En grammaire, le participe est un mode du verbe qui lui donne les caractéristiques d'un adjectif. De ce fait, il « participe » à la fois d'une nature verbale et d'une nature de qualificatif.
Dans les langues flexionnelles, il ne se conjugue pas mais se fléchit comme un adjectif, d'autant plus quand il accompagne un nom, avec lequel il peut s'accorder (chanté = « qui est chanté », vu = « qui est vu », cru = « qui est cru », donné = « qui est donné »).
En revanche, son héritage verbal lui permet de recevoir des compléments et des marques temporelles.
Il sert de second élément apportant le sens lexical dans un temps composé : j'ai marché.
Participe actif et participe passif
Celine Dion chantant Taking Chances, photographiée en 2008 par Anirudh Koul. Le participe présent (chantant) marque "Celine" comme étant l'agent (actif) d'une action (chanter) dont on peut préciser l'objet (Taking Chances). Le participe passé (photographiée) la marque comme étant l'objet (passif) d'une autre action (photographier) dont on connaît l'agent (Anirudh Koul) et un complément circonstanciel de temps (en 2008).
Qualificatif de l'agent et de l'objet
Les verbes transitifs traduisent d'une manière générale une action, effectuée par un agent, et portant sur un objet (parfois désigné par patient, du latin pateo, je subis) :
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« La fille chante des chansons » : L'agent (sujet) est la fille, l'action est chanter, et l'objet de l'action est des chansons.
À chaque verbe de ce type peut correspondre deux participes, l'un permettant de qualifier l'agent (le participe actif), l'autre l'objet (le participe passif), qui peuvent l'un et l'autre être utilisés comme épithète ou attribut :
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« La fille chantante » : "chantant" qualifie ici l'agent habituel de ce type d'action.
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« Les chansons chantées » : "chanté" qualifie l'objet habituel de l'action.
Cette même opposition se retrouve dans de nombreuses langues, par exemple en espéranto :
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Mi estas amanta : Je suis aimant, Je suis en train d'aimer, agent de l'action.
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Mi estas amata : Je suis aimé, Je suis en train d'être aimé, objet patient de l'action.
NB : La désignation de participe « actif » ou « passif » renvoie à la relation entre l'action et l'objet qualifié, non au caractère actif ou passif de la construction grammaticale dans laquelle il se trouve. On peut rencontrer un participe passif dans une construction active, quand il est employé pour former des temps composés (j'ai terminé mon repas), aussi bien que dans une construction passive, quand il sert à former la voix passive (le repas est terminé).
Emploi comme qualificatif
Le participe a un caractère d'adjectif dans le sens où il peut qualifier l'objet auquel il se rattache. Il conserve également normalement un caractère verbal, dans le sens où il peut lui-même recevoir les mêmes compléments que le verbe dont il est issu, ainsi le cas échéant que des marques verbales.
Dans leur emploi de qualificatif, les deux participes peuvent s'accorder régulièrement, comme tout adjectif (quand l'adjectif s'accorde). C'est essentiellement cette forme d'emploi qui entraîne l'accord du participe passé en français.
« Le participe est donc à cet égard comme les adjectifs : comme eux, il s'accorde en genre, en nombre, & en cas avec le nom auquel il est appliqué ; & les adjectifs expriment comme lui des additions accessoires qui peuvent s'expliquer par des propositions incidentes : des hommes savants, c'est-à-dire, des hommes qui sont savants. En un mot le participe est un véritable adjectif, puisqu'il sert, comme les adjectifs, à déterminer l'idée du sujet par l'idée accidentelle de l’événement qu'il exprime, & qu'il prend en conséquence les terminaisons relatives aux accidents des noms & des pronoms. Mais cet adjectif est aussi verbe, puisqu'il en a la signification, qui consiste à exprimer l'existence d'un sujet sous un attribut ; & il reçoit les diverses inflexions temporelles qui en sont les suites nécessaires : le présent, precans (priant) ; le prétérit, precatus (ayant prié) ; le futur, précaturus (devant prier). » (Encyclopédie de Diderot)
Le participe peut cependant perdre sa caractéristique et fonctionner dans certaines constructions comme un adjectif simple, qualifié de adjectif déverbal :
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C'est un sujet intéressant mon élève : par son caractère verbal le participe peut ici recevoir un complément d'objet, ou d'autres compléments (circonstanciel de temps, etc).
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C'est un sujet très intéressant : le qualificatif intéressant peut recevoir un adverbe très, mais dans cette position le qualificatif ne peut plus recevoir de compléments verbaux.
Certaines langues font une distinction entre un adjectif verbal et un participe adverbial (parfois appelé gérondif), qui joue le rôle d'un adverbe dans la phrase où il apparaît. Ces deux formes sont différentes dans des langues comme le russe et d'autres langues slaves, le hongrois, et de nombreux langages eskimo comme le sirenik qui possède un système complexe de participes. Quelques grammaires descriptives placent ces deux formes dans deux catégories différentes.
Marquage temporel du participe
« Ave Caesar
Morituri te Salutant »
Participe futur substantivé, morituri qualifie ici « ceux qui doivent mourir ».
Le participe actif qualifie (au présent) un agent en train de réaliser son action, ou la réalisant de manière habituelle. C'est donc au sens propre un « participe présent ».
Certaines langues, tels le latin, l'espéranto ou le lituanien utilisent également un participe passé et un participe futur. Le participe passé désigne qualifie alors l'agent qui a accompli l'action, ou qui l'accomplissait de manière habituelle ; et le participe futur qualifie l'agent qui s’apprête à accomplir l'action, ou qui a vocation à le faire.
Exemples :
(latin) amaturus, -a, -um : allant aimer, devant aimer. precatus, -a, um : ayant prié, qui priait. Phrase célèbre : Morituri te salutant. : « Ceux qui vont mourir te saluent. »
Phrase célèbre : Morituri te salutant. : « Ceux qui vont mourir te saluent. »
(espéranto) Mi estas venonta : Je vais venir, Je suis sur le point de venir. Mi estas veninta : Je suis venu.
(lituanien) gyvensiantis, gyvensiąs, gyvensianti : allant vivre.
Noter que le « participe passé » en français ne correspond pas à une différence de marquage temporel.
Participe substantivé
Le participe peut être substantivé. Le participe actif devient alors un nom d'agent : « le mandant » est celui qui donne un mandat, « le mandé » est celui qui reçoit ce mandat.
En arabe, le participe n'existe pratiquement que sous forme substantivée. Le participe actif (ou اسم الفاعل ism al-fāʿil) désigne celui qui fait l’action , le participe passif (ou اسم المفعول ism al-mafʿūl) désigne celui qui subit l'action
Participe et conjugaisons
Forme progressive
Dans certaines langues (comme l'anglais, mais pas en français), le participe actif sert à former des temps composés dénotant une forme progressive :
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I am reading : je suis en train de lire, littéralement * je suis lisant.
Temps composés
Dans de nombreuses langues, le participe passif sert à former des temps composés :
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j'ai lu le livre.
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I have read the book.
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Ich habe das Buch gelesen
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Ho letto il libro
Conjugaison passive
La voix passive est généralement formée à partir du participe passif, employé dans une construction « objet-attribut ».
Aspect accompli/inaccompli
Dans certaines langues, le participe distingue l'action accomplie de celle en cours d'exécution (inaccomplie). Ce n'est pas le cas en français :
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Les moutons sont tondus (en train d'être tondus, participe inaccompli).
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Les moutons sont tondus (ayant été tondus, participe accompli).
Comme en français dans l'exemple ci-dessus, la distinction de sens peut être rétablie si nécessaire par des constructions plus complexes :
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The book is read = the book is being read = le livre est en train d'être lu (participe inaccompli).
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The book is read = the book has been read = le livre est ayant été lu (participe accompli).
Participes en français
Participe présent et participe passé
En grammaire française, le participe possède deux temps liés à deux voix :
Le participe actif prend traditionnellement le nom de participe présent. Un tel participe est le plus souvent actif (chantant = « qui chante », voyant = « qui voit », croyant = « qui croit »). La grammaire scolaire nomme gérondif une forme composée de la préposition en suivie d'un participe présent (en marchant) ;
Le participe passif est traditionnellement désigné par participe passé. La plupart du temps, un participe passé est passif (vu = « qui est vu », cru = « qui est cru », donné = « qui est donné »). Il sert de second élément apportant le sens lexical dans un temps composé : j'ai donné.
Ces désignations traditionnelles dérivent de la grammaire latine, où elles désignent correctement « les diverses inflexions temporelles qui en sont les suites nécessaires » : le participe présent precans (priant) ; le participe passé precatus (ayant prié) ; et le participe futur précaturus (devant prier). On voit cependant que le « participe passé » de "prier" ne tire pas son nom d'un sens passé ("prié" ne signifie pas "ayant prié"), mais du fait que ce participe passé est employé dans la conjugaison du passé composé « j'ai prié ». Mais cette action peut se situer dans le futur : « quand j'aurai prié, je partirai ».
En revanche, par rapport à l'aspect accompli/inaccompli, le participe passé a un sens accompli et s'oppose aux formes non composées : "je priais" (=j'étais en train de prier, inaccompli vu du passé) contre "j'ai prié" (=je suis ayant fini de prier, accompli vu du présent). C'est en ce sens que le participe français peut être qualifié de « passé », dans la mesure où l'action qu'il désigne est accomplie.
En français, le participe passif (qui s'accorde) n'existe que dans le cas de verbes transitifs directs. Par nature, les verbes intransitifs ou transitifs indirects ne peuvent pas qualifier un objet, et leur participe passé est par nature invariable :
« J'ai ri de toi » mais rien ni personne ne peut "*être ri" - le verbe est intransitif.
« J'ai adhéré à ce club » mais le club ne peut pas "*être adhéré" - ce verbe est transitif indirect.
Lorsqu'on parle d'accord du participe passé, il ne s'agit que de l'accord du participe passif des verbes transitifs directs.
Conjugaison passive inaccomplie - adjectif verbal accompli
Il n'y a pas de différence de forme entre la forme passive et la forme attribut, bien qu'il y ait une différence de sens réelle et pouvant être importante :
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« Les brebis sont tondues » : (=ayant été tondues) sens attribut ⇒ si l'activité de tonte a eu lieu hier, aujourd'hui elles sont tondues, c'est leur état (accompli).
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« Les brebis sont tondues » : (=en train d'être tondues) sens passif ⇒ elles sont l'objet d'une tonte en cours non achevées (inaccompli).
Seul le sens et le contexte peuvent permettre (éventuellement) de distinguer ces deux valeurs :
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« Les brebis relâchées sont tondues » : dans cet exemple il est évident que les brebis ne peuvent pas être tondues après avoir été relâchées, donc le sens est bien celui d'un attribut : « Les brebis qui sont relâchées ne sont prises que parmi celles qui ont été tondues. »
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« Les brebis tondues sont relâchées », suggère au contraire un sens passif, parce que la séquence de tondre d'abord et relâcher ensuite est logique : « Après avoir été tondues, les brebis sont relâchées. »
Noter également une différence de sens entre l'utilisation du participe passé, qui dénote l'existence d'une action, et celle d'un adjectif équivalent mais différent, qui ne traduit qu'une situation abstraction faite d'une action :
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« Le lait est chaud » : la température élevée du lait est un fait actuel, son histoire n'est pas considérée.
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« Le lait est chauffé » (=ayant été chauffé) : la température élevée du lait est le résultat d'une action accomplie, il n'était pas « chaud / chauffé » dans un état antérieur.
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« Le lait est chauffé » (=en train d'être chauffé) : la température du lait monte, il n'était pas « chaud / chauffé » dans un état antérieur, l'action est actuellement inaccomplie.
Malgré la différence potentielle de sens, il n'y a jamais de différence de forme entre le sens inaccompli (passif) et accompli (attribut) du participe passé. Dans tous les cas, le participe passé s'accorde comme le ferait un adjectif verbal ; et il n'y a pas de différence grammaticale entre la forme passive inaccomplie et la forme accomplie adjectivale.
Voix passive
La forme passive est conjuguée avec le verbe auxiliaire être, et ne se distingue pas formellement de la construction objet+attribut, signifiant que l'objet a pour caractéristique d'avoir subi ou d'être en train de subir (passivement) l'action exprimée par le verbe.
De fait, la même forme peut aussi bien exprimer l'état final accompli (fonction d'adjectif verbal) que l'action inaccomplie subie passivement (fonction de participe passé).
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« Les chansons sont chantées » (en train d'être chantées) : forme passive, état inaccompli.
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« Les chansons sont chantées » (ayant été chantées) : forme attribut, état accompli.
Dans ce dernier sens, « La pomme est cuite » est parallèle à « La pomme est jaune », et les deux qualificatifs peuvent être coordonnés : « La pomme est jaune et cuite ». Dans ce type d'emploi, le participe passé s'accorde alors en genre et en nombre à l'objet auquel il se rapporte.
Formation des temps composés
De plus, par ailleurs, le participe passé sert dans la conjugaison pour former les temps composés.
Les temps composés suivent le plus souvent une construction différente utilisant le verbe auxiliaire avoir, dans laquelle le participe passé ne s'accorde pas :
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« La fille a chanté des chansons. »
Certains verbes intransitifs utilisent de manière irrégulière la forme passive pour leur conjugaison composée :
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« La fille est venue à la maison. »