La perte du pucelage, un tableau de Paul Gauguin (1891), représente « une vierge saisie au cœur par le démon de la lubricité » .
La virginité est l'état d'une personne pubère, ou adulte, qui n'a jamais eu de relations sexuelles.
Représentations culturelles
La virginité revêt généralement une très grande importance dans des religions, entre autres le catholicisme, où la virginité perpétuelle de Marie, la mère de Jésus de Nazareth, fait partie du dogme. Au cours de l'histoire humaine, surtout avant l'apparition des grandes religions - mais encore aujourd'hui dans les sociétés dites « primitives » comme chez les Incaset autres cultures amérindiennes, la virginité constituait généralement un signe d'impopularité : elle y était consacrée à une divinité et la jeune fille devait la perdre avant le mariage. À l'inverse, dans les cultures patriarcales actuelles, surtout celles où la religion dominante associe le sexe hors mariage au péché, la virginité revêt une connotation très positive : elle est associée à la propreté et la pureté. Dans ces cultures, la virginité est ainsi rattachée à la notion d'honneur : la non-virginité de la femme avant le mariage y est considérée comme un déshonneur pour la famille. Dans le Livre des bons usages en matière de mariage, extrait d’Ihya' `Ulum al-Din (Revivification des sciences de la foi) d'Al-Ghazâlî, ouvrage dont l'importance ne le cède guère qu'au Coran, le théologien musulman explique pourquoi l'homme doit choisir pour femme une vierge, sans souci de réciprocité alors que le Coran recommande que les deux époux soient vierges. Ce qui explique que l'acte sexuel hors mariage de la femme tombe sous le coup des péchés que l'islam prohibe sous le nom de zina (en), crime de fornication.
Dans les sociétés occidentales, ce type de considération tend à disparaître avec le changement des mœurs, telles que la libération de la femme et la libéralisation de la sexualité. L'idée de virginité avant le mariage revient cependant dans certains pays ayant une base culturelle ou religieuse, comme certains pays d'Afrique.
En Occident, lors de la cérémonie du mariage, les mariées portent une robe blanche et un voile blanc, considérés comme un symbole de virginité. Néanmoins, le port du blanc est un phénomène récent, les mariées portant auparavant une robe à leur goût et non spécifiquement blanche (par exemple, les femmes modestes n'avaient qu'une seule « robe du dimanche », souvent noire, qu'elles ne portaient que pour les fêtes). Porter du blanc n'est devenu une mode, puis une tradition, qu'au cours du XIX siècle. La fleur d'oranger, donnée comme symbole de virginité, est utilisée dès 1860 dans la confection de couronnes et de bouquets de mariée ainsi que pour le « bouquet de virginité » du mari porté au revers de son costume. La licorne est également un symbole de virginité physique. Dans l'iconographie chrétienne, elle représente la Vierge fécondée par l'Esprit Saint. Dans les conceptions médiévales de l'amour courtois, la licorne est douée du mystérieux pouvoir de déceler l'impur.
Une fois la virginité collectivement chargée de telle ou telle valeur, celle-ci est déplacée sur la personne vierge à l'occasion de certains usages ou relations. Ainsi, le droit de disposer de la virginité d'une femme peut avoir un prix et donc être monnayée comme un bien. Considéré comme la norme jusqu'au mariage, un prétendu test de virginité (en) consistant en fait en une intrusion arbitraire profondément humiliante, souvent proche d'un viol, peut être réalisé pour intimider par l'exemple la population féminine d'un pays ou punir certaines femmes soupçonnées de comportement estimé non conforme aux mœurs. Par exemple, chez les geishas, la vente de ce premier accès est nommé le mizuage. Le légendaire droit de cuissage, droit du seigneur local à prendre la femme d'un de ses sujets la première nuit suivant leur mariage, aurait pu être abandonné contre une somme d'argent. De telles pratiques sont des souvenirs lointains dans les pays ayant connu la révolution sexuelle. Pourtant, en 2008, l'animateur de radio américain Howard Stern a lancé une annonce d'étudiante sous pseudonyme annonçant qu'elle mettait aux enchères pour financer ses études le droit de lui prendre sa virginité, précisant qu'elle était prête à subir un examen gynécologique pour prouver qu'elle était bien vierge, bien qu'ayant déjà pratiqué des préliminaires. Dans certains pays, jusqu'au milieu du XX siècle, si un homme n'épousait pas une femme dont il avait pris la virginité, la femme était autorisée à le poursuivre en justice et à réclamer dommages-intérêts, pratique du Kranzgeld.
La progression des connaissances en génétique est sans doute aussi une des causes de la diminution de l'importance de la virginité : au début du XX siècle, la théorie de l'imprégnation, ou « télégonie », selon laquelle la première expérience sexuelle pouvait avoir un effet sur la descendance, était encore très répandue. L'écrivain Victor Margueritte en fait mention dans son roman La Garçonne.
Aspects anatomiques
La virginité, chez la femme, est traditionnellement associée à la présence de l'hymen, membrane qui obture de façon incomplète l'entrée du vagin et se rompt lors des premiers rapports sexuels ou indirectement lorsqu'elle est soumise à des efforts mécaniques suffisants, par exemple lors d'activités physiques. L'absence d'un hymen n'est donc pas nécessairement due à une pénétration vaginale. Après déchirure, cette membrane cicatrise en laissant à sa place les « caroncules hyménéaux ». Leur absence est utilisée, dans certaines cultures ou religions, comme critère dans des « examens de virginité » dont le but est de prouver qu'une jeune fille est encore vierge (n'a jamais été pénétrée vaginalement).
La défloration (dite aussi dépucelage), première pénétration vaginale, a été considérée à travers les temps et les cultures comme un événement important et on l'identifie souvent avec l'entrée de la femme déflorée dans la vie conjugale ou au moins comme la fin de son enfance. La rupture de l'hymen peut provoquer certaines pertes sanguines ; dans certaines cultures, on peut exposer le drap taché de sang après la nuit de noces afin de prouver que la femme est arrivée vierge au mariage et que le premier rapport sexuel vient d'avoir lieu. Cependant, ces procédés sont douteux physiologiquement : certaines femmes vierges n'ont quasiment pas d'hymen. D'autres doivent recourir à la chirurgie pour ouvrir un hymen trop résistant (scléreux). À l'opposé, certains hymens particulièrement souples (hymens « complaisants ») se laissent distendre sans se rompre lors du rapport sexuel. Enfin, certaines femmes naissent sans hymen. C'est donc un élément peu fiable de la virginité.
De plus, l'hymen peut se déchirer lors d'une activité physique ou lors de la croissance de l'enfance sans que la femme s'en aperçoive. D'autre part, même si un tampon hygiénique peut être normalement inséré et rester dans le vagin sans que l'hymen ne se déchire, cela peut néanmoins arriver accidentellement. Dans certaines cultures, la défloration était considérée comme dangereuse pour l'homme. Pour cette raison c'était souvent la femme elle-même qui s'en chargeait à l'aide d'un instrument de défloration, ou on confiait ce soin à un homme âgé, souvent le chef de tribu.
Modalités d'objectivation
Le thème de la virginité a retenu l'attention des premiers chirurgiens. En 1598, Séverin Pineau fait paraître quelques années après la mort d'Ambroise Paré un livre sur la virginité et la défloration. Il affirme qu'une femme est vierge lorsque son cou peut être embrassé par un fil qui s'étendrait de la pointe du nez à la réunion des sutures sagittale et lambdoïde (en arrière du crâne).
Les filles, contrairement aux garçons, ont une membrane, l'hymen, qui indique généralement (les multiples cas de non-fiabilité sont évoqués plus bas) physiquement si elles ont déjà eu un rapport sexuel. Pour la plupart, l'utilisation d'un tel test est jugé discriminatoire puisque n'existant que pour un seul sexe. Alors que pour certains, le fait de ne pouvoir appliquer un même test ou un même traitement médical aux deux sexes n'est pas discriminatoire, lorsque la différence est le fait de la nature (et non de la volonté de l'homme). Certains utilisent la présence de l'hymen comme définition de la virginité, allant jusqu'à appeler vierge une fille dont l'hymen a été reconstitué chirurgicalement alors qu'il avait été rompu par un rapport sexuel. Si l'on définit la virginité comme l'absence de rapports sexuels, la présence de l'hymen n'est qu'une propriété qui coïncide souvent, pas une définition alternative possible.
Cette pratique d'authentification de la virginité se heurte à des questions d'ordre éthique, mais aussi à un problème médical. En effet, toutes les études confirment l'extrême difficulté de certifier l'absence ou la présence d'une sexualité prénuptiale, même en cas de rupture évidente de l'hymen. Une importante proportion de cliniciens ne sont pas en mesure de décider si une déchirure partielle de l'hymen est corrélée avec une activité sexuelle ou pas. Les études montrent que l'altération la plus fréquente de l'hymen après une pénétration vaginale est une rupture partielle du bord libre, alors qu'une rupture totale est exceptionnelle. Le premier rapport sexuel n'entraîne pas, de façon systématique, la rupture et le saignement de l'hymen.
Conception du rapport sexuel
Même en supposant pour l'hymen une fiabilité absolue, ce critère n'est pas forcément déterminant pour les filles. Par exemple la présence de l'hymen comme critère de virginité amène à considérer comme vierge une fille ayant eu des rapports avec sodomie mais dont l'hymen est intact, alors qu'une autre n'ayant eu de rapport sexuel avec aucun individu mais pratiquant la masturbation serait dite non vierge si elle a ainsi rompu son hymen. On peut définir une personne vierge comme une personne n'ayant jamais eu de rapport sexuel. Cette définition présente de plus l'avantage de s'appliquer aux deux sexes, mais n'est plus vérifiable physiquement. Au contraire, l'utilisation de l'hymen comme critère a été dénoncé comme discriminant pour les femmes, seules à pouvoir subir un examen de virginité.
Toutefois, on a montré que les définitions du rapport sexuel peuvent être assez variées pour que de nombreux actes soient tantôt inclus, tantôt exclus. Un sondage chez les adolescents américains montre que 2 % s'estiment non vierge après un baiser profond, 15 % s'ils touchent les parties génitales d'autrui ou inversement, 40 % s'ils sont impliqués dans un acte de sexe oral, 99,5 % après un coït (les questions sont de type oui/non, ceux qui indiquent le baiser comme perte de virginité peuvent aussi indiquer les autres). Dans l'article présentant ce sondage, USA Today titrait que les adolescents avaient assimilé la « virginité technique ». Cette notion est en effet la définition la plus restreinte de la perte de virginité : la pénétration d'un pénis dans une vulve. Cette notion avait été popularisée par la présentatrice américaine Melanie Martinez, dans des vidéos qui se trouvaient sur le site TechnicalVirgin.com. Ces vidéos parodiaient les publicités puritaines encourageant les jeunes à l'abstinence avant le mariage. Dans J'ai un avenir, Martinez expliquait qu'à l'âge des études, une fille devait prendre ses précautions pour éviter de gâcher ses chances en se retrouvant enceinte, et concluait en disant qu'elle s'en tenait au sexe anal. Dans Les garçons peuvent attendre, sa mère la dissuade de s'offrir à un garçon qui ne serait finalement pas le bon, et finalement lui offre un jouet sexuel pour qu'elle n'ait pas envie de rapports sexuels. Le nom de domaine indique qu'une fille qui adopterait ces pratiques serait « techniquement » encore vierge.
À l'opposé, les chrétiens les plus conservateurs défendent une idée de pureté selon laquelle il est important de rester vierge avant le mariage, avec une définition très rigoureuse de la virginité : même les simples baisers sont découragés, considérés comme une étape menant à des activités plus explicitement sexuelles.
Conception de la sexualité
On peut ainsi défendre une idée de la virginité sur des critères non physiques, mais moraux. La chanteuse Britney Spears clamait publiquement sa volonté de rester vierge avant le mariage. Des médias d'information aux jeunes répliquèrent qu'il est douteux qu'on puisse se dire vierge sous prétexte qu'on n'a pas eu de relations sexuelles quand on se donne en spectacle public avec des vêtements d'une esthétique érotique.
Réciproquement Saint Augustin précisa que le consentement est nécessaire pour perdre la virginité, autrement dit un viol ne retire pas la virginité. On peut ainsi définir la virginité comme résultant, non d'un contact physique, mais d'un choix. Cela amène à considérer qu'on ne perd sa virginité qu'à l'issue d'un rapport sexuel avec pleine prise de conscience de l'acte.
Vérification de la virginité
Comme précédemment expliqué, la virginité ne peut être prouvée à proprement parler. C'est la présence de l'hymen qui est vérifiée. Historiquement, Jeanne d'Arc a subi deux examens de virginité, et dans les deux cas a été déclarée vierge.
Dans l'époque moderne, certaines filles ont recours à un médecin, gynécologue ou généraliste, pour obtenir un certificat de virginité avant leur mariage, pour des raisons culturelles. Après un examen, le praticien délivre un certificat à la fille attestant qu'elle est supposée être vierge. En France, le conseil de l'Ordre des médecins s'oppose à ce qu'un tel certificat soit délivré pour des raisons de pressions familiales. Le collège des gynécologues reprend les mêmes conseils, et rappelle que le médecin qui délivrerait un certificat de virginité dans l'intérêt de la femme le demandant mais sans avoir pratiqué d'examen ou alors que l'examen a conclu dans le sens contraire, commet un faux susceptible de poursuites. En revanche, ce certificat peut être délivré à une femme souhaitant faire constater sa virginité afin d'obtenir une annulation de mariage au motif de l'impuissance de son mari. Un examen peut aussi être pratiqué dans le cas d'une femme souhaitant faire constater qu'elle a subi des violences sexuelles, mais dans ce cas il s'agit plutôt de constater un rapport sexuel récent.
L'examen se fait généralement par observation directe de l'entrée du vagin. Le médecin donne en outre une petite description du type d'hymen observé (élastique, fin ou très fin, souple, etc.).
Palliatifs à la perte
Chirurgie de reconstruction
D'autre part certaines pratiques ou opérations chirurgicales peuvent être utilisées afin de reconstruire l'hymen ou donner l'impression qu'il est intact, telle l'hyménoplastie. En Allemagne comme en France, plusieurs hymenkliniken sont spécialisées dans l'intervention chirurgicale de reconstruction d'hymen.
Deux types d'intervention chirurgicale existent. L'une consiste à recoudre un à deux jours avant le mariage la membrane déchirée de l'hymen avec un fil très fin. L'autre peut être effectuée jusqu’à deux semaines avant les noces et est réalisée avec des fils à résorption lente. Chacune de ces opérations est rapide et bénigne, et ne nécessite qu'une petite anesthésie locale.
Hymen artificiel
L'hymen artificiel de virginité (AVH pour Artificial Virginity Hymen) a pour but de simuler la perte de sang suivant parfois un premier rapport. Il consiste en une petite poche artificielle translucide contenant un liquide rouge composé d'albumine naturelle, que la femme place dans son vagin environ vingt minutes avant le rapport sexuel. Sous l'effet de la chaleur corporelle, la membrane se dilate, ce qui recrée une sensation de défloration lors de la pénétration. Le liquide rouge se répand et tache les draps de quelques gouttes, simulant ainsi la rupture de l’hymen.