L'inconscient ou inconscience, (de in-, préfixe privatif (indique le contraire du radical), et conscient, composé du préfixe con-, « avec », et de scientia, « le savoir ») est l'état de ce qui est dépourvu de conscience. En psychologie, l'inconscient désigne les phénomènes inaccessibles au champ de la conscience.
Selon la psychanalyse, l’inconscient psychique a une influence sur le comportement, les sentiments et le jugement d'un individu , et sur les raisons réelles de choix ou décisions.
Histoire
Occurrence du terme
La première occurrence du terme — en tant que non-conscient — que l'on puisse relever est en langue anglaise. Elle vient d'un juriste anglais, Henry Home Kames, en 1751. Puis, c'est un écrivain suisse qui l’introduit dans la langue française, Henri-Frédéric Amiel aux alentours de 1860 au sens de vie psychique inconsciente.
Conceptualisation du terme
La philosophie s'était dès l'Antiquité intéressée à une activité qui puisse échapper à la conscience mais c'est au XVII siècle Descartes qui, à travers le cogito, conceptualise l'opposition entre la conscience comme fondement de la raison et ce qui y échappe — relégué par lui dans le domaine de la folie. Leibniz, avec un texte concernant les « petites perceptions confuses » (ou théorie des petites perceptions) s'approche également d’un concept d'inconscient qui s'oppose à la conception cartésienne de la conscience. Il constate que nos pensées humaines sont continues à l'insu de nos consciences. Dans le même temps, Pascal et Spinoza remettront en cause l’autonomie de la conscience à travers notamment l’importance des automatismes et des affects.
Au XVIII siècle apparaît sur ce présupposé la « première psychiatrie dynamique » qui pratique une « thérapeutique fondée sur le magnétisme » comme chez Franz Anton Mesmer, ce qui amène à voir l’inconscient « comme une dissociation de la conscience: subconscience ou automatisme mental » et accessible à l'hypnose.
Au XIX siècle, avec Schelling et Arthur Schopenhauer apparaît l'idée d’une psyché présente dans l’âme humaine et qui échappe au rationalisme, Von Hartmann publie en 1868 La Philosophie de l'inconscient. Et c'est dans ce siècle que se développe une « psychologie expérimentale », médicale et physiologique, avec Johan Friedrich Herbart, Hermann von Helmholtz, Gustav Fencher, Wilhelm Wundt ou Carl Gustav Carus qui fut le premier à noter le rôle éminent des fonctions sexuelles dans la vie psychique.
Puis au tournant du siècle, Sigmund Freud en développe une nouvelle conception, à partir de la synthèse de l'enseignement de Charcot, Bernheim et Breuer dans un premier temps puis de l’interprétation du rêve dans un second, donnant par là naissance à la psychanalyse où cette notion est centrale. Au cours du XX siècle, différents psychanalystes approfondiront le travail de Freud : Mélanie Klein insiste sur la relation archaïque avec la mère ; Jacques Lacan développe, à partir d'une théorie du signifiant, les liens entre inconscient et langage.
Plus récemment une théorie, soutient que les actes impulsifs sont activés inconsciemment. Le processus étant d'abord généré par une impulsion comportementale, et ensuite est perçu comme étant un processus conscient. Selon une théorie évolutioniste. L'évolution ayant une influence sur nos préférences, de nombreuses impulsions et tendances comportementales serait d'origine évolutive.
De nombreux travaux en psychologie sociale et en psychologie cognitive abordent expérimentalement les processus inconscients.
La psychologie cognitive identifie la mémoire procédurale et le processus automatique comme étant des processus inconscients. La psychologie sociale, a démontrée l'importance du comportement implicite. En linguistique, la grammaire universelle développée par Chomsky, est un processus linguistique inconscient qui permet d'identifié la formation correcte de phrases.
Plus récemment, les bases cérébrales de ces processus font l'objet de travaux de recherche en neurosciences cognitives ( notamment grâce aux informations fournies par les études neuropsychologiques de phénomènes comme la « vision aveugle » ou la négligence, ainsi que par les études en neuroimagerie). Ces travaux se placent dans une perspective compatible ou au contraire disjointe des approches psychanalytiques.
Psychanalyse
Pour la psychanalyse, et d'après Freud, l'inconscient est l’objet même de son étude et de sa pratique. Il peut-être conçu comme un maillage d'idées, de perceptions, d'émotions, de mots, de signifiants, de pulsions constituant le psychisme, influant sur nos conduites, et inaperçues par la conscience. Il ne s'agirait pas ici simplement de l'opposition à la notion de conscience mais d'une structure réactive et dynamique. Par exemple, un changement dans l'une des mailles provoqué par une perception pourrait entraîner des modifications sur une plus grande partie du psychisme. Ce qui se déroule dans l'inconscient n'est, en ce sens, pas soumis aux lois de la logique bien que susceptible de compréhension : nos actes manqués (y compris les représentations, qui sont des « actes psychiques » selon Freud) répondent à des raisons, des désirs non formulés de façon intelligible, sans conscience de ces motifs. À partir de là, la psychanalyse se présente comme une méthode d'investigation des processus psychiques inconscients.
Sigmund Freud, dans la première topique de l’appareil psychique, nomme « inconscient » une instance composée d’éléments refoulés à qui a été refusé l’accès à l’instance préconscient-conscient et qui est constituée de représentations des pulsions régies par les mécanismes du processus primaire. Dans la seconde topique, l'inconscient est désigné principalement par l'instance du « Ça » mais recouvre partiellement celles du « Moi » et du « Surmoi ».
Sigmund Freud
Sigmund Freud en 1922.
Hypnose et association libre
La pratique de l'hypnose, avait depuis longtemps mis en évidence l'existence de processus psychiques inconscients (Bernheim, Janet…) :
« Je me souvins alors d'une expérience étrange et instructive que j'avais vue chez Bernheim, à Nancy ; Bernheim nous avait montré que les sujets qu'il avait mis en somnambulisme hypnotique et auxquels il avait fait accomplir divers actes n'avaient perdu qu'apparemment le souvenir de ce qu'ils avaient vu et vécu […] Si on les interroge, une fois réveillés, sur ce qui s'est passé, si on les assure qu'ils le peuvent alors les souvenirs oubliés reparaissent sans manquer. »
Lorsque Freud abandonne l'hypnose et invente la technique d'association libre, il aboutit aux mêmes conclusions. L'inconscient n'existe pas seulement pour les personnes atteintes de pathologies psychiques, mais chez tout être humain. Cette hypothèse permet de rendre compte, selon lui, du rêve, des actes manqués et des mots d'esprit. Dans le rêve, le mot d'esprit ou les actes manqués, ce sont les lacunes ou les déformations du discours qui renseignent sur des désirs inconscients. L'inconscient, pour Freud, est lié au désir ou à la pulsion, et par voie de conséquence à l'interdit, au tabou, à la transgression.
Manifestations et accès à l’inconscient
Pour Freud, il existe des moyens privilégiés d’accès à l'inconscient :
Les rêves : « la voie royale de connaissance de l'inconscient ». Le fait que tout homme rêve est une preuve de l'existence d'un inconscient. L'analyse du rêve participe de la découverte des mécanismes de symbolisation d'un psychisme, et des mécanismes de déformations de la censure. Le rêve a donc un sens à déchiffrer en tant qu'il est la satisfaction déguisée d'un désir inconscient.
Le lapsus : des mots qui se substituent involontairement à d'autres sont entendus comme une expression de l'inconscient et compris comme n'étant pas dus au hasard mais à un sens refoulé qu'il est possible de comprendre.
L'acte manqué : Il existe des phénomènes quotidiens qui viennent rompre la continuité de nos actes (des oublis, des pertes d'objets, etc.). C'est également un des moyens pour la psychanalyse de pouvoir repérer des désirs ou des conflits inconscients.
Mécanismes
La condensation : « mécanisme par lequel une représentation inconsciente concentre les éléments d’une série d’autres représentations », propre à manifester des désirs inconscients en déjouant la censure, à l'œuvre dans le symptôme et d'une façon générale dans les diverses formes de productions de l'inconscient (lapsus, oublis...), Freud l’a d’abord mis en évidence dans le travail du rêve. « Cela consiste à représenter par un seul élément du contenu manifeste une multiplicité d'éléments (image, représentation...) du contenu latent. Inversement, un seul élément du contenu latent peut être représenté par plusieurs éléments du contenu manifeste. ». Il s'agit d'un travail de « compression » dont Freud dit qu'il est différent d'un simple résumé. Par exemple, une personne peut tout à coup revêtir l'apparence d'une autre et prendre le caractère d'une troisième.
Le déplacement : « Fait que l'accent, l'intérêt, l'intensité d'une représentation est susceptible de se détacher d'elle pour passer à d'autres représentations originellement peu intenses, reliées à la première par une chaine associative. ». C'est le procédé par lequel un trait secondaire ou un détail insignifiant dans le récit prend dans l'interprétation psychanalytique une valeur centrale. Il n'y a pas de correspondance entre l'intensité psychique d'un élément donné du contenu manifeste et celle des éléments du contenu latent auquel il est associé. Ainsi, la représentation originelle se trouve de fait refoulée, parce que désinvestie.
Le refoulement : Il s'agit d'un mode de défense privilégié contre des pulsions. Le refoulement est l'opération par laquelle le Moi repousse et maintient à distance du conscient des représentations considérées comme désagréables, car inconciliables avec le réel.
La formation de compromis : C'est un conflit entre deux tendances, l'une inconsciente et d'ordinaire refoulée qui lutte pour la satisfaction d'un désir, et l'autre consciente qui désapprouve et réprime cette satisfaction. L'issue de ce conflit est une formation de compromis dans laquelle les tendances trouvent une expression complète. Un bon exemple de formation de compromis est l'acte manqué.
Appareil psychique : les topiques
L'idée d'une « topique » psychique est présente dans la pensée de Freud dès 1895. Il élabore un appareil psychique constitué de systèmes doués de fonctions différentes et disposés dans un certain ordre les uns par rapport aux autres. On peut les considérer comme des lieux (topos =lieu en grec).
Première topique
Il existe quatre systèmes décrits par Freud dans sa première topique.
La première est le conscient (Cs) ; il est situé à la périphérie de l'appareil psychique, recevant à la fois les informations du monde extérieur et celles provenant de l'intérieur. C'est le lieu d'accès direct des représentations à la conscience et en lui ne s'inscrit aucune trace durable des excitations. Ce système respecte des règles (logique, temporalité...) pour se protéger et garantir sa survie en refoulant tout ce qui pourrait menacer l'adaptation du sujet.
La seconde est le préconscient (Pcs) ; il est situé entre le système inconscient et conscient. Il est le plus souvent rattaché au conscient et il est alors question de système perception-conscience, traduction littérale de l'allemand freudien « Wahrnehmungsbewusstsein », plus correctement traduit par : « la conscience dans sa fonction perceptive ». Il est séparé de l'inconscient par la censure qui cherche à interdire aux contenus inconscients la voie vers le conscient.
Troisième système, l'inconscient (Ics), est le siège des pulsions innées, des désirs et des souvenirs refoulés ; c'est la partie la plus archaïque de l'appareil psychique. Ce système ne comprend que des représentations de choses, il ne peut pas les verbaliser. Ces représentations ne connaissent ni négation ni doute, elles ne respectent ni les règles de la logique, ni de la temporalité ordonnée. Elles sont régies par le principe de plaisir. L'inconscient peut être représenté comme la partie immergée de l'iceberg.
La quatrième et dernière, la censure, est une instance particulière qui laisse passer uniquement ce qui lui est agréable et retient le reste. Ce qui se trouve alors écarté par la censure se trouve à l'état de refoulement et constitue le refoulé. Dans certains états comme le sommeil, la censure subit un relâchement de sorte que le refoulé puisse surgir dans la conscience sous forme d'un rêve. Mais comme la censure n'est pas totalement supprimée, le rêve devra subir des modifications. En effet le contenu latent (le sens caché du rêve) sera déformé par la censure pour devenir le contenu manifeste (c'est-à-dire le rêve tel qu'il apparaît au rêveur ou, au moins, le souvenir que le rêveur en a).
Seconde topique
Représentation de la seconde topique comparée à la première.
Freud restera fidèle à sa conception de la théorie première de l'appareil psychique. Il va cependant introduire la seconde topique en 1923. Cette seconde topique se superpose à la précédente et introduit trois nouvelles instances : le ça, le Surmoi et le Moi.
Le ça : Il est dans l'inconscient et il est immuable. C'est l'instance la plus primitive. Le ça est le réservoir de la libido, du désir sexuel mais aussi d'autres désirs tels que : le désir de domination, de maîtrise, de jouissance et de savoir. Le « ça » cherche des satisfactions immédiates.
Le Surmoi : Il est la plupart du temps inconscient et immuable. Il refoule et censure de façon archaïque et infantile. C'est en partie l'intériorisation des désirs parentaux.
Le Moi : Il est en grande partie dans le conscient mais il n'est pas entièrement immuable. Le Moi s'efforce d'établir un équilibre entre les interdits et les refoulements du Surmoi, les désirs du ça et les nécessités de l'action sur le monde extérieur et de la vie sociale.
Il convient notamment de mentionner que Freud, dans son « Introduction à la psychanalyse », conçoit l’appareil psychique comme étant formé d’une grande antichambre qui est l’inconscient et où toutes les tendances prennent naissance. Quelques-unes d’entre elles arrivent à passer la censure, à quitter cette antichambre et à s’acheminer vers le conscient, encore faut-il que ce dernier s’y intéresse. Toutes les tendances commencent donc par être inconscientes.
Jacques Lacan
Représentation dessinée de Jacques Lacan.
Cette section s'appuie sur le Dictionnaire de la psychanalyse de Roland Chemama et Bernard Vandermersch.
L’inconscient est le discours de l’Autre
Pour Jacques Lacan, il a été fréquemment oublié, après Freud, que « l'expérience psychanalytique est celle où le sujet est confronté à la vérité de sa destinée » à travers les discours qui l’ont constitués (ceux des parents principalement) et dans lesquels il se situe. Ainsi dans la mesure où toute parole est destinée à quelqu'un, où elle possède une adresse, le sujet s'identifie dans le discours à ce qu'il pense être son identité, son moi, qui n'est en réalité qu'un autre. Mais le sujet questionne véritablement son existence à partir de l'« Autre », un « lieu d’où se pose pour lui la question de son existence concernant son sexe et sa contingence dans l’être nouée dans les symboles de la procréation et de la mort », cette question est de l’ordre de la loi symbolique qui fonde l’alliance et la parenté (ce que Freud nomme le complexe d’Œdipe), ordre symbolique identique à l'ordre du langage car « c'est à travers les nominations de la parenté et les interdits que se noue le fil des lignées. Aussi le sujet se constitue-t-il au lieu de l’Autre, dans la dépendance de ce qui s'y articule comme discours, pris dans une chaîne symbolique où il est joué comme un pion : l’inconscient est le discours de l’Autre ».
L'inconscient est structuré comme un langage
Le discours de l'Autre constitue une chaîne signifiante dans une altérité vis-à-vis du sujet aussi radicale que « celle des hiéroglyphes encore indéchiffrables dans la solitude du désert » selon la formule de Lacan dans les Écrits mais cette chaîne prend les formes de la répétition freudienne en interférant dans les coupures du discours et fait symptôme. Lacan, en s'appuyant sur la linguistique de Ferdinand de Saussure et de Roman Jakobson montre que les lois qui structurent l’inconscient se retrouvent dans la chaîne du discours : l’inconscient est structuré comme un langage, ce qui ne signifie pas qu'il l’est comme une langue. La linguistique structurale a mis au jour la distinction entre signifiant et signifié mais pour la psychanalyse c'est le signifiant qui prime sur le signifié et les deux ordres sont séparés par une barre qui marque la résistance à la signification, il est donc nécessaire d’abandonner l’illusion que le signifiant représente le signifié, par exemple les signifiants « homme » et « femme » ne rendent pas compte des concepts d’homme et de femme mais renvoient à la différence des places assignés l’un à l'autre par la loi symbolique, phallique, en ce sens « les motifs de l'inconscient se limitent au sexuel » et à l'imaginaire. Lacan établit ainsi la correspondance entre des figures de style et les formes de manifestations de l’inconscient identifiées par Freud tels le déplacement et la condensation : le symptôme prend la forme d'une métaphore et la métonymie celle du désir.
Le sujet de l’inconscient
Les productions de l’inconscient montrent que, dans l’inconscient, « ça pense » mais sous la forme d’une « structure de discontinuité, de fente aussitôt refermée qu'apparue, structure de battement » où le sujet de l’énonciation, distinct du sujet de l’énoncé (du « je » grammatical), apparaît fugitivement au moment du « ratage de l’objet du désir », toujours fuyant. Pour autant, le sujet de l’inconscient est toujours « sans voix » de par la structure du signifiant : le sujet est représenté par un signifiant pour un autre signifiant, ce qui implique que le sujet s'évanouit, réduit à n'être qu'un signifiant dans le mouvement même où il est amené à parler. Ce n’est que dans le retour du refoulé qu'il peut donner quelque chose à entendre, c’est pourquoi le rêve est un rébus, « une expression pictographique sans alphabet constitué », témoignant de pensées non arbitraires mais dont on ne peut tirer de conclusion définitive « car leur cause, point ombilical, échappe : ce que Lacan nomme le réel ».
La lettre
Ce n'est pas le phonème qui constitue l’unité d’organisation de l'inconscient mais la lettre, de nature localisable et différentielle, à la fois pur symbole et élément matériel, pris par le sujet comme objet perdu voire objet lui-même, en ce sens les mots sont traités comme des choses, et à l'image de la poésie, « ils se prêtent à la dislocation et à la césure selon le jeu de "lalangue", où le sujet de l’inconscient trouve à se faire entendre et le symptôme à s'écrire », ainsi les éléments (en eux-mêmes dépourvus de signification) de la chaîne signifiante à l’œuvre dans l’inconscient tirent leur valeur de leur émergence dans le discours en tant que signe d’un désir interdit.
Topologie
Ruban de Möbius : il ne possède qu'une face, si on part d'un point, on parcourt l'ensemble de la bande.
L'inconscient ne devrait pas être représenté comme un dedans opposé à un dehors mais selon une structure topologique de bord : « la béance de l’inconscient en son mouvement d'ouverture et de fermeture est d’une structure isomorphe à celle des pulsions prenant électivement appui sur les zones du corps comportant un bord ». Cette topologie peut être rapportée à diverses formes, dont par exemple la bande de Möbius : les manifestations de l’inconscient ne franchissent pas un bord mais sont dans une continuité comme l’envers et l’endroit d’une telle bande.
Psychologie analytique
L’inconscient est également un concept en psychologie analytique (jungienne). Dans ce cadre il a sa définition propre. Ici, l'inconscient se composerait d'un inconscient personnel, d'un inconscient collectif et d'un inconscient spirituel qui nous préviendrait de dangers et trouverait la solution de certains conflits. Jung donne des exemples de rêves qui auraient une fonction d’avertissement. Selon Carl, « la complexité de la psychanalyse jungienne tient au fait que toutes les instances psychiques sont en étroites relations les unes avec les autres. Décrire isolément un concept donne de lui une vision forcément partielle car ne tenant compte ni des rapports dynamiques avec les autres instances ni de l'ensemble du système psychique. Tout est lié, tout est en mouvement ».
Le concept moderne d'inconscient, peut être attribué à Freud. Celui-ci l'a appliqué à des cas individuels et a inventé des méthodes d'investigation pour des patients atteints de troubles psychiques. Le point de vue de Sigmund Freud se rapporte à l'idée d'un inconscient individuel et il s'est, à ce sujet aussi, opposé à l'idée du suisse Carl Gustav Jung d'un inconscient collectif. Dans un premier temps proche de la psychanalyse freudienne, il a par la suite créé sa propre école de psychologie analytique.
Inconscient et neurosciences
François Clarac et Jean-Pierre Ternaux font une synthèse de la question des rapports entre inconscient et neuroscience dans la conclusion de leur ouvrage Encyclopédie historique des neurosciences : avec les progrès technologiques, les neurosciences sont devenus plus ambitieuses, elles ne cherchent plus seulement à expliquer et à soigner les maladies neurologiques mais veulent expliquer les fonctions psychiques les plus complexes, dont l'inconscient. Bien que ce projet ne fasse pas l'unanimité dans le champ de la neurobiologie, certains auteurs comme Jean-Pierre Changeux ou Pierre Buser considèrent cela comme une révolution. Le champ des neurosciences s'élargit constamment, et bien que de nombreuses années seront encore nécessaire pour déterminer le rôle fonctionnel des espaces du cerveau déterminant les fonctions cognitives, une ère nouvelle est annoncée selon Jerry Fodor. La légitimité de traiter scientifiquement des questions relatives à la conscience fait question, notamment selon Gerald Edelman et Francisco Varela, dans l'optique de savoir si elle possède un substrat biologique et si elle peut être abordée en termes de réseaux neuroniques. La question du réductionnisme se pose.
Le domaine de l'inconscient, exploré par Freud et la psychanalyse, semble aujourd'hui concerner les neurosciences. Selon certains neurobiologistes, comme Eric Kandel, la psychanalyse serait compatible avec les neurosciences et pourrait s'en nourrir. D'autres pensent y avoir accès comme Vilayanur S. Ramachandran avec des expériences sur les anosognosies en relation avec le déni, qui confirment selon lui la théorie psychanalytique du refoulement ou des expériences sur le membre fantôme, Angela Sirigu et K. T. Reilly ont fait des recherches semblables. Si, dans les médias, les oppositions entre psychanalystes et neuroscientistes transparaissent, certains parmi ces derniers, comme Pascal Mettens voient les deux domaine comme un même ensemble de paradigmes, dans une filiation historique commune, et pensent qu'ils rencontrent des questionnements et des difficultés identiques.
Ce n'est pas pour autant la position générale : Pierre Buser montre la diversité des inconscients cognitifs. Naccache d'après une expérience montre qu'il y a une perception subliminale inconsciente d'un mot avant qu'il ne parvienne à la conscience. Stanislas Dehaene, Lionel Naccache et Jean-Pierre Changeux ont proposé un modèle scientifique de la conscience visuelle, selon lequel nous avons plus conscience de la représentation d'un objet telle qu'établie par notre cerveau que de l'objet lui-même. Naccache aborde également Freud et affirme que l'inconscient freudien et l’inconscient cognitif sont incompatibles : dans le cas freudien les représentations inconscientes sont pérennes, dans le cas cognitif elles sont évanescentes ; le refoulement serait un phénomène conscient. Selon Buser, à partir du postulat d'une explication des comportements par les réseaux de neurone, il y a deux positions : ceux qui croient que l'on pourra cerner les contours de la conscience et de l'inconscient, faire la synthèse entre neurone et esprit, et d'autres qui pensent que cela ne sera pas possible.
Critiques philosophiques de l'inconscient freudien
L'inconscient, pour Alain, n'est pas la sur-interprétation freudienne mythologique.
Pour Karl Jaspers, le pansexualisme de l'inconscient freudien est une psychologie littéraire critiquable.
Jean-Paul Sartre considère que l'inconscient freudien n'est pas autonome et psychique. Pour lui, l'inconscience est une modalité de la conscience qu'il nomme le « pour-soi » dans le langage phénoménologique.
Selon Michel Onfray, l’inconscient freudien est idéal, idéel, nouménal, immatériel et « phylogénétique », c'est-à-dire lié à l’évolution de l'espèce. Freud a pour théorie l'évolution par transmission des caractères acquis, largement réfutée depuis que le darwinisme et la théorie synthétique de l'évolution se sont imposés, que l'inconscient psychique serait un caractère qui se transmettait de génération en génération depuis les premiers temps de l'espèce humaine. Selon Michel Plon et Élisabeth Roudinesco, la phylogenèse chez Freud relève d'« hypothèses qu'il considère comme autant de "fantaisies" ».
Didier Eribon note le caractère hétérocentriste et homophobe de l'inconscient légitimé par la psychanalyse comme fondement à prétention scientifique qui est un principe idéologique hétéronormatif.