oral ; toutes les lettres doivent être prononcées, à de rares exceptions près (la plupart des h et le u des syllabes gue, gui, que et qui). L'apprentissage de la langue s'en trouve ainsi dans une certaine mesure facilité, autant pour les hispanophones de naissance comme pour ceux désireux d'apprendre la langue comme seconde langue. Les combinaisons de lettres ph, rh et th ainsi que ch provenant du kh grec ne sont pas utilisées, et seules les consonnes c, r, l et n peuvent être doublées. Le rr, comme r en début de mot, transcrit une consonne roulée alvéolaire voisée tandis que ll transcrit une consonne centrale liquide. La combinaison qu rend le son k devant e et i (comme habituellement en français).
Traditionnellement, ch et ll ont été considérées comme lettres à part entière et pour cette raison, dans le dictionnaire, elles se trouvaient classées en conséquence (par exemple : camisa, claro, charla, ou liar, luna, llama). Les dictionnaires ont cependant, peu à peu, abandonné cette pratique et recourent à un classement alphabétique classique (comme en français). Cette situation a été régularisée par l'Académie royale espagnole dans une réforme orthographique publiée en 2010, qui stipule que ch et ll ne doivent plus être considérées comme des graphèmes indépendants mais seulement comme une combinaison de deux graphèmes.
Variations et dialectes
Dialectes d'Espagne
Parmi les modalités les plus remarquables du castillan parlé en Espagne, on peut citer l'andalou (notamment caractérisé par la présence de seseo ou de ceceo selon les zones), le murcien, le castúo et le canarien.
Variations en Amérique hispanique
On distingue cinq aires de variation topolectale de l’espagnol en Amérique :
l'Amérique du Nord et l’Amérique centrale, où est en usage l'espagnol mexicain ;
les Caraïbes ;
les Andes ;
le Chili, où est en usage le topolecte de Santiago ;
le Río de la Plata et le Gran Chaco.
Parmi les plus remarquables, on peut citer l'utilisation d'un autre système de pronoms personnels. Le pronom de la troisième personne du pluriel ustedes (qui sert en Espagne uniquement à s'adresser à un ensemble de personnes que l'on vouvoie) remplace en Amérique hispanique le vosotros. Ce pronom, vosotros (2 personne du pluriel) équivaut en Espagne au « vous » français lorsque l'on s'adresse à un ensemble de personnes que l'on tutoie.
La prononciation ibérique de la consonne c (devant les lettres e et i) ou z (devant a, o et u), est une spirante interdentale (proche du th anglais dans le verbe think, pas dans l'article the). En Amérique latine, le phonème se prononce presque toujours /s/ (phonétiquement proche du s français, le s péninsulaire étant plus palatal), un important trait commun avec le canarien et une grande partie de l'andalou. Cette prononciation, appelée en espagnol « seseo », est généralisée en Amérique hispanique.
Les traits communs avec le dialectes andalou et canarien s'expliquent par le fait que la colonisation de l'Amérique hispanique et tous les échanges commerciaux avec celle-ci ont pendant longtemps été centralisés à Séville (les îles Canaries servant alors d'intermédiaire avec la Péninsule Ibérique), ce qui permettait un meilleur contrôle des flux par la monarchie. Ceci explique que le dialecte andalou ait été dominant chez les migrants qui y passaient souvent de longs mois avant de pouvoir embarquer pour le Nouveau Monde.
Les nombreux esclaves africains déportés dans l'empire espagnol ont également influencé certaines différenciations des parlers d'Amérique et développé une forme d'espagnol particulière au contact des colons, tout en apportant leur accent africain.
De grandes disparités peuvent exister au niveau du lexique. Par exemple certains mots courant dans l'espagnol péninsulaire sont obscènes en Argentine, en Colombie ou au Mexique, tels que coger (« prendre » en espagnol européen, mais « avoir des relations sexuelles » dans beaucoup de pays d’Amérique du Sud).
La prononciation pour l'heure peut différer en Espagne et en Amérique. Pour ce qui est de la première moitié du cadran (12 à 6), l'usage est le même. Pour la deuxième moitié (6 à 12), il y a des variations. Par exemple, en Espagne, Il est 9 h 40 » se dira « Son las diez menos veinte » tandis qu'en Amérique latine on préférera généralement « Faltan veinte (minutos) para las diez », bien que le paradigme péninsulaire existe et soit quelquefois employé. « Il est 1 h » et « Il est 13 h » se disent de la même façon : « Es la una (de la tarde) ».
Le spanglish
Une conséquence du contact de la langue espagnole avec l'anglais est l'apparition d'un parler appelé « spanglish », qui est employé notamment par des locuteurs aux États-Unis. Cette variante de l'espagnol est étudiée dans certaines universités comme l'Université Amherst du Massachusetts.
Exemples de spanglish
Mot espagnol |
Mot anglais |
Spanglish |
Français |
Banda |
Gang |
Ganga |
Gang |
Camioneta |
Truck |
Troca |
Camion |
Disfrutar |
To enjoy |
Enjoyar |
Profiter |
Reloj |
Watch |
Wacho |
Montre |
Creer |
To believe |
Bilivar |
Croire |
Extension et usage
Pays ou l'espagnol est langue officielle.
Pays et régions où l'espagnol est parlé sans avoir de reconnaissance officielle
En Europe, l'espagnol est langue officielle de l'Espagne (coofficielle suivant les régions autonomes), où elle est parlée par environ 46 millions de locuteurs. Dans le reste de l'Union européenne, on recense près de 29 millions d'hispanophones, en très grande majorité partiels.
En Amérique, l'espagnol est la langue officielle de 19 des 35 pays du continent : Argentine, Bolivie, Chili, Colombie, Costa Rica, Cuba, République dominicaine, Équateur, Guatemala, Honduras, Mexique, Nicaragua, Panama, Paraguay, Pérou, Porto Rico, Salvador, Uruguay et Venezuela. Les populations hispanophones les plus nombreuses se trouvent au Mexique (120 millions), aux États-Unis (53 millions, ce qui représente une proportion d'environ 18 % de la population, avec une densité supérieure à 25 % dans les États frontaliers du Mexique), en Colombie (47 millions), en Argentine (42 millions), au Pérou (31 millions) et au Venezuela (30 millions). Il y a également un million d'hispanophones au Canada et un demi-million au Brésil (où l'apprentissage de la langue est obligatoire à l'école primaire depuis 2005).
En Afrique, l'espagnol est la langue officielle de la Guinée équatoriale. Il est également parlé dans les régions nord du Maroc et au Sahara occidental, sans oublier les territoires espagnols de Ceuta, Melilla et les îles Canaries.
En Asie, plus de 3 millions de locuteurs existaient aux Philippines, mais aujourd'hui il y en a quelques milliers de moins que le demi-million de locuteurs hispanophones recensés en Australie.
Enfin, une variété du castillan appelée selon les auteurs ladino, judesmo, ispanyol ou judéo-espagnol est parlée par la communauté juive séfarade originaire de la Péninsule ibérique en Israël, Turquie, Maroc ou encore Gibraltar.
Répartition des hispanophones dans le monde
Pays Nombre de locuteurs natifs Nombre de locuteurs partiels Nombre total de locuteurs Mexique 117 630 193 2 083 010 119 713 203 États-Unis 41 343 921 11 **4 834 52 988 755 Colombie 47 231 384 380 898 47 612 282 Espagne 42 841 961 3 885 930 46 727 891 Argentine 41 949 717 253 218 42 202 935 Pérou 26 715 889 4 098 286 30 814 175 Venezuela 29 843 831 362 476 30 206 307 Union européenne (hors Espagne) 2 397 000 26 501 224 28 898 224 Chili 17 433 917 122 898 17 556 815 Équateur 15 699 692 304 072 16 003 7** Guatemala 13 014 432 2 048 568 15 063 000 Cuba 11 096 950 66 984 11 163 934 République dominicaine 10 232 971 145 296 10 378 267 Bolivie 9 049 305 1 245 695 10 295 000 Honduras 8 450 335 85 357 8 535 692 Paraguay 4 663 262 2 046 468 6 709 730 Salvador 6 274 121 18 879 6 293 000 Nicaragua 5 888 914 182 131 6 071 045 Costa Rica 4 734 944 38 185 4 773 129 Porto Rico 3 681 080 44 709 3 725 789 Uruguay 3 358 **4 37 356 3 396 000 Panama 3 108 000 53 214 3 161 214 Maroc 6 586 1 529 665 1 536 251 Canada 909 000 92 853 1 001 853 Guinée équatoriale 666 080 69 920 736 000 Brésil 460 018 96 000 556 018 Australie 117 498 374 571 492 069 Philippines 3 325 461 689 465 014 Belize 173 597 22 000 195 597 Israël 130 000 45 231 175 231 Antilles néerlandaises 10 699 114 835 125 534 Suisse 86 000 25 000 111 000 Aruba 13 710 69 354 83 0** Trinité-et-Tobago 4 100 61 786 65 886 Andorre 30 715 20 220 50 935 Algérie 300 48 000 48 300 Norvège 12 573 23 677 36 250 Russie 3 320 20 000 23 320 Sahara occidental 22 000 22 000 Îles Vierges américaines 16 788 16 788 Turquie 1 134 12 346 13 480 Jamaïque 8 000 8 000 Islande 700 700 Autres pays 12 000 87 000 99 000 TOTAL 469 949 593 58 905 216 528 854 809
Littérature
Les prix Nobel de littérature en langue espagnole :
José Echegaray, Espagne (1904)
Jacinto Benavente, Espagne (1922)
Gabriela Mistral, Chili (1945)
Juan Ramón Jiménez, Espagne (1956)
Miguel Angel Asturias, Guatemala (1967)
Pablo Neruda, Chili (1971)
Vicente Aleixandre, Espagne (1977)
Gabriel García Márquez, Colombie (1982)
Camilo José Cela, Espagne (1989)
Octavio Paz, Mexique (1990)
Mario Vargas Llosa, Pérou (2010)
Distinction entre « espagnol » et « castillan »
Le terme « espagnol » est recommandé par l'Académie royale espagnole (Real Academia Española, RAE), et l'Association des académies de la langue espagnole en tant que dénomination internationale de la langue. Toutefois, cette appellation est peu employée voire rejetée dans des pays où l'espagnol est langue officielle, et où le terme de castillan est préféré :
en Espagne, le terme « castillan » est très couramment utilisé, de longue date. D'autre part, l'adjectif « espagnol » faisant référence à l'ensemble du territoire et d'autres langues étant traditionnellement parlées dans une part importante du territoire (dont le catalan, le basque et le galicien, qui bénéficient d'un statut officiel depuis la transition démocratique), l'appellation de « castillan » est plus proche de la réalité, s'agissant d'une langue d'Espagne parmi d'autres, provenant de Castille ;
en Amérique hispanique, pour des raisons historiques liées au processus d'indépendance de chaque pays et de son rapport à l'Espagne, la dénomination « espagnol » est plus généralement acceptée du Mexique à la Colombie et la dénomination « castillan » est préférée en République dominicaine, à Cuba, Porto Rico, et dans certains autres pays de l'Amérique du Sud de langue espagnole.
Par ailleurs, la dénomination castillan peut désigner plus précisément :
L'espagnol envisagé comme langue officielle de l’Espagne ;
Le dialecte roman originaire de Cantabrie et employé au royaume de Castille durant le Moyen Âge. Voir Castillan ancien ;
Le dialecte moderne parlé actuellement dans les régions centrales espagnoles de Castille-et-León, Castille-La Manche et Madrid, en opposition aux autres dialectes de la langue, péninsulaires ou non, comme l'andalou, le canarien ou le murcien.