La Brodeuse, tableau de Franz Xaver Simm.
Costume finement brodé d'Auguste III de Pologne (XVIII siècle)
La broderie est un art de décoration des tissus qui consiste à ajouter sur un tissu un motif plat ou en relief fait de fils simples, parfois en intégrant des matériaux tels que paillettes, perles voire pierres précieuses.
On peut la diviser en trois grandes classes :
manuelle : faite à la main, au moyen d'une aiguille ou faite au crochet ; semi-mécanique : à la machine ; mécanique : industrielle.
Techniques
Le point compté et le point de croix
Point de croix sur bande de toile Aïda
Exemple d'abécédaire
Broderie traditionnelle hmong sur tissu de coton.
Point de croix
Le point compté désigne toute forme de broderie où le motif se constitue en comptant une quantité spécifique de points sur une trame régulière, par opposition à la broderie libre. Peut-être la forme la mieux connue de point compté s'appelle le point de croix. Très répandu, et depuis longtemps dans le monde entier, ce point de broderie en forme de « x » est réalisé d'après un modèle appelé diagramme, parfois sur une toile pré-imprimée pour l'apprentissage ; l'un des types d'ouvrages les plus courants est l'abécédaire.
Dans ce cas, le dessin d'une grille est reproduit en comptant les points sur une toile à trame régulière (étamine de lin, de coton, canevas ou toile Aïda).
Pour réaliser les points de croix, il existe deux méthodes :
la traditionnelle, où chaque croix est formée l'une après l'autre : xxx xx xxxx par exemple.
la danoise, où l'on brode d'abord les demi-points du dessous à l'aller et les demi-points du dessus au retour pour former les croix : /// // //// à l'aller puis \\\\ \\ \\\ au retour, ce qui donne le même résultat : xxx xx xxxx.
Dans les deux cas, il est important que tous les points se fassent dans le même sens. Dans un même ouvrage, les deux techniques peuvent être mélangées : la manière danoise pour les séries de point en ligne, la manière traditionnelle pour les points isolés.
Le choix du tissu à broder se fait en fonction du résultat final souhaité et de la dextérité du brodeur. Les débutants préfèrent généralement une toile Aïda pour commencer, car elle offre une trame très régulière et un large maillage. Les toiles Aïda sont disponibles en plusieurs couleurs, les plus communes étant le blanc et l'écru. Le lin quant à lui est réservé aux brodeurs expérimentés, car il offre la trame la moins régulière. La broderie se fait alors en comptant les fils de la toile, en général deux fils de trame et deux fils de chaîne. Pour un rendu plus fin, les points peuvent se faire sur un seul fil. La toile de lin est le plus souvent non teinte, de couleur brunâtre.
Le point de croix peut également être réalisé sur un tissu standard, pour orner un vêtement le plus souvent. On utilise alors une toile « tire-fils », qui reproduit une trame légère. Cette toile est fixée sur le tissu du vêtement par quelques points de bâti ou par de la colle en bombe pour tissus. Une fois la broderie terminée, on tire sur les fils verticaux et horizontaux de la toile « tire-fils » pour les en extraire. La broderie est alors régulière quel que soit le tissu du vêtement sur lequel elle est réalisée.
Pour les grands ouvrages, la toile est tendue sur un métier à broder (ou un tambour à broder), ce qui permet de garder une qualité et une tension constantes.
Le fil utilisé le plus souvent est le coton mouliné, présenté en bobinettes appelées « échevettes ». Elles sont généralement composées de six fils de huit mètres de longueur. Plus de 500 couleurs sont disponibles et certains effets spéciaux existent, comme l'« effet lumière » (fil brillant) et l'« effet variation » (variation de teinte le long du fil en dégradé ou en harmonie).
Plusieurs grandes marques proposent des fils, des toiles et des kits à broder, dont DMC et Anchor. De nombreux livres et magazines proposent des diagrammes à reproduire.
Corinne Chambras-Gangloff, brodeuse et collectionneuse d'abécédaires en particulier, écrivain (elle préfère dire « écrivailleuse ») à ses heures, a proposé en 1991 de nommer « crucifiliste » le brodeur ou la brodeuse au point de croix.
Les œuvres en point de croix peuvent également incorporer d'autres types de point compté pour compléter le motif, notamment le point arrière, fréquemment utilisé pour former des lignes minces pour circonscrire les formes du motif ou ajouter des formes délicates comme de petites lettres, des effets de mouvement, les moustaches d'un chat, etc.
Le point Catherine de Medicis
Mis au point par Catherine de Médicis, il se répand en France au début du XVII siècle. Il est réalisé sur un tissu de coton assez épais et lâche, appelé "buratto". Les dessins représentent des feuillages, des grotesques ou des compositions géométriques. Le tracé se fait en deux temps, au point faufilure, puis au retour en changeant les points de manière à obtenir une broderie à deux lignes. On le pratique en Italie sous le nom de "punto Madama".
Le petit point
Une toile peinte à large maillage est remplie de petits points, de points de croix ou de demi-points pour remplir la grille peinte et devenir un tableau. Il s'agit d'un passe-temps masculin attesté dans la marine britannique.
La peinture à l'aiguille
Broderie régionale.
Passé empiétant
La broderie au passé empiétant imite l'aquarelle (Chine, Europe). Cette technique de broderie originaire de l'extrême-orient a pour but de reproduire des sujets - essentiellement botaniques et animaliers, voire mythologiques - avec la plus grande précision ; pour y parvenir, les brodeuses et brodeurs ont recours à la technique du fil unique. L'utilisation d'un seul brin, très souvent de soie, implique une charge de travail nettement supérieure. Les variantes de techniques sont nombreuses mais l'une des plus spectaculaires reste sans doute la broderie « double face » toujours exécutée en Chine. Aujourd'hui, elle compte plusieurs variétés : la broderie sur un seul côté, la broderie présentant de chaque côté les mêmes dessins et couleurs, la broderie aux dessins et couleurs différentes des deux côtés...
La broderie Xiang, un des plus célèbres artisanats de la province du Hunan, figure parmi les quatre fameuses écoles de cet art artisanal en Chine, avec l'école de Su (Suzhou, province du Jiangsu), celle de Yue (province du Guangdong) et celle de Shu (province du Sichuan). Cette forme de la peinture à l'aiguille implique que les deux faces soient strictement identiques d'où un travail totalement réversible. Toute la subtilité tient à l'art de cacher les points de départ et autres nœuds qui en temps normal sont toujours plus ou moins visibles à l'arrière de l'ouvrage.
En occident la peinture à l'aiguille connaît un regain d'intérêt significatif auprès du grand public.
La broderie en relief
Sous cette terminologie se rassemblent en réalité de nombreuses techniques dont le point commun est le relief important de l'ouvrage fini.
Outre la broderie au ruban, on peut citer le stumpwork, technique dans laquelle des éléments brodés séparément et éventuellement maintenus par de petits fils de fer sont fixés sur l'ouvrage, et la broderie brésilienne, où le relief est donné par l'association de points particuliers et d'un fil ayant, de lui-même, une certaine tenue.
La broderie au point de Beauvais
Le point de Beauvais est une technique de broderie au crochet connue depuis des siècles, il permet de faire des ouvrages magnifiques et solides assez rapidement lorsque vous maîtrisez la technique.
La broderie au ruban
Encore appelée broderie rococo, la broderie au ruban est une technique née en France au XVII siècle, dans laquelle on ne brode plus à l'aide de fils, mais à l'aide de rubans de différentes largeurs, souvent en soie.
Les points utilisés sont souvent ceux de la broderie au fil, mais il existe également des points spécifiques, où l'on exploite la largeur importante du ruban.
Après avoir été négligée durant des années, cette broderie revient à la mode, d'autant qu'elle a l'intérêt d'associer une technique relativement simple à un rendu particulièrement impressionnant, dans un style souvent un peu victorien.
Les jours
Les jours qui se subdivisent en jours à « fils tirés » et jours à « fils serrés ». Les techniques sont nombreuses et particulièrement conservées en Europe centrale.
Une autre technique, la broderie Hardanger, vient de l'Europe du Nord.
Blackwork
Blackwork
Aux XVIetXVII siècles des toiles de lin blanc étaient brodées avec de la soie noire. Motifs réguliers et réversibles, ces tissus servaient à la confection des vêtements.
Aujourd'hui le plus souvent sur étamine cette broderie sert à orner des petits ouvrages ou des broderies plus compliquées en jouant sur l'épaisseur des fils utilisés.
Broderie sur tulle
Broderie sur tulle
Imitation de la dentelle à l'aiguille, les motifs sont cernés au point de reprise puis rebrodés au point de bourdon ou de feston, ils sont reliés entre eux par des « roues » ou « araignées », puis le fond est découpé pour ne laisser apparaître que les figures qui pourront être remplies au préalable.
Cette broderie est exécutée en fil blanc sur tulle de coton, elle sert encore aujourd'hui à broder les coiffes des costumes traditionnels, notamment en Bretagne.
Broderie Renaissance ou Richelieu
Broderie renaissance
Sur toile de lin ou de coton, des figures au bord festonné sont raccordées entre elles par des brides, puis le tissu est découpé.
Dans la broderie Renaissance les brides sont simples, en broderie Richelieu, elles sont ornées de picots.
La broderie indienne Aari
La technique Aari est utilisée par des concepteurs occidentaux pour leurs créations d'accessoires et de vêtements.
La broderie Aari se pratique avec un cadre en bois, pouvant s'adapter à n'importe quelle longueur de tissu. Ce concept de métier à broder a évolué à partir du lit indien Khatia, encore utilisé dans les régions rurales.
Les motifs sont tracés directement sur le tissu. Ils s'organisent le plus souvent autour d'un grand motif figuratif central Nadir Shahi Booti.
La broderie chikan-kari
En plein essor au XIX siècle dans les villes alors bengali de Dhaka Bangladesh, Calcutta (Bengale) ou à Lucknow en Uttar Pradesh, ce type de broderie est fait en blanc sur blanc, sur un support de fine mousseline. Elle est encore largement utilisée de nos jours pour la décoration des cols des kurtas.
Broderie contemporaine
De nos jours, avec des techniques de plus en plus modernes, certaines sociétés peuvent broder sur tous supports des logos, des images, de plus en plus complexes en grande quantités et avec une grande rapidité. Les œuvres des célèbres brodeurs et créateurs François Lesage, René Bégué, dit Rébé, Miguel Cisterna sont notamment exposées au musée des arts Décoratifs de Paris. D'une part ils témoignent d'une maîtrise hors du commun de la si minutieuse technique,d'autre part les matériaux utilisés ne font pas seulement partie du registre du luxe, comme la soie et les fils en or, mais ils introduisent des matériaux inattendus : coques de moules, matériaux simples tels que strass ancien, éclats de jais, perles de bois, fils de cuivre, crin de cheval, raphia et paille.
Qualités
Ouvrage de broderie DMC édité en 1922.
Cette technique peut être aussi un loisir déstressant.
La broderie peut être utilisée pour apprendre les symétries, les échelles en mathématique de niveau élémentaire.
La broderie est également un objet d'étude pour les folkloristes et les historiens de l'Art, qui y voient l'un des principaux facteurs identitaires des anciennes provinces depuis le XIX siècle. C'est aussi un objet de collection, très recherché depuis le début du XX siècle.
De nos jours, la broderie industrielle se répand un peu partout dans le monde et même en Afrique. Par exemple, en Afrique centrale et plus particulièrement au Cameroun, cette discipline fut introduite en 1998 par la société Buetec Broderie Sarl et déjà la communication par l'objet a eu un nouveau visage dans la sous région et beaucoup la préfèrent de loin à d'autres marquages tels que la sérigraphie, le transfert et bien d'autres.
Fils et tissus
Broderie au point de croix (au cerceau)
Tissus à broder
Fil à broder contemporain, de coton
Galerie
Broderie au fil d'or
Broderie malgache
Manteau brodé d'or (Espagne)
Broderie au fil d'or (Espagne)
Détail (XVIII siècle)
Bibliographie
Daniel Schweitz, La Coiffe et son imaginaire dans le folklore de la Touraine, Saint-Cyr-sur-Loire, Éd. Alan Sutton, 2002 (ISBN 9782842538217).
Fanny Viollet et Christian Sarramon, L'Art du point de croix, 1997 (ISBN 9782842770273)
Francesca Bonadonna, Les Métiers de la mode dans la lexicographie française : le terme broderie au fil des siècles, Huitièmes Journées italiennes des Dictionnaires
Articles connexes
Crochet,
Dentelle,
Broderie Hardanger, Broderie chinoise
Broderie de Fontenoy-le-Château,
Hurel
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