Un évier est une vasque. En France, elle est placée dans la cuisine et sert notamment à faire la vaisselle ou nettoyer la nourriture. Un lavabo est, quant à lui, placé dans la salle de bains, et sert à faire sa toilette. Mais on peut différencier facilement l'un de l'autre : l'évier étant souvent métallique et le lavabo en céramique. Notons aussi que Lavabo est tout de même souvent utilisé au Québec pour désigner un évier.
Étymologie
Fontaine avec évier
Lavabo et sa Puisette du XIII/XIV siècle
Le mot évier vient du mot latin aquarium (aqua = eau) qui signifie réservoir. Le mot va connaître toute une série de mutations phonétiques en passant par aqwaryo, agwaryo, ag waryo, awwaryo, awaryo, awyèro, awyèr(e), avyer pour finir au XIII siècle par donner notre évier moderne. À cette époque, il désigne, selon le dictionnaire de l'Académie, un « égout pour l'écoulement des eaux usées ».
Le mot lavabo, lui, est la première personne du singulier du verbe latin lavare au futur. Dans la liturgie chrétienne, le terme décrit un moment de la messe où le prêtre, justement, se lave les mains. Lavabo inter innocentes manus meas (« Je me laverai les mains parmi les innocents »). D'où le mot lavabo pour désigner une vasque réservée aux ablutions alors que le mot évier, d'une utilisation originellement plus prosaïque, va être circonscrit au domaine ancillaire.
Histoire
Plongeur dans une auberge (Chardin)
Au départ, l'aquarium est creusé dans la pierre et sert à retenir l'eau. Il peut donc servir aussi bien de réservoir que d'abreuvoir ou d'auge.
Pour vidanger l'eau, ce que le poids de la pierre rend peu aisé, on creuse une rigole d'évacuation, ou un trou dans le fond de la vasque de pierre, trou qui sera bouché à l'aide d'une bonde que l'on peut facilement ôter et remettre.
Les représentations des cuisines anciennes dans la peinture montrent que l'évier sous forme de vasque n'apparaît que tardivement dans les maisons. La vaisselle se fera longtemps dans un tonneau, un baquet ou un bac. Jusqu'au XVIII siècle, le mot évier, en France, désigne un « canal appropriée à une cuisine, où l'on jette l'eauë des choses lavées, ou autres pour la faire vuider hors », un « Conduit par où s'écoulent les eaux, les lavures, & les autres immondices d'une cuisine ». Certaines cuisines sont munies d'une bassière en pierre qui sert d'évier. Ce n'est qu'au début du XIX siècle que le dictionnaire de l'Académie donne une définition qui se rapproche de celle de l'évier moderne : ÉVIER. s. m. Pierre en forme de table, et légèrement creusée, sur laquelle on lave la vaisselle, et qui a un trou pour l'écoulement des eaux. On l’appelle aussi pierre d'évier ou pierre à laver.
Dans la Brie, c'est une simple pierre peu profonde, qui sert à poser un seau de bois. On l'appelle le lavier. Le terme levier ou lavier se retrouve également au Canada.
Dans les maisons prospères de l'Angleterre victorienne et édouardienne, l'évier se trouve dans une pièce attenante à la cuisine, la scullery. C'est un évier en faïence blanche à une cuve. On distingue à cette époque l'évier de Belfast (avec un trop-plein) et l'évier de Londres (sans trop-plein).
La multiplication des éviers dans les maisons urbaines posera des problèmes de tuyauterie résolus par la fontainerie qui se développe à partir du début XIX siècle. Des conduites en plomb, étanche et malléable, mais aussi en fer fondu, en cuivre, en terre cuite ou en bois, des tuyaux coudés retournés en collet sur la pierre à laver et joints au mastic permettent l'écoulement des eaux vers l'extérieur, mais aussi acheminent l'eau de la nappe phréatique à la pompe à bras, machine composée de tuyaux cylindriques de bois, de plomb ou de potin, d'un piston et de soupapes, dont on se sert pour puiser l'eau et l'élever. Les Pompe aspirantes et foulantes permettent d'élever l'eau où on peut désirer dans les divers étages d'une maison.
L'eau courante de même que le gaz de ville arrive peu à peu dans tous les foyers au cours du XX siècle, acheminée par des sociétés distributrices, via un réseau de canalisations qui couvre des territoires immenses. Elle est maintenant dispensée directement par unrobinet au-dessus de l'évier qui restera longtemps le seul point d'eau du logement urbain .
Burg Meersburg Pierre d'évier, évacuation en façade, XVIII siècle(?)
Pierre d'évier et pompe à bras, Hollande, XIX siècle(?)
Évier et pompe à bras, Hollande, XIX siècle(?)
Évier et chauffe-eau, Allemagne, XX siècle
La vaisselle, XXI siècle
Présentation
Évier en inox et meuble
Évier en inox composé d’une cuve et d’une paillasse.
L'évier de faïence apparaît tardivement. Il est d'un entretien plus simple et donc plus hygiénique que la pierre. Blanc à l'origine, il peut être coloré. L'évier en ciment est moins coûteux.
Dès le XX siècle, on trouve des éviers en zinc, en inox, en grès, en céramique ou en matériaux de synthèse.
L’évier peut être constitué d’une ou plusieurs cuves (plus généralement deux), ce qui par exemple, permet de laver et rincer la vaisselle dans des eaux différentes. Sur le côté de la cuve (voire des deux côtés) se trouve la « paillasse », lisse ou rainurée, où l’on place les objets à égoutter.
L'évier est parfois solidaire d'un socle appelé « plan de travail reposant lui-même sur élément de cuisine équipée. Ce plan est alors fabriqué dans différents matériaux comme : le bois (parfois traité par ignifugation) ou recouvert de carrelage, la pierre (marbre ou granit polit), le métal (inox), le verre, un matériaux de synthèse (Corian), etc.
Siphon
Siphon
Les canalisations d'évacuation des eaux usées sont équipées d'un siphon qui fait écran aux odeurs désagréables. Ce siphon est placé sous l'évier, et reçoit donc des débris solides qui, en s'accumulant, peuvent le boucher et empêcher l'écoulement des liquides.
Les techniques les plus courantes pour déboucher une canalisation sont :
le déboucheur chimique,
la ventouse dite débouche-évier,
le furet,
la pompe.
Légendes
Une légende urbaine associe le lavabo et les forces de Coriolis. Une expérience simple permet de démontrer qu'il n'en est rien. Il suffit en effet d'observer simultanément deux lavabos identiques à l'aide d'une webcam, l'un dans l'hémisphère nord, l'autre dans l'hémisphère sud, pour constater que le sens de rotation de l'eau qui se vide est aléatoire, et n'a rien voir avec la rotation du globe terrestre, ceci étant dû à la géométrie de la cuvette et aux microcourants d'eau créés lors de son remplissage, ou lors d'une agitation de l'eau.
Dans les arts et la littérature
Objet vulgaire, associé aux classes modestes ou au domaine des domestiques, l'évier devient un symbole du nouveau réalisme de la peinture britannique des années 1940-1950, lorsqu'un tableau de Jack Smith inspire au critique David Sylvester l'expression kitchen sink painters (en), les « peintres de l'évier de cuisine » qui sera attribuée également à John Bratby, Derrick Greaves et Edward Middleditch. L'expression sera adaptée en kitchen sink dramatists (« les dramaturges de l'évier de cuisine ») pour désigner les auteurs de la génération des Angry Young Men, qui mettent en scène des héros issus de classes modestes ou laborieuses, évoluant dans un environnement bien éloigné des salons bourgeois.
Au cinéma l’évier de cuisine est un accessoire qui connote fortement l'ambiance et caractérise les habitants d'un lieu. Sale et débordant de vaisselle, il peut suggérer :
le célibataire masculin,
la dépression,
le surmenage,
les problèmes familiaux.
Propre et net, il renvoie à l'image :
de la bonne ménagère archétypale,
de la famille aisée qui peut se payer des domestiques,
de la petite bourgeoisie maniaque.