Adoubement de Lancelot, Miniature d'Évrard d'Espinques tirée du Lancelot en prose, BNF Fr.116, 1475.
La chevalerie est une institution militaire féodale rassemblant les combattants à cheval, puis les nobles, et à laquelle on accédait par la cérémonie de l'adoubement. Le terme chevalerie, désignant le corps des chevaliers, la cavalerie noble ou la noblesse de souche, est un dérivé du mot cheval, attesté en ancien français dès le XII siècle. Le terme sous-entend dès l'origine une forte distinction entre les chevaliers, combattants professionnels d'élite montés à cheval, et les paysans et bourgeois, souvent considérés comme médiocres combattants, qui fournissaient la masse de l'infanterie et, plus tard, de l'artillerie. Ces qualités prêtées aux chevaliers feront très tôt du mot chevalerie un synonyme de hardiesse et de générosité.
La chevalerie a peu à peu développé ses valeurs et ses coutumes propres, sous l'influence notamment de l'Église et de la « courtoisie » (la « fin'amor ») des troubadours et trouvères, eux-mêmes fréquemment issus de la noblesse. D'une fonction militaire au service de la noblesse terrienne, la chevalerie est devenue une fraternité, puis un groupe social, enfin une institution. Certaines traditions sont remarquables, notamment la cérémonie de l'adoubement. Les vertus traditionnelles de la chevalerie, vues par le prisme de la littérature, sont de nobles sentiments tels la piété, l'humilité, la bravoure, la courtoisie, la foi et l'honneur.
Les chevaliers sont des personnages souvent présents dans les romans fantasy puisant leurs sources dans les grands cycles légendaires, la matière de Bretagne (Légende arthurienne) et la matière de France (cycle des chansons de gestes carolingiennes).
Définition
Il y a quatre sortes de chevalerie :
la chevalerie régulière,
le chevalerie militaire,
la chevalerie honoraire,
la chevalerie sociale.
« La chevalerie reguliere, est celle des Ordres Militaires où l'on s'engage de prendre un certain habit, de porter les armes contre les Infidèles, de favoriser les Pèlerins allant aux lieux Saints, et de servir aux Hôpitaux où ils doivent être reçus. La Militaire est celle des anciens Chevaliers qui s'acquéroit par des hauts faits d'armes. On les appelloit Milites dans les anciens titres. Les Princes même se saisoient recevoir Chevaliers ; on leur ceignoit l'épée, et on leur chaussoit les éperons dorés. L'Honoraire est celle que les Princes confèrent aux autres Princes & aux premiers de leur Cour. La Sociale enfin est celle qui n'est point autorisée qui se forme dans quelques circonstances & qui ne subsiste plus après. »
Histoire
Le XIIet surtout leXIII siècle furent sans doute les siècles d’or de la chevalerie. Celle-ci se structurait comme une véritable classe avec ses codes, ses valeurs et son mode de vie. Au bas-Moyen Âge, les adoubements se firent moins nombreux et, parallèlement, la cavalerie perdit sa primauté sur les champs de bataille, du fait de la réutilisation de nouvelles tactiques (formations compactes de piquiers) ou de la mise au point de nouveaux armements (arcs longs); les batailles de Courtrai et de Crécy furent à cet égard révélatrices de la vulnérabilité de la cavalerie lourde utilisée isolément. Si l'alourdissement des armures des cavaliers et des montures put, un temps, pallier ses faiblesses, la diffusion des armes à feu sur les champs de bataille dès la seconde moitié du XV siècle porta un coup fatal à la chevalerie comme force militaire.
Parallèlement, le titre de chevalier se banalisait, étant acquis, moyennant finances, par les bourgeois enrichis des villes devenues prospères, et ne devenait plus guère qu’un terme honorifique. Cependant, à la même époque apparaissaient les ordres de chevalerie au rôle essentiellement politique.
Origines
Statue équestre d'un chevalier du XV siècle.
Ulrich von Liechtenstein (Codex Manesse).
Aux alentours de l'an mille, le terme latin miles (guerrier) se répand. Il désigne alors les hommes d'arme (bellatores) par opposition aux religieux qui prient (oratores ) ou aux paysans qui travaillent (laboratores). Ce combattant se caractérise donc par le fait qu'il est un guerrier. L'homme d'arme à cheval ne sera désigné par le terme eques signifiant cavalier que vers le début du XII siècle (par opposition aux soldats à pied, les milites pedites. À l'époque où le système féodal se répand, la seigneurie en est la structure de base. C'est un système devant maintenir l'ordre et la justice et ayant pour centre le château fort. À Papia, le château vit en grande partie par les droits qu’il a attirés, provenant de l’ancien tonlieu de Léou. Les terres de la famille seigneuriale sont gardées par sept chevaliers, les premiers chevaliers connus dans le sud de la France, mentionnés en 1029.
Le chevalier est un guerrier appartenant à la maison du seigneur : celui-ci doit s'entourer d'un groupe de soldats professionnels qui l'aident à maintenir l'ordre et à protéger les habitants de la seigneurie. Ils participent ainsi au maintien du système féodal et reçoivent du seigneur une solde ou des terres. Dès le XI siècle, miles devient synonyme de vassus (ou vassalus), le vassal. Le chevalier est bel et bien le serviteur armé du châtelain : il fait ses premières armes contre les ennemis du seigneur ou les paysans (les non-nobles, c'est-à-dire les vilains) rebelles. Il participe au respect de la justice et des coutumes.
Rôle de l'Église
Chevalier faisant la cour à sa dame.
À ses débuts, la chevalerie n'était nullement valorisée par l'Église comme le précise Jean Flori. Si elle soutenait entièrement les chevaliers partant en croisade, elle dénonçait ceux qui risquaient leur vie non pas pour Dieu mais pour de la gloire. L’Église a fortement contribué à influencer la chevalerie et à modifier ses valeurs, ses devoirs. L'Église a ainsi assuré la rémission des péchés à tous les chevaliers désirant combattre les infidèles en Terre sainte. Les Croisades ont donc joué un rôle central dans la réconciliation entre l'Église et la chevalerie. Il était désormais possible à partir du XII siècle, notamment lors de la première croisade prêchée par Urbain II en 1095 d'être chevalier et de combattre pour Dieu. Pour elle le problème s'est réellement posé avec les Templiers qui cherchaient la reconnaissance de l’Église.
Depuis la prise de Jérusalem, un semblant de paix existe en Palestine. Des bandes de « grands ou petits chemins », des incursions sarrasines, font régner une insécurité constante. Une grande partie des croisés étaient rentrés au pays après la conquête, il existe bien une soldatesque, mais trop souvent limitée aux villes, les chemins nécessitaient des déplacements en groupe. L'augmentation des dispensaires et leur dispersion était un problème pour les pèlerins malades et pour les Hospitaliers.
Suivant Guillaume de Tyr, Hugues de Payns, un baron champenois, faisant très certainement partie des chevaliers du Saint-Sépulcre dès 1115, propose à Baudouin II, roi de Jérusalem, la création d'une communauté des « Pauvres Chevaliers du Christ » pour assurer la sécurité des routes. Lors du concile de Naplouse, en 1120, ces « chevaliers » sont invités à reprendre les armes. La nouvelle confrérie est installée par Baudouin et Gormond de Picquigny, patriarche de Jérusalem, sur l'ancienne mosquée al-Aqsa, dite aussi, temple de Salomon. Ils tiennent de là leur nom de miles Templii, les chevaliers du Temple, les Templiers.
Très vite ces chevaliers, qui prononcent les vœux d'obéissance, de pauvreté et de chasteté, mais qui combattent efficacement les infidèles, posent problème au regard des principes de l'Église ; ces « chevaliers du Christ » sont en état de péché les armes à la main. Hugues fait appel à son parent, l'abbé de Clairvaux, pour intercéder auprès du pape. Bernard de Clairvaux compose De laude nove militie dans laquelle il développe l'idée de malicidium, de malicide en tuant le mal en l'homme et non l'homme. Hugues reprend ces propos dans sa lettre Christi militibus qu'il soumet, en janvier 1129, au concile de Troyes qui approuve le nouvel ordre.
Ces derniers sont en effet des « nouveaux chevaliers » car ce sont des croisés permanents, sortes de « des moines-soldats ».
Essor au XII siècle
Cavalerie franque.
La chevalerie qui se forme dans la deuxième moitié du XI siècle se définit réellement à partir des caractéristiques suivantes : elle constitue tout d'abord une catégorie sociale à part entière voire une « catégorie socio-professionnelle ». Cette dernière se situe socialement au-dessous de la noblesse. Elle rassemble tous ceux qui n'ont « ni la notoriété d'un lignage noble, ni la richesse d'un grand propriétaire terrien, ni le droit de ban d'un sire ».
En d'autres termes, est chevalier un homme qui n'est pas issu de la noblesse d'un point de vue héréditaire, qui ne possède pas de richesses, que ce soit en terres ou en argent, enfin qui n'a pas le pouvoir de convoquer des vassaux à son service ni de commander, de contraindre, de convoquer l'ost (droit de ban). Cependant, un chevalier doit pouvoir se procurer ses armes, l'armement caractéristique du chevalier étant coûteux, composé de la lance et de l'épée pour le XI siècle. Par ailleurs, le chevalier combat à cheval, ce qui peut paraître insignifiant mais qui a en réalité de l'importance car un cheval coûte cher et constitue de ce fait une marque de prestige, de richesse, de supériorité.
Au début du XII siècle, par le prestige qui leur est associé et le coût de leur équipement, les chevaliers tendront à être associés de plus en plus à la noblesse. C'est une évolution importante car il marque l'essor des châtelains soutenus par leurs chevaliers, concurrençant et affaiblissant le pouvoir royal. La chevalerie et noblesse tendent à se confondre, cette nouvelle caste va progressivement se distinguer, se démarquer comme un groupe social à part, avec ses propres valeurs et normes mais aussi grâce à un mode de vie particulier, une certaine idéologie basée sur le courage et l'honneur, emprunte des valeurs chrétiennes, qu'elle revendique et défend. En outre, ce groupe social va progressivement devenir un idéal à suivre, un modèle.
L'accès à la chevalerie constitue un bon moyen pour connaître une ascension sociale. Cependant, cette promotion n'est pas systématique. Le titre de chevalier pouvait se perdre si le chevalier en question était malade par exemple et que par conséquent, il ne pouvait plus assurer sa fonction militaire. En outre, le chevalier pouvait avoir subi des blessures graves durant une bataille ou un affrontement et ne plus pouvoir combattre par la suite. De fait, il perdait son statut et était petit à petit oublié de la société. Au cours du Moyen Âge, les chevaliers se sont rapprochés et unifiés durant les combats, à la guerre, et ont fini par former un véritable ordre social à part.
Ascension sociale progressive
Stitching the Standard. Tableau d'Edmund Blair Leighton. Cette femme coud un étendard pour un chevalier avant son départ à la guerre.
Pendant les tournois, les chevaliers s'affrontaient pour gagner du prestige et de la renommée et espérer connaître une ascension sociale par un mariage avec la fille d'un seigneur par exemple. Aussi, par ce facteur d'union entre membres de la chevalerie et de la noblesse, un processus de fusion s'est opéré au cours du Moyen Âge entre la chevalerie et la noblesse, si bien qu'il devenait de plus en plus difficile de distinguer les deux ordres, les deux ensembles. Mais ce processus majeur dans l'histoire de la chevalerie s'est opéré sur plusieurs siècles, ce fut un long et lent processus qui a abouti à une véritable réunion, une assimilation des deux groupes sociaux à la fin du XII siècle. Ce processus a eu lieu lors de ce qu'on appelle la Renaissance du XIIe siècle: au cours de ce siècle, la chevalerie tend de plus en plus à se confondre avec la noblesse dirigeante, et s'affirme comme un modèle par son prestige, sa cohésion en tant que groupe.
Cette chevalerie, contrairement au mythe faisant du chevalier un être mal dégrossi qui balance entre la brutalité de sa fonction et la rudesse de son milieu, témoigne par ailleurs d'un intérêt grandissant pour les manifestations littéraires, en particulier pour les poèmes les plus distrayants à la création desquels certains s'essaient même (tel Wolfram von Eschenbach, auteur de Parzival ou les chevaliers itinérants que sont les troubadours comme Gui d'Ussel, Guillaume IX), ou encore l'histoire, en tout cas celle de leur propre lignage (ainsi les comtes de Guînes font rédiger leur histoire par le magister Lambert d'Ardres). Ces chevaliers lettrés apprennent dès leur enfance à lire en latin dans le psautier de leur mère puis lisent les classiques latins, ce qui leur permet de parler de littérature avec les clercs savants et les incite à réprimer leur violence (tel le chevalier Gervais de Tilbury qui devient juriste). De même, la poésie et la courtoisie polissent ce chevalier, allant jusqu'à le rendre plus charitable envers son prochain.
Au XIII siècle, du point de vue militaire, la chevalerie va progressivement imposer sa prépondérance sur les champs de bataille, et cela dès le milieu du XI siècle, tout particulièrement en France. En effet, les chevaliers deviennent les combattants, les guerriers par excellence, l'élite de l'armée, un ordre militaire qui bâtit sa renommée sur ses exploits et victoires militaires. Son action se révèle de plus en plus décisive lors des batailles ; c'est elle qui décide de la victoire ou de la défaite. Par conséquent, son prestige en est rehaussé. La bataille de Bouvines qui se déroula le 27 juillet 1214 est un bon exemple pour illustrer cette idée. En effet, l'action de la chevalerie décida en grande partie de la victoire française. Mais cette place centrale qu'occupe la chevalerie sur le champ de bataille s'appuie sur un passé qui les prédisposait déjà à s'imposer. En effet, dès l'époque carolingienne, la cavalerie tenait une place centrale dans l'armée. Les rois francs, dès Charles Martel, avaient privilégié l'utilisation de la cavalerie lors des affrontements. De fait, la chevalerie était encline à s'imposer par la suite comme un ordre social à part.
Âge d'or
Le dilemme de Bohort - il choisit de sauver une jeune fille plutôt que son propre frère Lionel.
La chevalerie s'épanouit tout particulièrement au cours du XIII siècle dans toute l'Europe Occidentale. C'est aussi l'époque où l'image du chevalier modèle paré de toutes les vertus propres à la chevalerie se développe beaucoup grâce aux nombreux écrivains et poètes qui glorifient dans leurs textes les valeurs chevaleresques. Ainsi se dégagent des figures emblématiques tel que Guillaume le Maréchal au XII siècle, Ulrich von Liechtenstein au XIII siècle ou encore Bertrand du Guesclin et Geoffroy de Charny au XIV siècle. Ces chevaliers incarnent des valeurs communes, des comportements et des mentalités caractéristiques de la chevalerie, à savoir la valeur guerrière, l'audace, la soif de gloire, le souci de la réputation, le sens de l'honneur, le respect des promesses et de l'engagement personnel mais aussi la largesse, la prouesse, la courtoisie. Cette dernière vertu est devenue progressivement indissociable de la chevalerie. Les Chevaliers de la Table Ronde jouèrent un rôle majeur sur les mentalités des chevaliers qui les considèrent comme les modèles par excellence de la chevalerie.
Sceau des Templiers.
Par conséquent, ils sont pris pour exemples et imités dans leurs exploits. Guillaume le Maréchal fait ici figure de chevalier exemplaire. Son ascension fulgurante malgré son origine modeste, ses nombreuses victoires lors des tournois le firent désigner comme « le meilleur chevalier d’Occident ». Les chansons de gestes qui deviennent très populaires aux XIIetXIII siècles glorifient les chevaliers et les élèvent au niveau de héros. Le lien féodal entre le chevalier et le seigneur est également très présent dans les chansons de geste.
Le service vassalique est au cœur des devoirs chevaleresques. La largesse est l'une des autres vertus que se doit d'exercer un chevalier. Elle est considérée comme venant d'en haut, autrement dit une valeur noble et même royale à l'origine. Elle consiste pour le chevalier à redistribuer des richesses de toutes sortes, à faire des dons de chevaux, d'étoffes précieuses par exemple. Le chevalier se doit d'être généreux. Cet idéal s'oppose à la bourgeoisie qui, obtenant de plus en plus de pouvoir au cours des XIII siècle et XIV siècles et se rapprochant des rois, est vue comme un concurrent pour la chevalerie.
Caractéristiques et vie
Apparition des chevaliers
Tous les chevaliers n'étaient pas « guerriers à plein temps »: il existait même des chevaliers-paysans autour de l'an mil, vivant en bande dans de grosses maisons fortes. Le chevalier fréquente souvent son suzerain et adopte un train de vie presque similaire tout en restant moins fastueux, et est souvent lui-même seigneur d'une terre modeste. La chevalerie a été pour certains hommes du début du XI siècle un ascenseur social, mais une fois l'agrégation entre cet ordre et la noblesse consommée, moins d'un siècle après, ce ne sera plus le cas. À l'inverse, nombre de chevaliers sont par la suite issus de familles nobles : ils en sont les cadets célibataires et sans héritage, voire les bâtards reconnus par un père noble, seuls les fils aînés héritant alors. Au début du XIII siècle, des législations royales de France, d'Allemagne et d'autres royaumes d'Europe disposent que l'on ne peut accéder à l'honneur chevaleresque que si l'on est soi-même de lignée chevaleresque, fixant légalement la règle suivie par tradition depuis déjà près de deux siècles. Au fur et à mesure des progrès techniques à la guerre, la vie chevaleresque a un prix économique de plus en plus important. Au XII siècle, l'équipement de base du chevalier (cheval, heaume, haubert, épée) représente le revenu annuel d'une seigneurie moyenne de 150 hectares. Trois siècles plus tard, l'équipement nécessaire engloutit le produit du travail de 500 hectares.
Cérémonie de l'adoubement
The Accolade par Edmund Blair Leighton (1853-1922).
L'adolescent, le bachelier, fils de chevalier, accède lui-même à ce titre et à cet état après un apprentissage et une cérémonie appelée adoubement. Avant l’adoubement, vers l’âge de sept ans, il est placé chez un seigneur qui sera son parrain. Il y gravit tous les degrés de l'éducation qui vise à en faire un guerrier : le galopin (il nettoie l’écurie), le page (il s’occupe des chevaux, est au service de la dame du château, suit un entrainement équestre, apprend à chasser) et enfin l'écuyer ou le damoiseau (il aide les chevaliers au tournoi et à la guerre, et il a l'immense privilège de lui porter son écu). Vers 17-21 ans, il passe l’adoubement, cérémonie officielle à laquelle de nombreux nobles assistent et qui consiste à consacrer un homme comme chevalier du roi. L'adoubement, qui marque le passage de l'état d'écuyer à celui de chevalier, a lieu en général en septembre ou en octobre. La nuit précédent son adoubement, le chevalier passe une nuit de prière dans une chapelle en compagnie de son parrain, revêtu d'une tunique blanche, avec une croix rouge, le blanc symbolisant la clarté et le rouge symbolisant le sang que le chevalier est prêt à verser. Puis le seigneur organise une fête dans son château, à laquelle les vassaux du roi sont conviés. Au fond du château, sur une estrade, le chevalier était prêt à se faire adouber chevalier. Agenouillé, le bachelier prête à haute voix le serment des chevaliers, une main sur l'Évangile ; ses armes de chevalier lui sont ensuite remises par son seigneur et parrain, bénies par l'Église qui encadre la cérémonie. Une fois revêtu de son équipement, il s'agenouille à nouveau pour recevoir l'accolade.
Jean II adoubant des chevaliers, enluminure des XIVetXV siècles, BNF.
Après la cérémonie, on organise des tournois auxquels se joignent les chevaliers adoubés et les vassaux du seigneur et des banquets pour célébrer l'occasion. La cérémonie de l'adoubement confère à celui qui le reçoit un pouvoir principalement militaire puisqu'il obtient le droit de ban (rassemblement de l'ost, autrement dit de l'armée) pour partir en campagne militaire mais également un caractère plus politique et judiciaire puisqu'il accède à la fonction de gouvernement des hommes soumis à sa juridiction, à son pouvoir. L'Église a aussi voulu donner une portée idéologique à cette cérémonie sans toutefois y parvenir pleinement. L'adoubement assure l'admission dans la militia, c'est-à-dire la chevalerie. La remise des armes a une importance majeure car elle signifie pour le chevalier certains devoirs et fonctions à respecter. En effet, la remise de l'épée signifie pour le chevalier l'exercice de la force armée, à savoir le maintien de la paix et de l'ordre public mais aussi le soutien et la protection de l'Église et des faibles, la fonction religieuse tenant une place centrale dans l'exercice des fonctions du chevalier. Enfin, être chevalier, c'est aussi défendre le royaume contre les ennemis extérieurs, souvent assimilés aux païens. Ce caractère religieux de l'adoubement est très prononcé. Les chevaliers ainsi que leurs armes sont bénis par les ecclésiastiques. Les rites de l'adoubement tiennent également un caractère religieux, par exemple la veillée de prières qui précède la cérémonie ou encore un bain rituel. En résumé, les chevaliers sont au service de Dieu, de leur seigneur et de leur roi. À cette idéologie morale s'ajoute une tonalité nobiliaire. En effet, en devenant chevalier, on entre dans un ordre plus élevé, proche de l'aristocratie. De fait, le chevalier tend à s'élever dans la société et à se rapprocher de la noblesse et donc à s'éloigner du peuple.
Mode de vie
Chevalier en cotte de mailles, musée du Louvre.
Le chevalier est un professionnel de la guerre, un soldat au service d’un seigneur. Il est propriétaire d'armes offensives et défensives (voir la liste dans l'article armement) qu'il lui faut souvent remplacer après un combat. Il doit donc gagner de l'argent. Les tournois et les joutes sont une manière de gagner de l'argent et de s'amuser. Les guerres au Moyen Âge ne sont pas si fréquentes. De plus, on ne se bat pas l'hiver, ni pendant les périodes saintes (Avent, Carême). L’Église a défini depuis la fin du X siècle des paix de Dieu et des trêves de Dieu pour limiter les guerres. Le tournoi est donc une occasion de remporter une rançon, de confisquer chevaux et armes des chevaliers vaincus. Il est aussi une façon de ne pas perdre la main pendant les périodes sans combat et de se distinguer auprès d'une dame. Les chevaliers aiment les tournois car ils s'y amusent et se sentent dignes d'y mourir l'épée à la main. Le chevalier vit souvent au château et doit être fidèle à son seigneur, lorsqu'il est vassal. Néanmoins, il ne faut pas confondre vassal et chevalier.
Devoirs
Cavaliers du XI siècle, Tapisserie de Bayeux.
La courtoisie est d'abord l'ensemble des qualités du noble, le comportement élégant d'un chevalier ; puis vers 1150, la courtoisie se charge d’une dimension amoureuse, incarnée dans le personnage de Lancelot. L'amour courtois est chanté par les troubadours et les trouvères. Le chevalier est au service de l’Église, il doit mettre son épée au service du pape (croisades) et des faibles : il devient alors chevalier du Christ (Miles Christi). Les qualités de chevalier idéal sont la prouesse, la générosité et la fidélité. Cependant, ces devoirs sont secondaires par rapport aux devoirs envers le suzerain. Ses « vertus » sont idéalisées par la littérature courtoise au service d'une classe, la noblesse, une forme de gouvernement dans laquelle le pouvoir est officiellement détenu par une élite (parfois par une caste, une classe, une famille, voire quelques individus). Le chevalier est avant tout un homme d'armes, un homme de guerre, de prouesse.
Au Moyen Âge, la noblesse doit justifier l'ascendance divine de son pouvoir par une conduite irréprochable. Son rôle est la protection des terres et l'exercice de la justice, et il a un devoir d'équité. En particulier, à la guerre il faut se battre héroïquement, au corps à corps. Le combat est proscrit le dimanche et la fuite entraîne une déconsidération profonde. Ainsi les revers militaires de Jean sans Terre contre Philippe Auguste entraînèrent la promulgation de la grande Charte en 1215 (qui instaurait une monarchie contrôlée par un parlement de barons). Une mésaventure similaire faillit arriver aux Valois en 1357 après les désastres de Crécy (1346) et Poitiers (1356): Étienne Marcel, prévôt des marchands de Paris, fut à deux doigts de réussir à imposer une monarchie contrôlée par la grande ordonnance, votée le 28 décembre 1355 et promulguée le 3 mars 1357.
Équipement
Armures du XVI siècle exposées au Metropolitan Museum of Art à New York.
L’équipement étant aussi lourd que coûteux, les chevaliers ne pouvaient enfiler leur armure tout seuls, et le prix de l’équipement était à lui seul un obstacle de taille à l’époque où tout le monde pouvait devenir chevalier. Vers le XIV siècle, chaque pièce de l’équipement a commencé à avoir une valeur symbolique :
Les heaumes (casques) : l'espérance, l'intelligence, la pudeur.
Les cuirasses (plastrons) : la prudence, la piété, la protection contre le vice et l'erreur.
Les gantelets : la justice, la science, le discernement, l'honneur.
Les épées, forgées durant plusieurs semaines par un forgeron du château : la force, la puissance et le sacrifice, la destructrice du Mal, de l’injustice et de l’ignorance, la constructrice - quand elle maintient la paix de Dieu et répartit la justice -, le lien du Ciel et de la Terre (car elle est le symbole polaire et axial) et de beaucoup d’autres encore.
Les écus (boucliers) : la foi, le conseil, la protection contre l'orgueil, la débauche et l'hérésie.
La lance : la charité, la sagesse, la droite vérité.
Le haubert (cotte de maille)
Les pièces qui forment l'armure complète sont agencées avec habileté. Le poids de l'armure atteint 20 à 25 kg, ce qui correspond au poids moyen de l'équipement porté par les soldats de toutes les époques. Il y a une quinzaine de pièces principales et une centaine au total. La qualité de la monture jouait aussi un rôle important car, démonté, un chevalier équipé se déplaçait plus lentement et perdait une grande partie de la force d'impact de la charge. Cependant il n'est pas rare que par choix stratégique au cours d'une bataille les chevaliers chargeaient à pied.
Tournoi et chevalerie
Scène de tournoi.
Les tournois, véritables compétitions sportives par excellence pour les chevaliers mais aussi un moyen de s'entraîner à la charge frontale pour les batailles à venir, étaient très appréciés par la société médiévale, à l'inverse de l'Église qui y était réticente. Ils permettaient aux chevaliers d'acquérir toutes sortes de gains : prix, chevaux, harnois (armure du chevalier), armes, argent. Les tournois enrichissent les chevaliers vainqueurs mais ces derniers recherchent et obtiennent parfois la gloire, le prestige et la renommée à travers ces affrontements. C'est pour les chevaliers un moyen de promotion sociale efficace.
Les tournois ressemblent véritablement à des situations de guerre, pour mettre les chevaliers dans les conditions de la prochaine bataille auxquels ils devront participer. Mais ces compétitions revêtent la forme de spectacles. Les joutes quant à elles, se distinguent des tournois dans le sens où elles n'opposent que deux adversaires. Moins meurtrières, ces dernières apparaissent vers le XIII siècle et sont de fait mieux acceptées par les autorités civiles et religieuses.
Dans la culture
Littérature
Chrétien de Troyes, Yvain ou le chevalier au lion
Les Romans de la Table Ronde,
Elena Arseneva, une série dans la Russie du XI siècle, Éditions 10/18.
Armand Cabasson, Par l'épée et le sabre, Éditions Thierry Magnier.
Armand Cabasson, La Dame des MacEnnen, Éditions Glyphe.
Viviane Moore, La saga du normand Tancrède, 10/18.
Franck Senninger, La Belle à la Licorne, Éditions Glyphe.
Cinéma