Démolition d'un immeuble par un engin de chantier.
La démolition (ou déconstruction, ou démantèlement) est la destruction d'œuvres de génie civil telles que bâtiments, infrastructures de transport de biens, énergie, ou personnes, avions ou bateaux etc. Quand un objectif de recyclage ou réutilisation des éléments de l'ouvrage existe : on parle plutôt de démontage ou de déconstruction (cette dernière étant communément appelée "curage"), éventuellement HQE. Dans tous les cas, il peut y avoir une ou plusieurs étape(s) de déconstruction et recyclage de matériaux, avant, pendant et après la démolition, avec par exemple, la récupération des métaux ferreux ou non ferreux, poutres, fenêtres, éléments de décor, etc.
Les chantiers de démolition navale sont des installations de démolition de bateau. Des cahiers des charges et précautions particulières sont à l'essai pour les premiers démantèlement de centrales nucléaires.
Méthodes
Démolition par grignotage
La démolition peut se faire par :
La force humaine, avec des outils comme la masse.
La boule de démolition, une masse pendue à une grue (interdit dans certaines communes de France).
L'utilisation d'outils de démolition montés au bout de pelles hydrauliques, grues, et mini-pelles. Ces outils se décomposent en plusieurs familles adaptées aux différentes applications de démolition. La pince de démolition hydraulique (la plus grosse en version 2 vérins est d'une ouverture de 2500 mm et d'un poids de 13100 kg la MS130R de Mantovanibenne), le broyeur hydraulique fixe ou à rotation (généralement en version 1 vérin), la cisaille à métaux hydraulique fixe ou à rotation (1 vérin) jusqu'à 10800 kg par exemple en application de découpe de bateaux en condition sous-marine, la pince de tri hydraulique, le broyeur à poteaux jusqu'à 1800 mm de diamètre, le grappin de démolition, et d'engins de démolition tels que le bulldozer, la pelle hydraulique équipée de bras standard ou de bras grande hauteur pouvant atteindre 90 m.
Le grignotage. Cette technique, plus couramment utilisée que le dynamitage, consiste à démolir la structure à l’aide d’une pelleteuse équipée d’un outil. La dextérité du conducteur, alliée à la performance de l’engin, vient à bout des structures les plus rigides. Mais aujourd’hui les tours à démolir sont de plus en plus élevées, ce qui nécessite des machines également toujours plus hautes (la kobelco S**500D parmi les plus hautes pelles du monde avec 65 mètres de bras de démolition, et au printemps 2008 entre en service aux Pays-Bas chez le client Eurodemolition une CAT5110 modifiée avec un bras de démolition télescopique de 90 m portant une pince à béton de 5000 kg et à 70 m une pince à béton Mantovanibenne modèle CR100R de 11 t d'une ouverture de 2000 mm ).
Lance thermique. Technique atypique permettant la découpe ou le perçage rapide de n’importe quel matériau (Béton armé, roches, inox, fonte, aluminium…) sans vibration. Technique utilisé comme dernier recours lorsque les techniques classiques ne s'avèrent pas efficaces.
Le dynamitage, c'est-à-dire l'utilisation d'explosifs, et notamment de dynamite pour des immeubles de plus de 7 étages.
Le vérinage, qui consiste à exercer une poussée oblique ou horizontale à l'aide de vérins hydraulique sur un ou deux étages préparés d'une tour ou d'une barre.
Démolition HQE
En France, une démolition peut faire l'objet d'un cahier des charges de type HQE (Haute qualité environnementale), qui visera à réduire les nuisances tout au long du chantier (bruit, poussière, odeurs, dérangement), à réduire l'empreinte écologique et énergétique du chantier, et à recycler au mieux les matériaux démontés ou issus de la déconstruction et démolition. Certaines constructions HQE sont d'ailleurs maintenant conçues (écoconception) en amont pour faciliter une future déconstruction et la réutilisation de matériaux ou éléments bâtis.
Chantiers
Restrictions d'accès
Chantier de démolition
Les chantiers sont toujours dangereux et pour cette raison devraient être soigneusement matérialisés et entourés de grilles afin d'en restreindre l'accès public. L'évacuation provisoire des riverains peut être décidée en cas d'usage d'explosifs ou de danger particulier. Le brûlage de tout type de déchet à l'air libre est interdit en France et dans de nombreux pays. Certaines friches industrielles, sites militaires, hôpitaux, etc nécessitent des précautions particulières, l'ouverture de chantiers sur ces sitres devraient être précédés d'une étude de risque et de dangers.
Conditions de travail
L'activité de démolition est un secteur particulièrement accidentogène : les opérateurs des chantiers de démolition sont en effet exposés à de nombreux risques : contusions, chutes, électrocution, etc. Ils sont aussi susceptibles d'être exposés à des agents chimiques dangereux (sous forme de gaz ou d'aérosols), dont certains cancérogènes.
Déchets
La démolition est à l'origine d'un volume important de déchets (ex. : 310 millions de tonnes par an, rien que pour les chantiers de démolition et de travaux publics français). Ils sont, dans la plupart des pays dits développés, répartis en plusieurs catégories, selon leur dangerosité :
Les déchets inertes (DI) ou de classe 3 : Ce sont les déchets non toxiques et qui ne subissent aucune modification dans le temps (gravats, brique, parpaing, tuile, mortier, ciment, carrelage, enrobés sans goudron, terre…). Ils seront retraités en plate-forme de tri, centre de tri, centre d'enfouissement technique de type III. Le béton, lui, pourra être concassé pour être réutilisé en cailloux, gravier, pour faire des routes…
Les déchets industriels banals (DIB) ou de classe 2 : Ce sont les déchets réputés non dangereux, assimilables aux ordures ménagères (emballages, cartons, déchets issus du curage des bâtiments, PVC, lino, plâtre, végétaux, métaux (hors plomb, mercure, etc.), sacs à ciment, câbles et tuyauteries). Ils pourront être enfouis en centre d'enfouissement technique de type II, recyclés (carton, métaux et certains plastiques), incinérés ou revalorisés (transformation des végétaux en compost ou gaz).
Les déchets industriels spéciaux (DIS) ou de classe 1 : Ce sont les déchets comportant des matériaux et produits chimiques ou toxiques néfastes à la santé et à l'environnement (piles, produits ménagers, acides, peintures, dissolvants, hydrocarbures, huiles, pesticides, liquides de refroidissement, amiante, etc.) Ils seront retraités en centre spécialisé, inertés et enfouis selon la réglementation (en décharge de classe 1 en France).
Deux solutions existent pour le traitement de l'amiante :
La vitrification (par plasma),
l’enfouissement en centre spécialisé.
Les déchets dangereux ou les déchets toxiques sont à éliminer avec précaution et selon la réglementation spécifique à leur nature.
Aspects légaux
La démolition d'infrastructures et de bâtiments importants nécessite généralement un permis de démolir. Sauf pour les communes de moins de 10 000 habitants. Le brûlage des déchets de démolition (et autres) est interdit dans de nombreux pays, en raison du fait qu'ils contiennent souvent des produits toxiques ou posant des problèmes sanitaires ou environnementaux (bois traités avec des pesticides, laines minérales, plomb, zinc, cuivre, PVC, peinture, vernis, etc. qui produisent des fumées et/ou cendres toxiques)
Les conditions de démolition du patrimoine ou des immeubles situés dans des zones de protection
En France, les conditions dans lesquelles les démolitions peuvent être autorisées sont fixées par le Code de l’urbanisme pour le régime commun et par la loi du 31 décembre 1913 modifiée pour les immeubles protégés au titre des monuments historiques. La loi du 21 juin 1898 (codifiée aux articles 303 et suivants de l’ancien Code de l’urbanisme et de l’habitation) modifiée par la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 (JO du 14) relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU) a institué une procédure spéciale destinée à remédier aux dangers créés par les immeubles menaçant ruine. Le maire peut prescrire aux propriétaires de ces immeubles toutes mesures de nature à faire cesser le péril. Lorsqu’il est saisi, le Tribunal administratif est lui-même investi de larges pouvoirs : il peut modifier la décision du maire et ordonner, dans la limite des conclusions des parties, toutes les mesures qui lui semblent s’imposer. La loi du 31 décembre 1913, relative aux monuments historiques, a prévu notamment qu’aucune démolition d’un immeuble situé dans le champ de visibilité d’un immeuble classé monument historique ou inscrit sur l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques ne peut être effectuée sans une autorisation préalable délivrée par le préfet et, en appel, par le ministre chargé de la Protection des monuments historiques.
Dans quelle mesure, lorsqu’un bâtiment menaçant ruine se trouve dans le champ de visibilité d’un immeuble classé ou inscrit, ces deux législations doivent-elles être combinées ? Plus précisément le juge administratif peut-il ou doit-il tenir compte de l’avis émis par l’administration des Affaires culturelles dans le choix des mesures propres à faire cesser le péril ? Telle était la question posée au Conseil d’État par le pourvoi de la société immobilière « La Clairvoyance ».
Celle-ci était propriétaire d’un immeuble sis à Montmartre qui, en raison de son délabrement, fut frappé d’un arrêté de péril du Préfet de police enjoignant des réparations ou la démolition. Favorable à cette dernière solution, compte tenu de son moindre coût, la société entama les démarches en vue de l’obtention du permis de démolir requis à Paris. Elle demanda notamment, en application de l’article 13bis de la loi du 31 décembre 1913, l’autorisation des services culturels qui s’avérait nécessaire en raison de la situation de l’immeuble compris dans le champ de visibilité de l’église Saint-Jean-de-Montmartre, édifice inscrit à l’Inventaire supplémentaire des monuments historiques. L’Architecte des bâtiments de France refusa d’accorder l’autorisation de démolir car il estimait la conservation de l’immeuble nécessaire à la préservation du site du vieux Montmartre. Parallèlement, la procédure de péril suivait son cours et, les mois passant sans que la société ait entrepris des travaux pour remédier aux dangers créés par son immeuble, le Préfet de police saisit le Tribunal administratif de Paris. Le Tribunal, en se fondant sur l’avis émis par l’Architecte des bâtiments de France, ordonna à la société d’effectuer des réparations importantes, sans démolir l’immeuble. La société soutenait en appel, qu’en retenant ce motif, le Tribunal administratif avait commis une erreur de droit.
Une première solution, qui avait été adoptée en 1957 par la Cour de cassation, consistait à affirmer l’indépendance totale des législations relatives aux monuments historiques et aux édifices menaçant ruine. Dans le cadre de cette dernière procédure, les mesures prescrites par l’Administration et le juge devraient être exclusivement commandées par le souci de remédier le plus efficacement au péril indépendamment de toute considération tirée de l’esthétique ou de la conservation des bâtiments. Cette conception aurait abouti à consacrer la suprématie absolue de la procédure de péril sur toute autre règle d’urbanisme ou de protection, alors que la jurisprudence du Conseil d’État reconnaît depuis longtemps la nécessité de tenir compte, dans le choix des mesures propres à faire cesser le péril, des considérations tirées d’autres législations, par exemple des effets que comportent les plans d’urbanisme en matière d’alignement.
Une deuxième solution, à l’opposé de la précédente, consistait à consacrer la supériorité de la législation sur les monuments historiques. L’Administration et, dans la mesure où il estimerait fondée l’appréciation émise par les services culturels, le juge auraient été alors liés par l’avis de ces services, dans le choix des mesures propres à faire cesser le péril d’un immeuble classé ou inscrit ou situé dans le périmètre de protection d’un édifice classé ou inscrit. Cette solution aurait présenté l’inconvénient d’allonger les délais, compte tenu de la procédure relativement complexe d’octroi de l’autorisation prévue par l’article 13 ter de la loi du 31 décembre 1913, dans une matière où l’impératif de sécurité publique impose des mesures rapides pour mettre fin au péril.
Aussi est-ce à une troisième solution, intermédiaire entre les deux précédentes, que s’est rallié le Conseil d’État. Il a jugé que le choix des mesures propres à faire cesser le péril pouvait légalement tenir compte de l’avis émis par les autorités culturelles. Le juge administratif n’est toutefois pas lié par cet avis et peut ordonner la démolition même si l’administration des Affaires culturelles n’a pas donné son autorisation. Conformément aux principes dégagés par la jurisprudence, le juge doit ordonner les mesures les mieux adaptées et tenant compte de l’ensemble des circonstances de chaque affaire ; l’avis émis par les services culturels constitue, parmi d’autres, un des éléments de cet ensemble (extrait de Études et Documents du Conseil d’État, 1977-78).