Le pape Benoît XIV, considéré comme l'auteur de la première encyclique
Une encyclique (en latin encyclia, de l'adjectif grec ἐγκύκλιος / enkuklios d'après κύκλος / kuklos, « cercle ») est une lettre adressée par le pape à tous les évêques, et parfois également à l'ensemble des fidèles. C'est une lettre « circulaire ».
Une encyclique se rattache à la mission d'enseignement du pape. Elle est destinée à exposer à ses destinataires la position officielle de l'Église catholique sur un thème précis. Le plus souvent, celui-ci se situe hors des questions d'actualité, ce qui donne à l'enseignement une portée générale et relativement permanente. Cependant, l'opportunité de traiter un thème particulier est souvent appréciée en fonction de l'état du monde ; les encycliques comportent parfois des mises en garde plus précises, voire des condamnations spécifiques.
Tout en étant formellement destinée aux évêques, la lettre s'adresse en pratique à tous les fidèles, confiés à l'enseignement de leur évêque respectif, et présente un intérêt pour toute personne intéressée par la position de l'Église. Néanmoins, sauf mention contraire, l'encyclique n'engage pas l'infaillibilité pontificale : un fidèle reste libre de ne pas suivre cet enseignement si sa conscience le lui dicte, tout en restant dans l'Église.
L'Église orthodoxe et l'Église d'Angleterre font elles aussi usage des encycliques.
Définition
À l'origine, le terme très générique (on pourrait traduire par « circulaire ») désigne la correspondance échangée par les évêques et les archevêques. Elle désigne ensuite n'importe quelle lettre envoyée spécifiquement par le pape. De nos jours, elle a pris un sens spécialisé qui la différencie des brefs, bulles — qui présupposaient que le pape était juge ou dispensait des faveurs — et autres documents pontificaux.
C'est une lettre de caractère solennel et universel, rédigée en latin avant d'être traduite dans un grand nombre de langues. Elle est envoyée aux patriarches, archevêques et évêques de l'Église universelle, en communion avec le Siège apostolique, portant sur un point de doctrine ou de morale.
Il existe des exceptions, consacrées par l'usage, au recours au latin. Ainsi, on appelle encyclique :
« Au milieu des sollicitudes », lettre du 29 février 1892 adressée en français par Léon XIII aux évêques de France, au sujet du Ralliement ;
« Une fois encore », lettre du 6 janvier 1907 de Pie X dans le cadre de la séparation de l'Église et de l'État en France, condamnant l'expulsion des évêques, des curés et des séminaristes des palais épiscopaux, des presbytères et des séminaires, et renouvelant le refus du statut des associations cultuelles ;
« Non abbiamo bisogno », lettre du 29 juin 1931 de Pie XI condamnant le fascisme italien ;
« Mit brennender Sorge », lettre du 21 mars 1937 de Pie XI condamnant le nazisme
« Laudato Si'" », lettre du 18 juin 2015 de François (pape) sur les questions environnementales et l'écologie humaine (écologie "intégrale").
Les encycliques n'ont pas pour objectif de définir de nouveaux dogmes. L'encyclique Ubi Primum de Pie IX (2 février 1849) précéda la promulgation du dogme de l'Immaculée Conception. Elles ont plutôt pour but de rappeler la doctrine catholique, analyser une situation ou exalter une figure jugée exemplaire, comme la Vierge Marie ou un docteur de l'Église (par exemple Thomas d'Aquin dans Æterni Patris).
On considère généralement que la première encyclique, au sens moderne, est celle de Benoît XIV, Ubi Primum, sous-titrée Epistola encyclica et commonittoria ad omnes episcopos (Lettre encyclique et comminatoire, adressée à tous les évêques), du 3 décembre 1740. On nomme une encyclique d'après les premiers mots du texte latin.
Quelques encycliques du XIX au XXI siècle
L'encyclique est un moyen de communication très utilisé par l'Église depuis la fin du XIX siècle. On peut citer, parmi les encycliques les plus importantes : Rerum Novarum (doctrine sociale de l'Église, revisitée tous les 10 ans, Centesimus Annus (mise à jour pour le centenaire de Rerum Novarum), Populorum Progressio, et Fides et Ratio, dernière encyclique du deuxième Millénaire.
Voici une liste plus complète par ordre chronologique :
Pie IX
Ubi nos, 15 mai 1871, contre la Loi des Garanties
Quod nunquam, 5 février 1875, contre le Kulturkampf
Quanta Cura, 8 décembre **, accompagnant le Syllabus
In suprema Petri sede, 6 janvier 1848, sur les Églises orthodoxes et l'unité de l'Église
Qui Pluribus, 9 novembre 1846, sur le rationalisme et l'infaillibilité
Léon XIII
Providentissimus deus, novembre 1893, sur les études bibliques
Rerum Novarum, 15 mai 1891, sur la question du syndicalisme et des ouvriers, et de façon plus générale sur la doctrine sociale de l'Église
Humanum Genus, 1884, condamnant la franc-maçonnerie et les sociétés secrètes
Æterni Patris, 4 août 1879, sur Thomas d'Aquin et la théologie scolastique
Inscrutabilis, 21 avril 1878, sur les dangers de la société moderne
Annum Sacrum, 25 mai 1899, sur la consécration au Sacré-Cœur
Pie X
E Supremi Apostolatus 4 octobre 1903, première encyclique de Pie X
Ad diem illum laetissimum, 2 février 1904, deuxième encyclique de Pie X, sur la dévotion à la Vierge Marie
Vehementer nos, 11 février 1906, condamnant la loi de séparation de l'Église et de l'État en France
Acerbo nimis, 15 avril 1906, sur la catéchèse
Gravissimo Officii Munere, 10 août 1906, interdisant la formation d'associations cultuelles telles que prévues par la loi de séparation de l'Église et de l'État en France
Une fois encore, 6 janvier 1907, condamnant l'expulsion des évêques, des curés et des séminaristes des palais épiscopaux, des presbytères et des séminaires, et renouvelant l'opposition aux associations cultuelles
Pascendi, 8 septembre 1907, contre le modernisme
Benoît XV
Maximum illud, 30 novembre 1919, sur les missions
Spiritus Paraclitus, 15 septembre 1920, sur l'étude de la Bible
L’objet de sa première encyclique sera de calmer les tensions provoquées par la crise moderniste.
Pie XI
Studiorum Ducem, 29 juin 1923, sur le thomisme
Maximam Gravissimamque, 18 janvier 1924, rétablissement de relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège, acceptation des associations diocésaines et du compromis sur le statut juridique de l’Église de France
Quas Primas, 11 décembre 1925, sur la fête du Christ-Roi
Miserentissimus Redemptor, 8 mai 1928, sur l'importance des actes de réparation
Rerum Orientalium, 8 septembre 1928, sur l'œcuménisme
Casti Connubii, 31 décembre 1930, sur le mariage chrétien
Quadragesimo Anno, 15 mai 1931, sur la justice sociale, commémoration de Rerum novarum
Non abbiamo bisogno, 29 juin 1931, condamnation du fascisme
Divini Redemptoris, 19 mars 1937, contre le communisme
Mit brennender Sorge, 21 mars 1937, condamnation du nazisme
Pie XII
Haurietis Aquas, 15 mai 1956, sur la dévotion au Sacré-Cœur
Musicæ sacræ, 25 décembre 1955, sur la liturgie et la musique sacrée
Sacra Virginitatis, 25 mars 1954, sur le mariage et la virginité
Humani generis, 12 août 1950, sur quelques erreurs modernes en théologie et la philosophie
Mediator Dei, 20 novembre 1947, sur la réforme de la liturgie
Divino Afflante Spiritu, 30 septembre 1943, sur les études bibliques (exégèse).
Mystici Corporis Christi, 29 juin 1943, sur l'Église comme corps mystique du Christ
Summi Pontificatus, 20 octobre 1939, condamnant le nazisme et défendant l'égalité des hommes quelles que soient leurs races ou leurs religions
Jean XXIII
Pacem in terris, 11 avril 1963, sur la paix
Pænitentiam agere, 1 juillet 1962, sur le futur concile
Mater et magistra, 15 mai 1961, commémoration de Rerum novarum
Grata recordatio, 26 septembre 1959, sur le Rosaire
Sacerdotii nostri primordia, 31 juillet 1959, sur Jean-Marie Vianney, curé d'Ars
Ad Petri Cathedram (1959)
Paul VI
Humanæ vitæ, 25 juillet 1968, sur la régulation des naissances
Sacerdotalis Caelibatus, 24 juin 1967, sur le célibat des prêtres
Populorum progressio, 26 mars 1967, sur le développement des peuples
Mysterium Fidei (1965)
Ecclesiam Suam, 6 août **, sur le dialogue dans l'Église et hors de l'Église
Jean-Paul II
Ecclesia de Eucharistia, 17 avril 2003, sur l'Eucharistie dans son rapport à l'Église,
Fides et Ratio, 14 septembre 1998, sur les relations entre la foi et la raison.
Ut Unum Sint, 25 mai 1995, sur l'engagement œcuménique
Evangelium vitæ, 25 mars 1995, sur la valeur et l'inviolabilité de la vie humaine
Veritatis Splendor, 6 août 1993, sur l'enseignement moral de l'Église
Centesimus annus, 1 mai 1991, mise à jour de Rerum Novarum, sur les connaissances et l'organisation
Redemptoris Missio, 7 décembre 1990, sur la valeur permanente du précepte missionnaire.
Sollicitudo Rei Socialis, 30 décembre 1987, à l'occasion du vingtième anniversaire de Populorum progressio
Redemptoris Mater, 25 mars 1987, sur la place de la Vierge Marie dans la foi
Dominum et vivificantem, 15 mai 1986, sur l'Esprit Saint dans la vie de l'Église et du monde
Slavorum Apostoli, 2 juin 1985, à l'occasion du onzième centenaire de l'œuvre d'évangélisation des Saints Cyrille et Methode
Laborem Exercens, 14 septembre 1981, sur le travail
Dives in Misericordia, 30 novembre 1980, sur la miséricorde divine
Redemptor hominis, 4 mars 1979, sur la dignité humaine
Benoît XVI
Deus caritas est, 25 décembre 2005, sur l'amour et la charité
Spe Salvi, 30 novembre 2007, sur l'espérance et sur le jugement
Caritas in Veritate, 7 juillet 2009, sur la doctrine sociale de l'Église
François
Lumen fidei, 5 juillet 2013, sur la foi. Cette encyclique a pour particularité d'avoir été rédigée en grande partie par Benoît XVI, bien que publiée sous le pontificat de François.
Laudato si’ (Loué sois-tu), 18 juin 2015, traitant de l'écologie.