Une illusion est une perception reconnue comme différente de la réalité.
Spectacle et divertissement
Sur scène
Im Reiche der Illusion (« Dans le domaine de l'illusion »), attraction au Prater de Vienne en Autriche, photographiée par Emil Mayer (de) entre 1905 et 1914.
Les arts du spectacle, par les décors, les costumes, les effets spéciaux, etc., permettent aux spectateurs de jouir d'un imaginaire fortement étalé.
Les prestidigitateurs, appelés aussi illusionnistes à partir du troisième tiers du XIX siècle cultivent l'art de l'illusion avec la complicité émerveillée de ceux qui les regardent.
À domicile
Dans le spectacle musical, le son stéréophonique crée l'illusion auditive de sources de son entre les enceintes acoustiques.
Illusions sensorielles
Objets d'étude
« On considère généralement les illusions des sens comme des erreurs ou des fautes, de ce fait elles sont loin de représenter des données constitutives d'un savoir ou ayant valeur de vérité. C'est une volte-face que d'accepter les illusions comme des faits essentiels pour une appréhension scientifique de la nature de la science et de l'entendement »
— Richard Gregory De la représentation dans ses rapports avec les illusions sensorielles.
En ce qu'elles semblent prendre en défaut le fonctionnement des sens, les illusions, lorsqu'elles sont partagées par un grand nombre de personnes qui ne présentent aucune pathologie, fournissent aux chercheurs des questions intéressantes sur le système de la perception. Généralement, elles les obligent à se séparer d'une conception où la perception serait un enchaînement de causes et d'effets allant de la réalité physique à la conscience en passant par des organes spécialisés.
Dès les débuts des recherches psychophysiques, Helmholtz indique à propos de la perception visuelle la nécessité d'expliquer « comment l'expérience peut contredire l'expérience, et comment des éléments empruntés à l'expérience peuvent produire des illusions, bien qu'il semblerait que l'expérience ne pût nous enseigner que le vrai ».
Sécurité
Dans un avion, l'absence des repères habituels peut aboutir à des illusions persistantes.
Les illusions sensorielles sont, pour les personnes préoccupées de sécurité, un important objet d'études appliquées.
C'est particulièrement le cas dans les systèmes complexes comme l'aéronautique où il est reconnu que des erreurs radicales et persistantes peuvent amener à des catastrophes. L'illusion sensorielle prospère en compagnie des erreurs radicales et persistantes qui mènent à la catastrophe : l'opinion erronée informe la perception illusoire, qui la renforce.
Selon une statistique américaine, en aviation légère, la désorientation spatiale par illusions sensorielles est responsable de 37% des accidents mortels, et en aviation commerciale, selon une étude britannique, ils sont à l'origine de 12% des accidents.
On trouve des préoccupations semblables dans la prévention des accidents de plongée sous-marine et même des accidents chirurgicaux.
Classification
Richard Gregory, un neuropsychologue britannique spécialisé dans la perception, a donné un classement des illusions visuelles ; les critères de classement peuvent aisément se généraliser à l'audition et au toucher.
Le chercheur doit se garder de traiter identiquement deux phénomènes de nature différente. Le classement des illusions par origine permet d'éviter une explication embrouillée, là où un principe général simple, concernant une fonction du système, est plus satisfaisante. Par exemple, l'illusion lunaire peut susciter et a suscité des quantités d'explications extrêmement ingénieuses, et qui toutes contredisent une partie de l'expérience, si on en postule l'origine dans l'atmosphère, dans la rétine ou dans la perception de la distance, au lieu de considérer l'illusion comme une des nombreuses instances d'une perception des contrastes.
Classification des illusions selon Richard Gregory Genre d'illusion Origine Physique Physiologique Cognitive Ambiguïtés Brumes, ombres Chambre d'Ames Mouvements apparents Cube de Necker Inversions figure/fond Distorsions Stroboscopie Déviation des rayons lumineux Adaptations géométriques Quinconces (Münsterberg) Effets de contraste Illusions géométriques Paradoxes Miroirs Désaccords entre canaux Effets consécutifs de mouvement Constances Figures impossibles Fictions Arcs-en-ciels Moirés Images consécutives Phosphènes Contours subjectifs Remplissage de la tache aveugle
Les limites entre les catégories sont sujettes à discussion. Particulièrement, celles entre le physiologique et le cognitif sont aujourd'hui indécises ; la psychologie s'intéresse à des systèmes très élémentaires et la physiologie étend son aire aux systèmes complexes. Les deux disciplines se rencontrent dans les neurosciences, pour lesquelles les illusions constituent des indices du mode de fonctionnement des sens.
Classification des illusions selon Jacques Ninio Catégorie Prototype visuel Prototype auditif Classification de Gregory Limites perceptives Disque de Benham Bruit du coquillage Physiologique - Fictions Contrastes Bandes de Mach Physiologique - Fictions Effet Rawdon-Smith Physiologique - distorsions Ségrégations, fusions Illusion d'Ouchi Fission mélodique Cognitive - Ambiguïtés Complétions Contours subjectifs Restitution auditive Cognitive - fictions Adaptations Effet Mc Collough Effet Zwicker Physiologique -fictions Constances Couleur de la lune Physiologique - distorsions Négligence de la phase Cognitive - paradoxes Repères, localisations La tête de pigeon Cognitive - paradoxes Illusion de Deutsch Physiologique - paradoxes Arbitrages entre canaux Illusions géométriques Cognitive - distorsions Dominance de l'image Cognitive - paradoxes
Illusions mémorielles
À ces illusions basées sur la reconnaissance erronée d'un phénomène présent, on peut ajouter les illusions où l'on conçoit le présent convenablement, mais on a l'impression d'un souvenir, pourtant impossible ; c'est le sentiment de « déjà vu ». Comme dans les illusions sensorielles, ce sentiment vient d'une confrontation problématique entre la mémoire et la réalité vérifiable.
Littérature et philosophie
Sigmund Freud, définit l'« illusion » comme une croyance qui structure la perception, sans égard à sa capacité de produire des effets.
Certains philosophes se sont attachés à « détruire l'illusion », impliquant par là même que la réalité, telle qu'ils la perçoivent, est objective, et que la description qu'ils en donnent n'est nullement l'objet d'une construction mentale. Cette tendance se retrouve chez des auteurs dont la pensée s'oppose par ailleurs en tout point : idéalistes et matérialistes, chrétiens et athées, scientistes et pragmatistes. Dans ces écrits polémiques, on peut considérer illusion, croyance, superstition, idéologie comme synonymes. Démasquer, dévoiler, montrer le caractère illusoire des apparences ou de la façon commune de les considérer est un ressort habituel de la rhétorique. C'est que ces « illusions » produisent des effets à condition qu'elles soient partagées. L'objet de la rhétorique est justement de leur faire substituer d'autres notions, plus favorables aux intérêts défendus par l'orateur.
Un autre courant, dont l'approche ressemble plus à celle des psychologues qui utilisent l'illusion sensorielle comme indice, étudie les croyances, superstitions, idéologies, comme reflets et instruments de maintien de la structure sociale. Selon l'expression de James Sully (en) « l'illusion doit être considérée comme l'état naturel des mortels ». Pour éviter l'aspect polémique lié à la figure rhétorique du dévoilement, l'anthropologie sociale peut désigner les illusions collectives comme « classifications communes ».