L'autoformation est le fait pour une personne de se former elle-même, dans un cadre qui lui est propre, d’une façon plus ou moins éloignée des structures et institutions enseignantes et formatives.
Si l'autodidacte est habituellement présenté comme une personne poursuivant une démarche solitaire, il est de plus en plus facile de trouver des ressources d'autoformation collective : groupe d'échange de savoirs, réseaux sociaux d'apprentissage... Les courants de l'éducation populaire, l'université populaire, les réseaux d'échange réciproque de savoir et les phénomènes collaboratifs comme le wiki, illustrent ce phénomène important de la société du XXI siècle. À l'inverse, l'auto-formation est souvent conduite au savoir grâce à la pratique. C'est en réalisant les choses, donc en « mettant la main à la pâte » que l'autodidacte acquiert des connaissances, d'où l'importance de l'apprentissage par la pratique.
Lectures théoriques
Pour Joffre Dumazedier, le concept d'autoformation est un concept ambigu. S'il permet d'appréhender les pratiques du sujet de ce qu'il a nommé « la société des loisirs », il a ses limites et n'est pas sans danger en ce qu'il peut alimenter le mythe d'un auto-engendrement.
Jean-Jacques Rousseau, qui se revendique d'autodidaxie, avait déjà entrevu cet écueil. Sa théorie des trois maîtres (nature-hommes-choses) se rapproche de la théorisation de Gaston Pineau, qui propose un triangle de l'auto-formation reposant sur trois pôles (eco, le monde - hetero, les autres - auto, soi même).
Enfin, pour le pédagogue Philippe Meirieu, « il n'y a d'apprentissage véritable qu'en autoformation ». Ces différents auteurs s'attachent ainsi à affirmer la formation comme l'acte d'un sujet désirant qui peut se former avec, contre ou sans les institutions éducatives.
Georges Le Meur indique que dans la modernité « la lutte contre l'obsolescence des savoirs professionnels provoque l'apparition d'un autodidacte nouveau » et il développe le concept de néo-autodidaxie. Celle-ci "désigne un phénomène éducatif majeur de la société post-industrielle [...] qui appelle des apprentissages ininterrompus de savoirs récents dans tous les domaines". Ainsi aujourd'hui la néo-autodidaxie recouvre la démarche pédagogique qui consiste à assurer soi-même l'acquisition de connaissances choisies en principe hors des systèmes éducatifs, donc sans enseignant". Au XXI siècle, de nouvelles potentialités et les souhaits d'autonomie autorisent des cursus de formation dans l'agir quotidien. Ainsi, le nouvel autodidacte peut recevoir le savoir à domicile [(France Henry)] par des média multiples, garantissant ses acquisitions hors des organismes qu'il prend parfois en compte. De nos jours "L'autodidaxie se révèle un mode d'apprentissage existentiel ou cognitif dans lequel le sujet social apprenant conserve toutes les responsabilités sur son action formative". Le nouvel autodidacte exerce toujours un pouvoir total sur ses activités éducatives.
En 2016, parait "Apprendre par soi-même aujourd’hui. Les nouvelles modalités de l'autoformation dans la société digitale" sous la direction de Marc Nagels et Philippe Carré . Cet ouvrage vient consolider et actualiser les connaissances sur l'autoformation à la lumière de l'usage des ressources numériques. L'autoformation est analysée sous trois angles spécifiques : l'environnement, avec l'influence du milieu familial et professionnel ; les ressources et le rapport aux ressources numériques ou sociales mobilisées par l'autoformation ; l'approche cognitive qui met l'accent sur l'organisation cognitive de l'activité d'autoformation et les ressources individuelles d'auto-effcacité. Les résultats, après étude de 80 entretiens renforcent la perspective de l'apprenant devenu particulièrement capable de diriger ses apprentissages, opportuniste dans la gestion des ressources et combinant au service de ses buts les apports des dispositifs formels et informels dans leurs formes les plus récentes.
Déclinaison pratique
Dans une étude de l'APEC de juin 2008 sur l'acquisition de compétences en entreprise, l'auto-formation est considérée comme une forme d'auto-apprentissage qui peut résulter de l'acquisition de connaissances formelles comme l'observation puis la reproduction mimétique de savoir-faire et savoir-être sur le terrain.
Parmi les caractéristiques qui ressortent d'un échantillon d'apprenants qui ont été enquêtés, il ressort que l'auto-formation est :
un apprentissage qui se fait « naturellement »
liée à la personnalité de l'apprenant, à son état d'esprit
dépendant d'une démarche active souvent informelle et peu structurée.
Tiers, relations professionnelles comme extra-professionnelles, tout contact peut servir à l'« auto-apprenant ».
Sociologie
L'autodidaxie est souvent présentée ou imaginée comme une alternative, voire un acte de rébellion contre un système éducatif dominant, ou encore comme une nécessité dans des situations de handicap physique, géographique, financiers, etc. Dans ces trois cas, la manière autre d'apprendre et d'être accompagné dans cet apprentissage échappe aux catégories habituelles de l'entendement. D'où l'attribution du processus et du mérite d'apprendre au seul apprenant.
Il est parfois considéré comme à part ne faisant pas partie d'un réseau, de par l'absence de « légitimité » de sa formation. Cela dit, avec des systèmes comme celui de la Validation des Acquis de l'Expérience,(VAE) les autodidactes ont aujourd'hui la possibilité de donner une valeur à ce qu'il ont appris par eux-mêmes en le valorisant par un diplôme, sous certaines conditions.
Il apparaît par exemple chez Jean-Jacques Rousseau ou encore dans Dom Juan ou le Festin de pierre de Molière, acte 3 scène 1, lorsque Sganarelle discourt avec Don Juan. Il apparaît également dans les textes de vulgarisation scientifique (essais, vade-mecum) qui font l'objet d'une réappropriation sociale de la part des classes moyennes en quête d’ascension sociale, Pierre Bourdieu appelant ce phénomène l'« autodidaxie légitime ».
Dans Les Nouveaux Autodidactes, Georges Le Meur signale que dans la vie quotidienne, « l'autodidacte représente souvent la réussite socio-professionnelle d'une personne qui ne devait « normalement » pas s'élever dans la hiérarchie sociale ». Toutefois, si les souhaits d'ascension sociale constituent un moteur important pour se former, il montre aussi que l'on peut apprendre de manière indépendante et sans souci de promotion. Il met en évidence des démarches de formation existentielles et/ou cognitives que le sujet pilote intégralement pour le plaisir. Il rappelle qu'autrefois le métier de base s'apprenait avec un maître et qu'à la manufacture l'autodidacte n'avait pas sa place. Les autodidactes « emblématiques » qui appartenaient à la classe dominée étudiaient dans les domaines généraux, non professionnels, et manifestaient un respect fort à l'égard de l'institution éducative. Ils s'appropriaient par des voies non scolaires le capital culturel qui leur faisait défaut.
Mais avec la massification de la formation initiale et le développement de la formation continue tout au long de la vie, la démarche d'autonomie de l'apprenant, l'auto-formation et l'autodidaxie sont devenues des exigences de l'économie. Cette dépendance de l'auto-formation aux exigences de l'économie a été interprétée par quelques sociologues critiques comme une conduite de soumission aux rapports sociaux dominants et non pas comme une démarche d'affranchissement ou encore d'émancipation individuelle. Dans cette perspective, Jacques Guigou montre comment cette "autonomisation des apprentissages" constitue une composante majeure de ce qu'il nomme "la société capitalisée" et prive l'auto-formation des dimensions libératrices que veulent y voir ses promoteurs.
Courants d'auto-formations
Il existe 5 principaux courants de l’autoformation :
Autoformation intégrale
L’autoformation intégrale est synonyme d’autodidaxie. Il s’agit pour l’apprenant d’apprendre en dehors de tout système institutionnel de formation. Une des formes de l’autoformation intégrale, c’est la formation basée sur sa propre expérience. Ainsi, une personne qui a suivi une formation pour un CAP mécanique-automobile ne peut prétendre être autodidacte dans son métier puisqu’elle a été formée.
Autoformation existentielle
Elle fait référence à l’histoire de vie, l’autobiographie. À la différence de l’autodidacte qui apprend dans un rapport d’utilité extérieure (apprendre un métier, un savoir-faire…), l’autoformation existentielle vise à user de sa propre expérience pour son développement personnel. Elle dépasse donc du cadre de la formation professionnelle et nous sommes ici au niveau de l’éducation permanente.
Autoformation éducative
Il s’agit d’apprendre au sein d’un dispositif de formation, Formation Ouverte et A Distance (FOAD), Atelier de Pédagogie Personnalisée (APP)… tout en développant son autonomie. L’enseignant-formateur n’intervient alors qu’à titre ponctuel comme un guide, facilitateur dans l’accession au savoir. Plusieurs termes existent pour qualifier ce genre d’autoformation : l'autoformation assistée (Bertrand Schwartz), l'autoformation tutorée (Philippe Carré).
Autoformation sociale
Il s’agit d’apprendre par le biais des réseaux sociaux constitués (ex : les cercles d’études) en dehors des systèmes de formation formalisés. Chaque personne est libre d’adhérer ou non. L’autoformation est réalisée grâce au caractère collectif des échanges et des interactions sociales.
Autoformation cognitive
Il s’agit du rapport à la métacognition « apprendre à apprendre ». L’intérêt est porté sur comment la personne réalise son propre apprentissage. C’est une sorte de méthodologie de l’apprentissage individuel.