Congo belge Belgisch Kongo 1908 – 1960 Drapeau Devise : « Travail et progrès » Hymne : La Brabançonne Informations générales Statut Colonie Capitale Léopoldville (actuelle Kinshasa) Langue Français (officielle) Néerlandais et plus de 200 langues africaines. Religion christianisme Monnaie Franc congolais Démographie Population 1930 13 500 000 Superficie Superficie 2 345 000 km Histoire et événements 15 novembre 1908 Création 30 juin 1960 Indépendance Roi des Belges 1908 - 1909 Léopold II 1909 - 1934 Albert I 1934 - 1951 Léopold III 1951 - 1960 Baudouin I Gouvernant 1908 - 1910 Baron de Wahis 1946 - 1951 Eugène Jungers 1958 - 1960 Henri Cornelis Entités précédentes : État indépendant du Congo Entités suivantes : République du Congo-Léopoldville
Congo belge était le nom porté par le territoire de l’actuelle République démocratique du Congo (RDC) entre le 15 novembre 1908 de l’État indépendant du Congo, possession personnelle pendant vingt-quatre ans du roi Léopold II des Belges et l’accession à l’indépendance congolaise effective le 30 juin 1960. Pendant la période coloniale, le Congo belge fut géré de Bruxelles, mais avec son armée, la Force publique sous l'autorité d'un gouverneur général.
Années 1885-1950
En 1908, la Chambre des députés accepta le testament de Léopold II qui faisait don à la Belgique de l'État indépendant du Congo et vota son annexion un an avant la mort du roi. Dès lors, c'est officiellement au nom de la Belgique, État souverain, que les troupes stationnées au Congo belge purent garantir l'intégrité de la conquête. Cette annexion reconnue par les grandes puissances, l’administration de l'ex-État Indépendant se transforma en administration belge qui fit tout pour effacer l'image de Léopold II comme ayant été un tyran laissant exploiter les populations par ses hommes (pas seulement des Belges, on compte plus de dix nationalités parmi les « coloniaux » de l'époque). Lors de la reprise par la Belgique, l’article 2 de la Charte Coloniale du 18 octobre 1908, votée par le parlement belge, prescrivait que : « Nul ne peut être contraint de travailler pour le compte et au profit de sociétés ou de particuliers ». Pour effacer l’image du caoutchouc et des mains coupées complaisamment répandue par la Grande-Bretagne qui ne se consolait pas d'avoir manqué l'occasion de coloniser le Congo, on développa la culture du coton et du palmier à huile et la cueillette du caoutchouc sauvage fut remplacée par la culture de plantations d’hévéas. La Congo Reform Association, l'association britannique qui était à l’origine de la campagne orchestrée contre l’État indépendant du Congo, décida de se dissoudre en 1913, tandis que le Congo allait développer son économie et ses exportations, allant jusqu'à livrer 23 000 tonnes de coton en 1932 et 127 000 en 1939. Parallèlement, les exploitations de minerais tels que l'or, l'étain, le cuivre et, surtout, l'uranium allaient contribuer à faire du Congo une puissance économique, ce qui allait contribuer au salut de la Belgique pendant les deux guerres mondiales;
La colonie est alors gérée par trois pouvoirs qui s'équilibrent : l'administration, les missions catholiques et les grandes sociétés privées.
La langue française fut, du début à la fin de la présence belge au Congo, la seule langue officielle, ce qui fit du Congo devenu indépendant un des pays officiellement francophones les plus importants, le deuxième, en chiffre de population, après la France.
Enseignement
Au début, l’enseignement est mis en place par des missions chrétiennes privées qui financent leurs activités par l'agriculture ou la sylviculture d'exportation (Concordat avec le Vatican en 1906). Par exemple, en 1948, environ 99,6 % des structures d’enseignement sont contrôlées par les missions chrétiennes, 0,4 % sont détenues par des entreprises privées pour former leurs futurs employés. En 1940, le taux de scolarisation des enfants de 6 à 14 ans était de 12 % et en 1954 de 37 %, ce qui plaçait le Congo à l’époque aux côtés de l'Italie. Ces statistiques cachent néanmoins un important gâchis scolaire : sur douze élèves à l’école primaire, un seul achevait le cycle et des titulaires du certificat primaire seul un sur six accèdait à l’école secondaire. Les missionnaires n’étaient évidemment ni pédagogues ni diplômés en lettre ou en science, mais diplômés en théologie : leur objectif était plutôt de former des catéchumènes. Les missions étaient tenues par une majorité de missionnaires catholiques, les plus nombreux étant les flamands. Ceux-ci étaient tenus à une connaissance relative du français. Depuis les débuts de la colonisation jusqu'à la fin de celle-ci, le français fut, en effet, la langue imposée au Congo belge. On trouve également des missionnaires américains ou scandinaves dont le français n'était pas la langue maternelle et qui représentaient les tentatives de diverses églises protestantes de se faire une place en Afrique.
L’enseignement secondaire destiné aux Congolais était presque uniquement axé sur les études professionnelles ou techniques ; ce n’est qu'à partir de 1955 qu'on commença à développer les écoles secondaires (une comparaison peut se faire avec le Cameroun : en 1952, sous le mandat français, il y avait déjà 8 000 élèves dans les écoles secondaires). Lors de l'indépendance, le Congo disposait cependant de deux universités comptant 466 étudiants blancs et noirs : l'Université Lovanium, fondée en 1954, et l'Université d'Elisabethville créée en 1959. Mais, en dehors de ces universités, la ségrégation raciale de fait séparait les enfants blancs et noirs qui fréquentaient des établissements scolaires distincts, situation qui changea avec le développement des écoles secondaires, Athénées et Collèges. Dans de nombreuses écoles, le fait de parler une langue congolaise était proscrit au niveau secondaire au profit du français, de même que la pratique de l'islam. Par contre, au niveau primaire, le Congo belge fut l’une des seules colonies d’Afrique où les langues locales (kikongo, lingala, tshiluba et swahili) furent enseignées, et ceci grâce aux missionnaires. Qui plus est, les langues congolaises pouvaient être utilisées dans la musique populaire, ce qui a permis à l’industrie musicale congolaise de démarrer à cette époque. Les missions remplaçaient l'éducation tribale traditionnelle qui n'avait rien de scolaire.
Infrastructures et administration
Les infrastructures sanitaires ont été mises en place par les entreprises pour leur personnel. Les chemins de fer étaient aussi aux mains d’entrepreneurs privés.
Le contrôle de l’administration était dominé par la Belgique, sans organe démocratique pour les habitants. Le chef de l’État restait en toutes circonstances le roi des Belges, mais la gestion journalière était dévolue au Gouverneur général qui régnait sur neuf provinces qui avaient chacune à leur tête un gouverneur. Le système était celui d'administrateurs coloniaux contrôlés par le Parlement belge. Si les noirs n'avaient pas le droit politique de s'occuper de leur pays, il en était de même des colons et administrateurs blancs qui n'avaient pas le droit de vote.
Porteurs de l'expédition scientifique Lang-Chapin.
Diverses autres restrictions affectaient les Congolais. Dans les villes construites par les colonisateurs, les populations noires étaient refoulées dans les banlieues, souvent organisées en « cités indigènes », tandis que les centres-villes étaient réservés aux seuls Blancs. Les Noirs n’avaient pas le droit de quitter la cité indigène de 21 heures à 4 heures du matin. Ils ne servaient, en fait, que comme main d’œuvre au colon ou à l’administration coloniale (serviteur, artisans, mineurs, caissiers, mécaniciens, etc.). Les supermarchés, tous situés aux centres villes, étaient interdits d’accès aux noirs, on leur avait réservé une fenêtre par laquelle ils pouvaient faire leurs achats. La coexistence entre Blancs et Noirs était tempérée par la tolérance accordée aux prêtres catholiques noirs représentant un véritable clergé local.
Des expéditions scientifiques nouvelles sont créées notamment sous la direction de Herbert Lang et de James Paul Chapin.
Première Guerre mondiale
Soldats belges et congolais en campagne dans l'est africain, en 1916.
La Première Guerre mondiale fut lourde de sens pour le Congo belge, car la Belgique était occupée presque entièrement, sauf une portion de territoire derrière l'Yser où l'armée belge était parvenue à se maintenir, alliée aux armées française et anglaise. Le gouvernement belge replié en France entendait maintenir la souveraineté de la Belgique au Congo. Le Congo belge mena donc une campagne militaire contre les colonies allemandes au Cameroun, en appui des troupes françaises, et en Afrique orientale allemande, d'abord sans lien avec les forces anglaises puis en application d'un plan anglo-belge, campagne qui fut couronnée de succès, notamment par d'éclatantes victoires belges à Tabora et à Mahenge.
Le 15 août 1914, les troupes allemandes basées au Ruanda-Urundi bombardèrent les villes riveraines du lac Tanganyika. Le 22 août, un navire allemand ouvrait le feu sur le port d’Albertville. Devant cette agression, le ministre belge des Colonies Renkin adressa un télégramme au Gouverneur Général du Congo et au Vice-gouverneur de Katanga ordonnant de « prendre des mesures militaires pour défendre le territoire belge… prendre des mesures seul ou en coopération avec les troupes alliées ». Les Belgo-congolais répliquèrent le 18 avril 1916. Les troupes étaient dirigées principalement par le général Tombeur, le colonel Molitor et le colonel Olsen (d'origine danoise). Elles s’emparèrent de Kigali le 6 mai 1916. Les forces allemandes du Burundi commandées par le capitaine Von Languenn opposèrent une vigoureuse résistance mais ne purent tenir devant la supériorité numérique belge. Le 6 juin, Usumbura tomba sous les forces belgo-congolaises commandées par le Colonel Thomas. Kitega fut prise le 17 juin, tandis que le Rwanda et le Burundi étaient déjà occupés. Il restait alors les campagnes du Tanganyika (actuelle Tanzanie) ; la brigade Molitor s’empara ainsi de Biharamuro, puis de Mwanza. Le colonel Moulaert occupa Karema. La marche sur Tabora commença alors en trois colonnes. Le 29 juillet, Kigoma et Ujiji furent occupés. Après plusieurs jours de combat acharné, Tabora tomba le 19 septembre 1916. Les forces britanniques et belgo-congolaises se coalisèrent ensuite pour occuper tout le Tanganyika à partir duquel le Général allemand Von Lettow-Vorbeck opposa une résistance extraordinaire. Les Belges parvinrent cependant à remporter une nouvelle victoire à Mahenge sous le commandement du lieutenant-colonel Huyghé. Finalement, les Allemands se rendirent après l’armistice de novembre 1918. Durant ce conflit de quatre ans, les Belges avaient introduit un élément d'avant-garde (pour l'époque) en utiliant quelques hydravions sur le Lac Tanganyika pour bombarder des navires et des installations allemandes, mais tout en recourant à des moyens moins modernes par la mobilisation de 260 000 porteurs pour acheminer le matériel militaire. Cette campagne militaire a, selon plusieurs démographes, dépeuplé certaines tribus proches des frontières (morts au front, soldats affamés, porteurs épuisés, etc.). Après la guerre, la Belgique obtint, par les accords belgo-anglais Orts-Milner un mandat sur le Ruanda-Urundi conquis sur l'Allemagne, ainsi qu'une voie de chemin de fer entre Kigoma, à l'est du Congo belge et Dar-Es-Salam sur la côte de l'océan Indien sous un régime de franchise de douane étendu aussi aux communications routières et, plus tard, aux lignes aériennes (fret et passagers). C'est un succès pour la diplomatie du secrétaire général Pierre Orts qui réalise ainsi une vieille ambition de Léopold II, celle d'un lien économique congolais entre l'Atlantique et l'Océan Indien. Ce sont des résultats positifs. Mais la guerre a laissé d'autres traces : un missionnaire belge décrit alors la société noire comme une société dans laquelle « le père est allé au front, la mère a moulu le grain pour les soldats et les enfants ont apporté la nourriture au front ».
Kimbanguisme et Kakisme
Les deux mouvements syncrétistes, kimbanguisme et kakisme, sont parmi les premières formes de nationalisme qui naissent dans les années 1920 sous l'influence des missionnaires protestants américains (avec William Henry Sheppard et George Washington Williams pour précurseurs). À l'époque vit Paul Panda Farnana, ayant fait des études en Belgique à l'athénée d'Ixelles (Bruxelles).
Le fils du Chef coutumier Simon Kimbangu, de l'éthnie kongo, baptisé à l'âge de 15 ans, aurait eu, un jour après son baptême, une vision et prédit l'indépendance du Congo et la reconstitution du royaume Kongo. Il inventa le terme en kikongo dipanda, « indépendance ». Son influence fut accrue par la rumeur qui disait qu'il avait guéri des malades par imposition des mains. S'inspirant de la religion chrétienne, il prit douze apôtres. Les autorités coloniales le mirent en prison où il resta jusqu'à sa mort en 1951. Ses amis et sa famille répandirent son message qui eut beaucoup de succès auprès des Kongos.
Simon Pierre M'padi, de l'ethnie kwango et comprenant le kikongo, fonda la religion kakiste, se réclamant disciple de Simon Kimbangu Il mit au point un drapeau représentant sa secte sur lequel on pouvait lire en kikwango Minsion amerika nzila ya m'pulusu. Recherché par la force publique, il se réfugia au Congo français où il transmit son message à un certain André Matswa. Arrêté par les autorités françaises, il fut remis aux autorités belges.
La dépression des années 1930
Résidence du gouverneur-général à Boma, capitale du pays jusque 1929.
1 franc du Congo belge daté de 1920.
Le roi Albert I, Congo belge, 1928.
Avec le Congo, la Belgique obtient des matières premières peu chères. L’administration coloniale recrute des travailleurs forcés pour les plantations et pour les mines et impose même en 1926 la conscription générale. L’administration coloniale négociait avec les différents dignitaires congolais pour qu‘ils leur fournissent des hommes comme travailleurs (10 francs par tête). Les chefs politiques se débarrassaient en général des gens qu’ils n’aimaient pas dans leurs communautés. Les travailleurs étaient emmenés jusque dans les mines où ils travaillaient pour 10 à 15 francs par mois. Plus de 44 000 travailleurs furent « importés » d’Angola et de Rhodésie du Nord pour grossir les rangs. De nombreux travailleurs mouraient de fièvre à tiques, de grippe, de pneumonie, d’épuisement ou suite aux éboulements, à tel point que ce système, qui succédait aux exactions léopoldiennes et à la Première Guerre mondiale, risquait de dépeupler de nombreuses régions. Les autorités essaieront de résoudre la crise en imposant des restrictions aux recrutements forcés (par exemple, le décret de 1933 limita en effet à 60 jours la durée du travail forcé dans les plantations), et aussi particulièrement au Katanga en imposant dans les villes minières une force ouvrière permanente et stable, ce qui eut pour effet de transformer les villageois en citadins. Le krach boursier de 1929 à Wall Street fut le début d’un ralentissement économique mondial. La demande de matières premières des industries s’effondra et le prix des matières premières aussi : le prix de l’arachide passa de 1,25 franc à 25 centimes. L’économie congolaise, plus tournée vers l’exportation qu'aucun autre pays africain, fut d’autant plus vulnérable lors de cette crise que la Belgique est aussi un grand exportateur à cause de son petit marché intérieur. Au Katanga, l’emploi chuta de 70 % et de nombreux travailleurs forcés furent reconduits dans leurs villages. La dépression économique des années trente permit donc aux Congolais d’échapper au travail forcé.
Seconde Guerre mondiale
La Seconde Guerre mondiale commença en septembre 1939 pour la France et l'Angleterre et en mai 1940 pour la Belgique. Mais la résistance belge de 1914, finalement victorieuse après quatre ans de lutte sur le sol même de la Belgique ne se renouvela pas. L'armée belge fut vaincue en 18 jours par l'armée allemande et, le 28 mai 1940, le roi Léopold III accepta une reddition des troupes combattantes, sans implication aucune avec les forces du Congo belge. Et le roi fut fait prisonnier, perdant tout pouvoir, tant sur la Belgique que sur le Congo. Par contre, le gouvernement belge du premier ministre Hubert Pierlot et du ministre des affaires étrangères Paul-Henri Spaak réfugié en France dans l'espoir de continuer la lutte avec les quelques forces militaires belges disponibles en France et au Congo, restait dépositaire de l'autorité sur toutes les possessions belges ayant échappé aux Allemands. Or, faute de troupes militaires suffisantes, les Anglais pouvaient craindre de voir l'Italie fasciste, alliée de l'Allemagne, chercher à faire main basse sur le Congo belge en attaquant depuis l'Abyssinie. Mais la résolution des Belges d'Afrique de continuer la lutte se révéla vite à travers la décision du gouverneur général Pierre Rijckmans soutenu par les officiers d'Afrique. Cependant, une coordination avec Londres était nécessaire. Aussi, dès le début de juillet 1940, le ministre Albert de Vleeschauwer était arrivé à Londres, en passant par la France, l'Espagne et le Portugal, nanti des pleins pouvoirs, notamment sur le Congo. Reçu par Winston Churchill qui l'encouragea à faire venir ses collègues, il s'attacha à entrer en rapport avec le gouvernement belge resté en France et qui s'y trouvait réduit à deux unités, le premier ministre Hubert Pierlot et le ministre des affaires étrangères Paul-Henri Spaak. Ceux-ci, qui avaient cru pouvoir faire confiance à la France, avaient d'abord hésité devant le choix de rester dans ce pays ou de partir en Angleterre. Mais la défaite française et l'armistice franco-allemand qui s'en suivit les priva de la reconnaissance officielle du nouveau gouvernement français de Vichy et de sa protection diplomatique. Sans cette protection, les deux ministres, bloqués dans un village du midi de la France où les autorités françaises les avaient relégués, pouvaient craindre de tomber dans les mains des Allemands. Or, ils représentaient l'autorité légale de la Belgique libre, c'est-à-dire le pouvoir sur le Congo, indispensable aux yeux du gouvernement anglais, très légaliste, pour garantir le maintien dans le camp allié de l'Afrique belge avec ses richesses stratégiques, céréales, huiles et ressources minières nécessaires pour la fabrication des armements. Finalement, les deux ministres, parvenus à la frontière franco-espagnole, finirent par rejoindre Londres en octobre grâce à De Vleeschauwer. Celui-ci, venu à la frontière protégé par un passeport portugais, leur avait organisé une traversée clandestine de l'Espagne cachés dans une camionnette à double fond. Ainsi, le maintien du Congo belge dans la guerre était confirmé par l'installation à Londres d'un gouvernement belge restreint, doté du pouvoir de gérer le domaine colonial belge et de conclure tout traité économique et militaire avec l'Angleterre et les puissances, petites et grandes.
Les troupes de la Force Publique congolaise participèrent à la guerre contre l'Italie en attaquant en Abyssinie, y remportant plusieurs victoires couronnées par celle de Saïo et d'Asosa. Le Congo, passé dans la zone sterling, gardait sa monnaie, le franc congolais, tandis que, depuis 1940 et l'occupation allemande, la Belgique avait sombré dans la misère (chômage, déflation, pénurie). Le Congo fut dirigé pendant toute la guerre par l'administrateur de la colonie, le ministre Albert de Vleeschauwer, à qui le gouvernement belge réfugié à Londres avait donné les pouvoirs les plus larges, faisant de lui un véritable « proconsul ». C'est à de Vleeschauwer que la Belgique dut de pouvoir financer son action combattante (trois escadrilles belges dans la RAF, troupes contre l'Italie en Abyssinie, flotte marchande au service de la cause alliée, reconstitution en Angleterre d'une force armée destinée à participer à la reconquête du continent européen), tout en participant à l'effort économique des alliés par d'importantes fournitures qui rendirent la Belgique créditrice vis-à-vis des Anglais et des Américains, ce qui favorisa le redressement du pays après la guerre. Fort de ses pleins pouvoirs, De Vleeschauwer géra aussi, depuis Londres et pendant toute la guerre, les importantes finances des Luxembourgeois réfugiés avec leur grande-duchesse Charlotte, cela dans le cadre de l'Union monétaire belgo-luxembourgeoise de 1921, complétant ainsi l'effort au service des Alliés. Ainsi, grâce au Congo belge, dirigé sur place par le gouverneur général Ryckmans et son administration belgo-congolaise, le gouvernement belge d'Hubert Pierlot put affirmer la survie de la Belgique en mettant à la disposition des alliés des forces militaires ainsi que les ressources agricoles (le caoutchouc) et minérales de la Colonie (or, étain, cuivre, uranium).
Alors que la Force Publique du Congo avait effectué une campagne victorieuse contre les troupes italiennes d'Abyssinie qu'elle battit à Bortaï, Saio et Asosa, un mouvement de protestation se développa chez les soldats, les paysans et les « évolués », car l’effort de guerre des populations congolaises était lourd. L’administration coloniale recourait au travail obligatoire dans les plantations d’hévéas pour fournir du caoutchouc aux alliés. Quant aux soldats congolais et aux porteurs et camionneurs des services logistiques auxquels on avait inculqué un esprit « belge » qui justifiait pour eux la campagne d'Éthiopie comme une légitime défense contre l'armée italienne, il leur parut moins légitime de partir loin du Congo, d'abord en Égypte, puis en Birmanie contre le Japon.
Après-guerre
La Belgique, occupée par les Allemands, et le reste du monde occidental avaient, après la Seconde Guerre mondiale, perdu beaucoup de prestige aux yeux des congolais témoins des défaites de 1940. Et c'est, dès 1940, que les Bakongos avaient créé leur mouvement politique, l’ABAKO. En 1941, de graves troubles eurent lieu à Elizabethville. En 1944, eut lieu l'insurrection de l'ethnie kumu. L'adjudant Karamushi proclama même en février 1944 la fin du mbula matari (l’État colonial). En mars 1944, des révoltes eurent lieu à Masisi, des grèves et des émeutes les 25 et 26 novembre 1945 à Matadi. La même année d'importants quotidiens furent créés, comme la Voix du Congolais et la Croix du Congo (sous-titre: le Journal des « évolués » congolais). En 1944 à Luluabourg, des intellectuels avait en effet publié un manifeste pour la reconnaissance et des droits spécifiques pour les évolués (africains ayant terminé dix ans de scolarité). Apparurent alors deux mouvements, l'un violent des ouvriers, paysans et soldats et l'autre pacifique des intellectuels.
Le 2 septembre 1945, le Japon capitule, la Seconde Guerre mondiale est terminée, et les alliés ont gagné. L'Europe est dévastée et l'Europe occidentale se reconstruit grâce aux crédits américains. Cette situation renforce l'influence américaine en Europe et dans les colonies. La guerre froide commençant, les deux grandes puissances, les États-Unis et l'URSS essayent de rivaliser sur le plan international, en particulier en se déclarant toutes les deux opposées au colonialisme. En effet, la Charte des Nations unies, ratifiée par la Belgique, prévoit l'« autodétermination des peuples ». Malgré cette charte et la pression internationale, les puissances coloniales refusent dans l'immédiat de consentir à l'émancipation des peuples qu'ils dominent : les colonies sont pour elles sources de richesses (mines, gaz, pétrole, etc.).
En 1946 Joseph Kasa-Vubu de l'ABAKO fait un discours intitulé Le droit du premier occupant. Les « évolués » de Léopoldville sont autorisés à s'organiser en Confédération générale des syndicats indigènes. On estime à peu près à 5 609 le nombre d’« évolués ». Suivront l'abolition du fouet, pour le clergé, les gradés de la force publique et les auxiliaires de l'administration. Face à ces mouvements nationalistes, l'administration belge commence à comprendre qu'elle perd sa colonie. Ainsi, le professeur belge Antoine Van Bilsen publie, en 1955, un document intitulé Plan de trente ans pour l'émancipation politique pour l'Afrique belge.
L'agenda prônait une émancipation progressive du Congo sur une période de trente ans, une durée que Van Bilsen jugeait adéquate pour créer une élite intellectuelle qui puisse prendre la place des cadres belges. Le gouvernement belge et nombre d'« évolués » furent sceptiques par rapport à ce plan, les uns parce qu'il impliquait de perdre le Congo à terme, les autres parce que cette durée leur semblait trop longue. Un groupe d'« évolués » catholiques répondit positivement à ce plan dans un manifeste publié dans un journal congolais La Conscience africaine. Leurs seules divergences concernaient l'importance de la participation congolaise au cours de cette période de trente ans.
Années 1950-1960
Enseignement
Ce n'était pas de l'apartheid. La preuve en est les centaines d'étudiants noirs mêlés aux étudiants belges et autres européens dans l'enseignement secondaire officiel et dans les deux universités. Aucun article des lois et règlements régissant le Congo belge n'a jamais établi un apartheid, car le système fonctionnait plutôt comme système de fait soumis à des réglementations qui pouvaient varier. Ainsi, si, dans certains endroits, les Noirs pouvaient être l'objet de contrôles policiers qui allaient jusqu'à leur demander de justifier la provenance de l'argent qu'ils portaient sur eux, les choses pouvaient être différentes ailleurs en fonction de l'importance acquise par les noirs instruits, fonctionnaires, enseignants, etc. Il est vrai que l’administration pouvait désigner certains noirs pour les obliger à travailler 120 jours par an gratuitement pour elle. Dans ce cas, ils étaient logés, nourris et recevaient une assistance médicale. L’urbanisation du Congo belge était en fait forcée, puisque les autorités avaient déplacé certaines populations dans le cadre de l'aménagement du territoire. Dans la Force publique, les Noirs ne pouvaient dépasser le grade de sous-officier. Après la Seconde Guerre mondiale, plusieurs réformes démocratiques furent introduites, mais les rivalités ethniques entre Congolais n’en permirent pas une bonne application.
À la veille de l'indépendance, le bilan de l'administration belge avait fort évolué sur le plan économique, tandis qu'une évolution se faisait sentir dans le domaine des libertés, comme le révèle une recension faite par des Congolais eux-mêmes. D'après l'ouvrage consacré au Manifeste de Conscience Africaine, 1956, prémices de la future indépendance du Congo (éd. Facultés St-Louis, Bruxelles 2009), la situation se caractérise, d'abord, sur le plan religieux, par l'existence de 600 prêtres avec, à leur tête, un cardinal. Ils proviennent des petit et grand séminaires de Baudouinville et de Kabwé. Les écoles primaires pour les noirs sont, en effet, majoritairement confiées à l'Église par convention avec le pouvoir civil. Il y a aussi les établissements secondaires et professionnels et, en 1954, l'université catholique, Lovanium, seule sur le continent africain à posséder un réacteur de recherche nucléaire. Mais, concurremment, existent des établissements scolaires laïcs, écoles primaires et secondaires avec, en 1956, l'université officielle d'Élisabethville. L'enseignement professionnel se caractérise par des écoles d'infirmiers, des écoles d'assistants médicaux dont la formation fait d'eux des sortes de « médecins de brousse ». Mais le développement s'accélère dans les années 1950 et on recense plus 8 500 auxiliaires médicaux et agents sanitaires africains à la veille de l'indépendance. Il y a 6 000 centres médicaux et 86 000 lits. Parallèlement, sont apparus des boursiers dont le niveau d'études est le même que celui des européens puisqu'ils vont faire leurs études en Belgique. En plus, on compte 763 étudiants congolais dans diverses disciplines dans les universités du Congo, cela d'après l'ouvrage de Liliane Kissimba Et Dieu créa le Congo (éd. Bernard Gilson, 2009) dont les autres étudiants sont principalement belges. À la veille de l'indépendance, on recensait 25 000 établissements scolaires et 1 682 129 enfants dans l'enseignement primaire et 59 389 dans l'enseignement secondaire. On recensait 300 bibliothèques publiques en sus des bibliothèques installées par les missionnaires. Il existe une vingtaine de milliers d'adultes que l'on nomme « les évolués » dont le statut social se rapproche de celui des européens. Ils résident, en effet, en dehors des cités indigènes. On les trouve dans l'administration, mais aussi dans une classe moyenne à l'européenne constituées principalement de commerçants. Il existe aussi une presse spécifiquement africaine et c'est sous l'influence des mouvements d'émancipation dans les colonies françaises qu'est publié, en 1956, le manifeste Conscience africaine, premier témoignage d'affirmation d'une élite responsable parmi les congolais.
D'autre part, sur le plan matériel, l'ouvrage de Liliane Kissimba Et Dieu créa le Congo (éd. Bernard Gilson) recense le bilan exceptionnel de la colonisation, sur le plan du niveau de vie, qui se traduit, à la veille de l'indépendance, par un revenu de 90 dollars, valeur 1960, par habitants africain, le plus élevé d'Afrique, plus élevé même que celui de beaucoup d'autres pays dans le monde. Et l'accroissement du PIB est de 4,8 % par an. Enfin, il faut citer le développement des aménagements de génie civil. Outre trois grands barrages hydro-électriques, il y a un réseau ferroviaire de 5 241 km dont plusieurs centaines sont électrifiés, 14 597 km de voies navigables entretenues, 3 aéroports internationaux et plusieurs dizaines d'aéroports secondaires.
Le Congo belge fut l’un des premiers et des principaux exportateurs d’uranium pour les États-Unis au cours de la Seconde Guerre mondiale et de la Guerre froide (mine de Shinkolobwe).
Les années 1950, démographie et économie
Dès la fin de la Deuxième Guerre mondiale, l'Europe de l'Ouest se reconstruit grâce au plan Marshall : le Congo doit fournir des matières premières pour la reconstruction et après cela pour la guerre de Corée. De 1950 à 1958, l'indice du salaire du travailleur congolais passe de 100 à 237 pour une augmentation du coût de la vie de 20 %. Dans le même temps, le colon blanc est plus prospère que les habitants de métropole. À titre d'exemple, il importe des voitures et des réfrigérateurs directement des États-Unis. Avec la fin de la guerre mondiale se produit un fort accroissement démographique : la population augmente alors de 2 % par an. La population congolaise, beaucoup plus occidentalisée que quarante ans auparavant, accepte le papier-monnaie et abandonne les croisettes ou le troc. De plus, un nombre grandissant « d'indigènes » se ruent vers les villes pour y trouver le travail qui leur permettra d'acquérir un mode de vie qui, croient-ils, leur permettra d'égaler les « blancs ».
Nombreux sont alors à Stanleyville, Elisabethville, Jadotville et surtout Léopoldville les hommes venus de province pour chercher du travail et qui, s'ils en trouvent, renvoient une grosse partie du salaire à leur famille restée au village.
La croissance démographique commence à dépasser la croissance du PIB et le chômage s’installe dans les cités indigènes, les quartiers noirs des villes. Les bidonvilles apparaissent. Le Congo se « tiers-mondise », ce que n'avait pas prévu le paternalisme belge dans sa « sagesse ». La Belgique est bien obligée de mettre en place un système d'allocations de chômage, les Fonds du roi. À la suite de la guerre d'Indochine et à la création de l’union française en 1946, Antoine Van Bilsen publie, en 1955, son Plan de trente ans pour l'émancipation politique pour l'Afrique belge, qui prônait l'émancipation progressive du Congo sur une période de 30 ans (cf. supra). L'auteur dira en 1980 lors du 20 anniversaire de l’indépendance à la RTBF qu'il s'agissait en fait d'un appel à un plan. Le cardinal congolais Malula rédige alors le « Manifeste de conscience africaine » comme réponse à Van Bilsen et accepte l’indépendance prévue pour 1985. Mais le séminariste Kasa-Vubu rédige alors son propre manifeste, « le Manifeste de l’ABAKO » qui réclame l’indépendance immédiate. Face à ces événements, l’administration belge commence alors à préparer lentement sa colonie vers l’indépendance. En 1954, l’université Lovanium est créée et, à partir de 1955, on commence à construire des écoles secondaires laïques.
Évolution politique
En 1955, le roi Baudouin (« mwana kitoko », ou le « beau gosse ») accomplit un voyage au Congo pour apaiser le nationalisme congolais. Si les partis politiques sont autorisés dès 1956, ils sont souvent parrainés par des partis politiques belges, ainsi l’amicale socialiste d'Alphonse Nguvulu et l'amicale libérale de Patrice Lumumba. En 1956, Lumumba est ce que l'on appelle dans le langage des coloniaux un « évolué » et il représente un exemple apparemment réussi d'occidentalisation. Il écrit même un livre intitulé Le Congo, terre d'Avenir, est-il menacé ? Un seul éditeur belge, l'Office de Publicité (Bruxelles), accepta d'envisager sa publication, l'ouvrage n'étant pas hostile à la Belgique tout en faisant des propositions de réformes. Mais l'évolution de la situation au Congo dissuada l'auteur de parfaire son œuvre en obtenant une préface de la part d'une personnalité belge. Le livre fut finalement publié en 1961, n'ayant plus alors qu'un intérêt historique révélateur des occasions perdues par les Belges de s'assurer la sympathie d'une élite noire qui souhaitait des réformes profondes empreintes cependant d'un sens des responsabilités qui avait tout du réformisme. Mais l'administration coloniale n'entendait pas se laisser déborder et Lumumba renonça à une publication immédiate devant l'évolution rapide des événements dans son pays. En effet, pendant ce temps-là des partis communistes clandestins, toujours à bases ethniques et dotés de factions armées sont créés avec le soutien de l'Union soviétique. Patrice Lumumba se détache alors de l’amicale libérale pour se tourner vers des thèses plus socialistes et fonde le Mouvement national congolais. En 1957, les Congolais peuvent, pour la première fois, participer à des élections communales. Des bourgmestres et des conseils communaux noirs sont élus. Ils ont tous des conseillers belges.
ABAKO
L’association d’origine ethnique ABAKO (ou Association des Bakongo), dirigée par le futur président Joseph Kasa-Vubu, décida de prendre ses distances avec le plan Van Bilsen. En partie parce que nombre d’« évolués » catholiques qui signèrent le manifeste de la Conscience africaine ne faisaient pas partie de l'ethnie Kongo où l’ABAKO gagnait ses partisans, mais aussi parce que l’ABAKO prônait des idées plus radicales, sans accession progressive à l’indépendance. L’ABAKO demandait au contraire l’accession immédiate à l’indépendance. L’organisation consolida son implantation dans le Bas-Congo et à Léopoldville dans les années qui suivirent. Vers le début de 1959, le Bas-Congo échappait au contrôle des autorités belges, l’ABAKO prônant la désobéissance civile pacifique. Les autorités belges interdirent une manifestation de l’ABAKO le 4 janvier 1959, ce qui jeta des nombreux Congolais dans la rue à Léopoldville. Armés de pierre, ils attaquèrent les colons blancs avec un seul slogan Dipanda, dipanda (indépendance). La force publique répliqua en ouvrant le feu. Les émeutes durèrent du 4 au 7 janvier 1959. Les journaux parlèrent de 14 morts noirs et 9 colons tués. Le 12 janvier, Kasa-Vubu fut arrêté et emprisonné pour deux mois. Le 20 janvier, le roi Baudouin annonça la volonté belge de conduire les populations congolaises à l’indépendance.
Le MNC
En parallèle se constitua le Mouvement national congolais (qui ne fut officiellement constitué qu'en 1956). Le MNC était dirigé par le charismatique futur Premier Ministre Patrice Lumumba et prônait la création d'un territoire national unique après l'indépendance. Le mouvement fut rapidement structuré en quatre sections liées à quatre provinces (des six existantes). En 1959, une scission intervint, précipitée par Albert Kalonji et d'autres cadres du MNC souhaitant une politique plus modérée que celle prônée par Lumumba. Ce groupe fut rapidement dénommé Mouvement national congolais-Kalonji. Malgré les divergences dans le parti, la faction gauchiste de Lumumba (dénommée Mouvement national congolais-Lumumba) et le MNC dans son ensemble avaient réussi à s'imposer comme le plus important et le plus influent parti du Congo belge. La Belgique vit d'un mauvais œil la montée de Lumumba et de ses idées de gauche, et y perçut une menace pour ses intérêts économiques sur le territoire. Le MNC remporta cependant clairement les premières élections au Congo et força les Belges à nommer Lumumba Premier Ministre.
La Conakat
La Confédération des associations tribales du Katanga (Conakat), était dirigée par Moïse Tshombe.
Se définissant comme « d’authentiques Katangais », les militants de la Conakat provenaient essentiellement des ethnies Lundas, Yeke et Basongye du Sud Katanga, connus pour leurs inimitiés à l’égard des immigrants Luba du Kasaï, pour la plupart employés dans les mines. La victoire décisive remportée par ces « étrangers » aux élections communales de 1957 aiguisa encore l’agressivité des dirigeants de la Conakat envers les immigrants du Kasaï. Le Conakat pour sa part, favorisait le rapprochement entre les colons belges et les Katangais de souche, les Katangais dits « authentiques ».
Une autre menace se fit jour pour la Conakat au nord du Katanga, non de la part des Lubas immigrés, mais de Lubas historiquement présents dans le Nord-Katanga. Dirigés par Jason Sendwe, ils créèrent leur propre mouvement politique, l’Association des Baluba du Katanga (Balubakat), qui se coalisa rapidement avec la branche lumumbiste du MNC. Malgré les affinités entre les deux groupes, les Lubas du Kasaï suivaient le mouvement de la Fédération du Kasaï (Fédéka), proche du MNC-Kalonji. Dès lors, l’alliance entre la Balubakat et le MNC-Lumumba, comprenant nombre de Luluwas, n’avait que peu de chances de trouver un écho auprès de la Fédéka. Les divergences entre les Lubas du Katanga et du Kasaï bénéficièrent directement à la Conakat et à leurs partenaires européens.
1959 et 1960 : à grands pas vers l'indépendance
Après les émeutes de Léopoldville et l'incarcération de Kasa-Vubu, 1959 vit la légalisation des partis politiques congolais, suivie par des élections générales pour tout le pays. L'activité électorale qui s'ensuivit permit de faire émerger trois tendances politiques principales : une coalition de fédéralistes nationalises, composée de six partis ou organisations, dont l'ABAKO et le MNC-Kalonji, le MNC-Lumumba et finalement l'homme fort du Katanga, Moïse Tshombe, conscient de la vitalité économique de sa province et des intérêts financiers de l'Union minière (à l'instar de l'intérêt de Kalonji pour l'industrie diamantaire du Kasaï). En 1960, la table ronde de Bruxelles fut décidée, et se déroula du 20 janvier au 20 février. Les représentants congolais et belges se mirent d'accord sur le principe d'élections nationales dans le courant de l'année. Au lendemain de la table ronde, les transferts de fonds vers l'Europe prenaient une ampleur telle que les politiciens congolais accusèrent la Belgique de « vider la caisse » avant l’indépendance. De violentes émeutes politico-ethniques éclatèrent avant les élections au Katanga, au Kasaï et à Léopoldville. Les élections se déroulèrent en mai (élections législatives et provinciales) et virent la victoire des partis « nationalistes » (Céréa 10 sièges, PSA-Gizenga 13, MNC 74, total des sièges : 137 sièges) (importance de l'ABAKO) et décidèrent d'un nouveau compromis au niveau de l'exécutif : Joseph Kasa-Vubu fut élu président par le Parlement et Lumumba fut désigné Premier ministre.