Vente de bétail aux enchères en Nouvelle-Galles du Sud en 2007.
L'enchère est définie par le Dictionnaire de l'académie française comme une « offre d’un prix supérieur à la mise à prix, ou au prix qu’un autre a déjà offert, en parlant des choses qui se vendent ou s’afferment au plus offrant. » Au Québec, est utilisé le terme d’encan, sans le sens péjoratif qu'il a en Europe.
Une mise aux enchères est une déclaration de mise en concurrence pour un objet ou un service précis pour un prix ou un contrat que l'on se propose de remplir et qui doit être meilleure (ou égale au minimum pour la première) que la précédente avec un incrément minimum.
Procédure
La procédure est effectuée par un tiers, par exemple un commissaire-priseur ou un site internet spécialisé. Les enchères sont triées prioritairement par prix (l'offre la plus élevée arrive en premier), puis par quantité, puis par heure de placement, ce qui détermine l'adjudication.
Lots exposés dans une salle des ventes avant leur mise aux enchères.
S'il y a un prix de réserve qui n'est pas atteint, la procédure est annulée. Très souvent un délai supplémentaire est accordé pour faire une surenchère.
Il y a des enchères spéciales, par exemple, lorsque les prix suivent un changement vers le moindre et l'adjudicataire (donc unique) est celui qui accepte la transaction aux conditions de ce moment.
Il existe également une variante assez ancienne : la vente à la bougie, encore pratiquée de nos jours.
Les appels d'offres pour les contrats publics de concessions, travaux, prestations ou fournitures obéissent à un système d'enchères sous enveloppe cachetée.
Régulièrement des records sont battus dans les grandes sociétés internationales de vente aux enchères comme Sotheby's pour des objets de renommée particulière.
Il existe également des enchères immobilières où sont vendus des biens immobiliers (comme les ventes judiciaires, les ventes notariales et les ventes des domaines)
Historique
Les enchères sont des mécanismes d’allocation de ressources rares dont l’utilisation remonte à l’antiquité. On reconnaît généralement que l’histoire des enchères a débuté vers 500 av. J.-C. avec le marché du mariage de Babylone. Dans ces écrits, Hérodote décrit des enchères au premier prix aux cours desquelles la main des jeunes femmes était accordée au plus offrant.
Vente d'esclaves et de domaines aux enchères à la Nouvelle-Orléans (gravure publié en 1842).
Dans les sociétés contemporaines, les mécanismes de vente aux enchères ont été traditionnellement utilisés pour les produits de l’agriculture et de l’élevage. Parallèlement, les objets pour lesquels il est difficile d’estimer les coûts de production et ceux pour lesquels les coûts ne reflètent pas la valeur font également l’objet de ventes aux enchères (comme c’est le cas pour les objets et œuvres d’art).
Plus récemment, les enchères sont devenues un mode d’achat et de vente de plus en plus répandu. Ainsi les ventes aux enchères concernent des biens ou des services de plus en plus complexes comme des concessions pétrolières, des licences de téléphonie mobile ou encore des fréquences radio et des biens ayant une valeur de plus en plus grande.
Finalement, Internet a permis de rendre plus accessible ce mode d’achat et d’étendre considérablement la diversité des produits mis en vente. Ces sites internet permettent aux utilisateurs inscrits de vendre ou d’acheter des biens d’une grande diversité, qu’ils soient neufs ou usagés.
Différents types
Il existe désormais une très grande diversité de produits « enchère » disponibles. On peut aujourd’hui en recenser plus d’une vingtaine différents. Interprété dans son sens large, le terme « enchère » désigne tout mécanisme structuré de concurrence visant à déterminer qui obtient l'article en jeu, et souvent à quel prix en amenant les acheteurs à révéler, directement ou par offres successives, leur prix de réservation pour cet article. On parle d'un couple règle d'allocation - règle de paiement. Si l'on inclut les mécanismes d'enchères doubles (où les deux côtés du marché sont en concurrence), tous les marchés boursiers deviennent du coup désignés par ce terme. Selon les stratégies des postulants et la nature de l’information qu’il s’agit de révéler, les différents formats d’enchère ont des performances variables.
Cependant, il n'existe théoriquement que 4 formats d'enchères différents sur le fond :
Enchères à un tour sous pli cacheté (au premier prix)
Aussi appelées enchères scellées au premier prix. Chaque enchérisseur remet une enchère (offre) indépendamment des autres sous enveloppe ou électroniquement au commissaire-priseur, qui examine toutes les offres. L’objet est attribué au plus offrant, qui paie son montant proposé. C'est un processus « statique » puisqu'il ne comporte qu'un tour. De plus, une des caractéristiques de ce type d'enchère est que l'enchérisseur ne reçoit aucun signal (offre) de la part des autres enchérisseurs. C'est le procédé classique utilisé lors des appels d'offre pour les marchés publics entre autres ou encore pour les droits minéraux et de forage dans les terrains de l'État.
Enchères à un tour sous pli cacheté (au second prix)
Ou enchères scellées au second prix, enchère philatéliste, enchère de Vickrey.
À partir de la même procédure, l’objet est adjugé au plus offrant, qui paie le prix offert par le deuxième meilleur enchérisseur. Il s'agit là aussi d'un processus « statique » à un tour sans émission de signal de la part des enchérisseurs. Le système Vickrey conduit les acteurs à proposer leur juste prix pour l'objet en jeu. Bien que fréquemment associé à Vickrey, ce type d'enchère est utilisé pour la vente de timbres de collection aux États-Unis depuis le XIX siècle. Ce système est également utilisé par Google dans la vente de ses espaces publicitaires sur sa page de recherche.
L'enchère ascendante
L'enchère ascendante ou enchère anglaise est certainement la plus populaire et la plus commune à tous : le commissaire-priseur commence avec un prix de départ, chaque intéressé offre dès lors successivement un prix plus élevé, tout en respectant une surenchère minimum (aussi appelé incrément minimal). Le processus d'élimination s'arrête lorsqu'il ne reste plus en lice qu'un candidat. Le bien est attribué au candidat « le plus offrant » (s'il atteint ou dépasse le prix de réserve fixé par le vendeur) soit au prix que ce dernier a proposé « au premier prix », soit à un prix de cession égal à l'offre la plus élevée parmi celles des candidats éliminés, appelé « deuxième prix » (version japonaise). Ce dernier cas est donc stratégiquement analogue à celui d'une enchère fermée au second prix. L'enchère ascendante est le processus courant dans les salles de ventes.
L'enchère descendante
Dans cette procédure, aussi nommée enchère hollandaise, le commissaire priseur annonce un prix de départ supérieur à l'offre maximale de tous les candidats, puis l’abaisse par étapes, jusqu'à ce qu'un candidat se déclare preneur. Le bien est alors attribué à ce candidat « le plus offrant », à un prix de cession égal à son offre, appelé « premier prix » (les offres des autres candidats restent, dans cette procédure, inconnues). Ce type d'enchère rend la procédure d'allocation très rapide, c'est pourquoi elle est utilisée pour la vente de denrées périssables, comme, par exemple, aux Pays-Bas pour la vente des fromages et des fleurs coupées et au Japon sur les marchés au poisson. L'enchère descendante est, d'un point de vue stratégique, équivalente à l'enchère fermée au premier prix étant donné qu'un enchérisseur se fondera sur son évaluation initiale du montant auquel il désire faire l'acquisition pour remettre son enchère (offre) comme c'est le cas dans l'enchère fermée au premier prix.
L'enchère du type all pay
Dans ce type d'enchère, l'ensemble des compétiteurs doivent payer leur offre mais seul le participant ayant remis la meilleure offre remporte l'enchère.
Les formats répandus
Enchère inversée
L'enchère la plus connue du grand public est celle où un vendeur offre un produit/service pour lequel des acheteurs font des offres compétitives. Il existe un style d'enchère qui fonctionne de manière opposée: l'enchère inversée. C'est l'acheteur qui prend l'initiative en diffusant les détails de son cahier des charges vers une cible de fournisseurs qui, s'ils sont intéressés, disposent alors d'un temps limité pour faire des propositions de prix de manière compétitive. L'information donnée au fournisseur quant à son positionnement dans l'enchère peut être de deux types : (1) visibilité totale, le fournisseur a connaissance des offres effectuées par ses concurrents en tout anonymat ou (2) classement, le fournisseur est informé qu'il est le premier ou pas le premier, ou qu'il est 1, 2, 3 etc.... Les formats d'enchère vus précédemment (anglais, hollandais ...) sont également applicables. Ainsi dans l'enchère inversée au format anglais, les différents fournisseurs-vendeurs font des offres descendantes alors que dans l'enchère inversée hollandaise les prix sont incrémentés par l'acheteur. Récemment l'enchère anglaise a été utilisée (abusivement) pour des postes à pourvoir. En effet, une entreprise proposait un poste avec une rémunération maximale. Sur base de celle-ci, les différents candidats devaient enchérir à la baisse, le salaire le moins élevé 'remportant' le poste.
Une mauvaise publicité a été faite autour de l'enchère inversée en raison de l'usage abusif d'acheteurs professionnels qui ne se focalisent que sur le prix et qui voient dans l'enchère un instrument pour des performances rapides portées à leur crédit. Pour pallier cet inconvénient les Directions d'Achat responsables ont mis en place l'enchère multicritère ou multi-paramètres qui permet la prise en compte, non seulement du prix, mais de nombreux autres paramètres quantifiés au travers d'une formule de « cout total d'acquisition ».
Enchère sur Internet
Internet a donné un regain de vie aux enchères. Initialement mises en œuvre par des « commissaires priseurs » appartenant à des institutions ou sociétés spécialisées, elles peuvent maintenant, grâce à Internet, être montées ou utilisées par un large public.
À la vente, certains sites marchands proposent aux particuliers de mettre aux enchères des articles sur un site web internet. Dans ce cas, il s'agit le plus souvent d'une application de l'enchère de Vickrey où le vainqueur paie en réalité le prix proposé par le second (à un delta près). Mais tous les types de format sont potentiellement utilisables.
À l'achat, les Places de Marché sont des sites Internet spécialisés dans l'aide à la fonction achat des entreprises. Elles peuvent être soit « publiques », propriété d'un actionnaire indépendant, soit « privées », propriété d'une entreprise ou d'un club d'entreprises. Elles proposent de nombreux outils parmi lesquels des outils pour mettre en ligne des enchères inversées.
On retrouve aussi sur Internet des enchères à un sou qui se rapprochent plus de la loterie que de l'enchère classique.
Enchère au cadran
Le principe de l'enchère au cadran est celui de la traditionnelle vente au cadran : les prix décroissent toutes les heures et le premier qui fait acte d'achat remporte la vente.
Enchère à la bougie
Le principe de l'enchère « à la bougie » est celui d'une vente aux enchères ascendantes classique, la bougie servant à déterminer la dernière enchère. À chaque enchère, une bougie est allumée. Si elle s'éteint sans nouvelle enchère, une seconde bougie est allumée, puis une troisième. À son extinction, le dernier enchérisseur emporte l'objet. Les bougies en question sont suffisamment petites pour que le temps de combustion soit réduit.
Enchère anglo-hollandaise
Voir Klemperer 2002
Théorie économique des enchères
Vente de lots de cerises aux enchères en Rhénanie-Palatinat en 1957.
Lorsque quelqu'un désire acheter ou vendre un bien ou un service par un mécanisme d’enchère, elle désire maximiser le gain qu’elle en retirera. On peut se demander quel mécanisme d’enchère permet de maximiser ce gain ou encore d’assurer l’efficacité allocative. L’intuition seule ne permet pas de répondre à cette question et il est nécessaire de procéder à une analyse formelle des mécanismes d’enchères.
Cette démarche de formalisation est relativement récente. C’est Milton Friedman qui a publié en 1955 la première étude conceptuelle majeure dédiée aux enchères. Selon celle-ci, la stratégie des enchérisseurs est fondée sur une stratégie de « mise » définie qui permet de maximiser son espérance de gain compte tenu de la valeur qu’il accorde au bien mis en vente. Cependant, la portée de cette première étude est limitée car elle suppose que les autres enchérisseurs n’élaborent pas de stratégie et que leur comportement actuel est déterminé par leur comportement passé.
La théorie des jeux permet de dépasser ces limites et de prendre en compte le comportement stratégique des acteurs et les interactions entre stratégie individuelles. Développée dans les années 1940 et appliquée pour la première fois à la théorie des enchères par William Vickrey en 1961, la théorie des jeux permet de décrire l’enchère comme un jeu et d’analyser le comportement des participants. On est dès lors en mesure d’identifier un équilibre stratégique du jeu qui détermine la stratégie optimale pour chaque joueur, étant donné les stratégies des autres joueurs.
La publicité des enchères
Au XIX siècle, les commissaires-priseurs se préoccupent déjà de la publicité des ventes, que favorise l'essor de la presse. On y découvre la Gazette de l'Hôtel Drouot, l'hebdomadaire traitant de toutes les ventes aux enchères.
En plus des affiches apposées directement sur la façade du bâtiment, les ventes sont annoncées dans des journaux spécialisés tel que Le Gratis (créé en 1834) et qui était distribué dans les diligences parisiennes. Il deviendra par la suite Le Moniteur des ventes.
En 1999, des écrans d'ordinateurs placés à tous les étages de l'actuel Hôtel des ventes informent les visiteurs des expositions et ventes du jour.
Aujourd'hui, les ventes aux enchères se font de plus en plus sur internet.
Dérives systémiques
Quel que soit le système d'enchère, on observe un grand nombre de dérives à la fois du côté des opérateurs de ventes ainsi que du côté des acheteurs qu'ils soient institutionnels, professionnels ou encore particuliers.
Dérives d'opérateurs de ventes
Le 20 janvier 2014, le Conseil des ventes, organisme disciplinaire, condamne la société Europ Auction et deux de ses commissaires priseurs à une interdiction d'exercer allant jusqu'à 9 mois pour une série de manquements et d'infractions (enchères fictives, publication de faux résultats, non-paiement des vendeurs...) révélateurs des difficultés de la profession à assurer la transparence de ses activités.
Enchères fictives
Les enchères fictives, appelée aussi "bourrage", sont une atteinte au droit des acquéreurs. Elles consistent pour un commissaire priseur à faire monter le prix d'un bien entre un acheteur réel et un ou plusieurs acheteurs fictifs, ou à faire monter le prix entre uniquement des personnes fictives. Cette pratique ancienne trouve différentes justifications. La première est de lutter contre la pratique de la "Révision". Pour autant cette justification est très régulièrement contestée par les acheteurs témoins de cette pratique d'enchère fictives déloyale systématisés dans de nombreux hôtel de ventes. Les commissaires priseurs usant de cette pratique font, entre autres, usage d'enchérisseurs fictifs par téléphone. Il y a également l'expression "C'est pris à la table à X €, en voulez-vous", signifiant que le commissaire priseur joue à la fois le rôle d'adjudicateur et de commissionnaires ayant eu une offre d'achat avant la vente par un ou plusieurs acheteurs fictifs. L'opérateur peut également faire semblant d'observer des signes dans la salle : les clients étant placés face au commissaires, il leur est difficile de savoir si un enchérisseur a réellement fait un geste. La législation varie d'un État à l'autre. Pour autant, cette pratique reste très largement autorisés. La jurisprudence est très clémente et donne raison à l'opérateur. Par exemple, concernant la vente d’une œuvre de Max Ernst, le jugement a retenu que le commissaire-priseur « qui a implicitement reconnu avoir recours à des tiers connus pour animer les enchères, était, vis-à-vis des acquéreurs, libre d’adopter l’attitude la plus conforme aux intérêts de son client, et de déterminer conformément à son mandat si les enchères étaient suffisantes. »
Cessions de gré à gré
Dans de nombreux pays, et notamment en France depuis la loi du 20 juillet 2011, les commissaires priseurs peuvent, suivant leur volonté, vendre un bien qui leur est confié, soit en le soumettant aux enchères lors d'une vente publique ayant fait suite à une publicité préalable, soit en procédant à une vente de gré à gré. La vente de gré à gré est une simple vente entre l'opérateur de vente et un acheteur de son choix. Les règles diffèrent d'un État à un autre. Pour autant, les dérives demeurent similaires dans les faits. La vente de gré à gré est normalement prévue dans un mandat signé par le vendeur, ce qui autorise le mandataire à user de cette procédure s'il le souhaite. La dérive consiste ici à favoriser un ou plusieurs acheteurs au détriment d'autres acheteurs potentiels qui ignoreront l'existence de cette vente. Les acheteurs favorisés pourront ainsi acheter le bien moins cher, puisqu'il n'y a plus de risques de surenchères et de concurrences. La publicité de la vente reste peu visible quand bien même un procès verbal doit être dressé si la vente de gré à gré se finalise. Le vendeur est quant à lui lésé également puisque son bien se vendra moins cher et par la signature du mandat, il ne peut plus faire appel.
Manquement aux obligations publicitaires
Quel que soit le pays, tout opérateur de vente aux enchères à des obligations légales de publicité. Avant toute vente aux enchères, le commissaire-priseur doit faire de la publicité sous toute forme qu'il juge appropriée. Il peut recourir à la presse, à la radio ou à un ou plusieurs autres médias. Cette publicité comprend une description des biens à vendre, la date et le lieu de la vente, les garanties financières de l'organisme chargé de la vente, la dénomination sociale...
Absence de publicité
Pour qu'une vente aux enchères ait des chances de réussir, il est important de réunir le plus d'acheteurs potentiels pour un même bien. L'opérateur de la vente aux enchère doit faire de la publicité par tout moyen qu'il jugera utile. Il va de soi qu'une vente ayant fait l'objet d'une publicité faible voire inexistante, rend les chances de réussite de la vente peu effective. Un acheteur potentiel peut ignorer l'existence de la vente et donc perdra toute occasion de porter une enchère. L'opérateur des ventes en procédant de la sorte privilégie les acheteurs de son choix en les informant de l'existence de la vente. Certains commissaires priseurs ont tendance à créer une distinction hiérarchique dans la qualité de leur vente en parlant de "vente courante et de "belle vente". Les ventes dites courantes sont en principe de qualité moindre en raison des biens à vendre qui sont de faible valeur ou qui n'ont pas un prestige particulier. Une vente courante fait l'objet d'une couverture publicitaire beaucoup plus faible. Il y a là aussi le fait de placer un bien de grande valeur dans une vente courante et non pas dans une belle vente, en vue là encore d'écarter un certain nombre d'acheteurs.
Publicité erronée ou trompeuse
Bien que les législations divergent, pour autant un certain nombre de règles tendent à s'harmoniser. En matière de publicité des ventes aux enchères, on trouve comme constante l'obligation de donner une description précise des biens à vendre. L'opérateur de vente doit indiquer l'état général de l'objet, préciser s'il est abîmé, s'il a fait l'objet d'une restauration, indiquer s'il s'agit d'un bien neuf ou d'un bien ancien, préciser si le vendeur est un professionnel ou un particulier... Il s'agit là d'une des dérives les plus pratiqués par certains opérateurs de ventes aux enchères. Tout bien ayant fait l'objet d'une restauration substantielle doit avoir une description précise de son état d'origine et des démarches réparatrices entreprises. Plus couramment à titre d'exemple, beaucoup de peinture font l'objet de retouche à la suite de destructions partielles (manques, toiles percée...), des sculptures retouchées, des verreries recoupés... Autre dérive du même ordre et qui ne porte plus sur l'état mais sur la nature du bien. L'exemple type est la contrefaçon. Les opérateurs de ventes peuvent parfois, fermer les yeux sur des peintures ayant une fausse signature, ou sur une copie d'un bronze ayant fait l'objet d'une refonte (la datation étant très complexe et difficilement vérifiable par l'adjudicataire)... Afin de se prémunir de tout recours judiciaire, certains opérateurs acceptent de prendre certains biens à la vente en sachant qu'il s'agit sûrement de faux en ajoutant sur leur catalogue la mention "Attribué à" ou "Attr. à". En procédant ainsi, l'opérateur laisse entendre qu'il s'agit surement de tel artiste de tel type de bien mais qu'il préfère rester prudent sur l'authenticité et qu'il se peut qu'il se trompe. Cette mention, est donc double elle signifie qu'un bien est l’œuvre d'un artiste ou peut-être pas et qu'en dernier chef, c'est à l'adjudicataire qu'en revient la responsabilité de juger de quoi il s'agit. Cette ambivalence prête à confusion et favorise les abus comme la vente de faux fonds d'atelier...
Ventes montées
Les « ventes montées » sont des ventes préparées, organisées et réalisées, non pas par un opérateur de vente (commissaire priseur, notaire...), mais par un tiers (un marchand, un expert, un particulier...) qui en assure le suivi. Les ventes montées sont l'une des dérives les plus courantes. Elles sont en partie tolérée dans les faits, bien que les législations les interdisent formellement. Ce type de ventes recouvre plusieurs réalités.
Ventes montées pour fausser les cotations
Catalogue de la vente d'une collection de timbres-poste en 1982.
Une vente montée peut servir à créer et à fausser les cotations des artistes, qu'ils soient morts ou vivants. De nombreuses sociétés de cotations, se basent sur les procès verbaux dressés par les opérateurs de ventes pour constituer leur base de données. Les résultats de ventes servent ainsi de références vénales.
Un sculpteur peut ainsi utiliser les hôtels de ventes pour se créer une cote en enchérissant sur ses propres œuvres, directement (par téléphone en général) ou indirectement, par le biais d'une tierce personne. Cet artiste ne devra payer que les frais de l'opérateur, puisqu'en tant que vendeur il récupère une partie du fruit de la vente. Il est à la fois acheteur et vendeur. Un tiers peut donc, en association de fait avec un opérateur, organiser des ventes aux enchères et influencer le cours des cotations. Ce tiers peut être un artiste, comme dans l'exemple précédent, ou un marchand n'ayant pas pignon sur rue. Ce dernier se constitue un ensemble de biens à vendre correspondant de préférence à une thématique (vente d'art russe, de peinture maritime, de meubles de style...). Une fois cet ensemble suffisamment dense pour permettre le montage d'une vente, le tiers se charge de préparer la vente (constitution et impression de catalogues, définition des prix, des descriptions, des moyens publicitaires...) et en assure le suivi. Puis lors de la vente, ce tiers fait en sorte que les prix pour une partie de ces biens soient très élevés, grâce à des enchères fictives, soit par la complicité de l'opérateur, soit par des enchères d'hommes de paille. Il est ainsi possible, en répétant l'opération sur plusieurs ventes successives, de créer de toute pièce un marché avec une cote fictive qui augmente le prix des biens, qu'il est ensuite possible de revendre directement, ou lors de ventes montées sans enchères fictives, les enchères étant cette fois portées par des investisseurs ou des collectionneurs non avertis.
Ventes montées pour exercice illégal de profession
Dans certains États, comme la France, l'exercice d'une profession d'opérateurs de ventes aux enchères est réglementée. Un tiers qui souhaiterait exercer ce type de professions doit posséder des titres, des diplômes, des habilitations... Or l'accession à ces professions est très rigide dans certains territoires. Ainsi un tiers peut décider d'organiser des ventes, pratiquer tous les actes habituellement effectués par un opérateur de ventes. Puis le jour de la vente, laisser l'opérateur adjuger les différents lots mis aux enchères, ce qui en apparence laisse penser que la vente est le fruit unique du travail de l'opérateur. Le tiers peut dans ce cas être condamné pour exercice illégal de la profession d'opérateur de ventes (commissaire priseur...).
Ventes montées en tant qu'outil de promotion publique
La concurrence dans le monde des ventes aux enchères est importante. La marchandise tend à se raréfier. Beaucoup d'opérateurs de ventes ont tendance à se spécialiser dans un domaine (instruments de musique, véhicules, spiritueux...) afin de se créer une notoriété. De même que certains opérateurs tentent de s'imposer sur un territoire et jouent la proximité. La pratique de ventes montées permet pour tous ces opérateurs d'obtenir une forme de promotion publique sur un marché. Un tiers qui par exemple va réunir un ensemble de lots ayant trait par exemple à la Provence, au bord de mer (globe, compas, meubles provençaux...) et qui monte sa vente sous couvert d'opérateur. Le tiers exerce illégalement des prérogatives normalement dévolue à un opérateur de ventes. L'opérateur de vente accepte de couvrir cette vente montée, qui lui offre une notoriété dans le domaine visé par la vente. Il n'est pas rare de voir ainsi plusieurs fois dans l'année ou sur plusieurs années, les mêmes biens régulièrement remis en vente, passant pour être vendus à chaque fois. En effet, certains tiers organisent non pas une mais plusieurs ventes montées en utilisant et en enrichissant régulièrement leur ensemble de biens. Ce phénomène, avec l'avènement de l'outil internet, rend particulièrement visible cette pratique frauduleuse. On peut, par exemple, constater qu'un tableau a été mis en vente dans une grande ville au mois de janvier, puis le revoir en vente quatre mois plus tard dans une autre salle des ventes en province, avec à chaque fois des résultats de ventes. Cela permet à certains opérateurs, notamment les plus faibles sur le marché (certains opérateurs en province...) de présenter des biens en vente, sans quoi ils ne pourraient pas organiser de ventes aux enchères normales, car n'ayant pas assez de clients prêts à leur confier des biens à la vente.
Manquement d'informations sur les frais
Les frais sont, la plupart du temps, calculés d'après un pourcentage fixe. Les acquéreurs et vendeurs peuvent ignorer qu'à ces frais, ils vont devoir, suivant les législations en vigueur dans leur pays, devoir s’acquitter d'un droit de suite pour les ayants droits (l'artiste ou ses descendants). Il y a également de plus en plus, des droits de garde à payer pour les acquéreurs ce qui est une contrainte de prix car si l'acheteur ne peut pas prendre le lot le jour même, il devra alors s'acquitter de frais supplémentaires pour le stockage du bien acquis. Enfin, avec l'émergence des nouvelles technologies, les enchères se font également par voie informatique, les opérateurs classiques (commissaires priseurs...) de ventes ajoutent environs 3 à 4 % de frais supplémentaires.
Autres dérives d'opérateurs de ventes
Voici une liste non exhaustive de dérives pratiquées par certains opérateurs.
Non-paiement des vendeurs dans les délais prévus
Acquisition par l’expert de l'opérateur d’un lot qu’il avait estimé;
Mise en vente d’un bien appartenant à l’expert de l'opérateur qui l’a estimé;
Vente de biens neufs non définis comme tel;
Non-tenue des procès-verbaux de vente;
Fausse provenance et faux certificats d'authenticité de lots
Blanchiment d’argent.
Dérives d'acheteurs
La révision
Avant qu'une vente aux enchères débute, un groupe d'acheteurs désigne l'un d'entre eux pour enchérir sur un bien. Si celui-ci remporte les enchères, il paye les frais imposés par l'opérateur des ventes (commissaires priseurs...), puis, dans un second temps, il rejoint son groupe d'acheteurs pour relancer à huis clos les enchères au sein de ce groupe. De cette façon, les frais d'achat sont réduits pour l'acheteur qui remporte les enchères à huis clos, puisqu'il ne paye pas la totalité des frais imposés par l'opérateur des ventes. Cette pratique illégale permet aussi à ces groupes d'acheteurs de fausser la concurrence en diminuant artificiellement le nombre d'enchérisseurs.
La folle enchère
Un fol enchérisseur, l'adjudicataire, se rend acquéreur d'un bien qu'il ne voulait pas, soit parce qu'il n'a pas les fonds nécessaires à son achat, soit parce qu'il s'est trompé en pensant acheter un autre bien lors d'une même vente. La législation varie suivant les pays : pour la France c'est l’article L321-14 du Code de commerce qui édicte la procédure. Généralement le bien acquis peut être remis en vente par le vendeur. Le fol enchérisseur doit ensuite payer la différence entre le prix de la première adjudication et le prix de la seconde, à condition que le bien soit vendu. Des dommages et intérêts peuvent également être réclamés auprès des tribunaux.
La folle enchère d'apparence anodine est en réalité une pratique beaucoup plus complexe. Certains utilisent cette pratique pour de nombreuses raisons, parfois louables, parfois moins. Cela va de l'association de malfaiteurs utilisant un homme de paille irresponsable juridiquement (sous tutelle...) qui fait des achats non provisionnés, jusqu'aux acheteurs souhaitant acheter un bien qu'ils savent faux ou dont la présentation est délictueuse (omission dans les descriptions de vices cachés, de manques, de restaurations...) de la part d'un opérateur de ventes, ce qui permet à l'adjudicataire de réclamer des dommages et intérêt).