Miroir de Calchas, musée du Vatican (croquis).
Fegato di Piacenza.
Transcription.
Massue votive
Un haruspice, ou aruspice, est un pratiquant de l'haruspicine, l'art divinatoire de lire dans les entrailles d'un animal sacrifié (notamment l'hépatoscopie : examen du foie censé représenter l'univers) pour en tirer des présages quant à l'avenir ou à une décision à prendre.
Étymologie
De l'étrusque haru, entrailles, et spicio, « je regarde », transcrit par haruspex en latin, art des haruspices.
Histoire
Dans l’Antiquité, l’haruspice interprétait la volonté divine en lisant dans les entrailles d’un animal sacrifié, viscères d'oiseaux, vésicules de volaille, foie de mouton. L’animal était rituellement abattu ; l’haruspice pouvait alors examiner la taille, la forme, la couleur, les signes particuliers de certains organes, généralement le foie, dont on a retrouvé des maquettes de bronze à usage didactique de ce type de divination, tel le foie de Plaisance en Étrurie, mais il existe aussi un exemplaire hittite provenant de Boghazkoi, et une version babylonienne. L'organe divisé en quatre parties correspondant aux quatre points cardinaux, chacune d'entre elle représentait la demeure de certaines divinités, invoquées, auxquels l'officiant demandait l'intercession dans les affaires humaines. L'animal abattu, la viande était rôtie et divisée entre les participants à la cérémonie au cours d'un banquet, les organes internes (exta, le siège de la vie de l'animal) cuits étaient jetés dans le feu du foyer en offrande aux dieux.
Il semble qu'il n'y ait jamais eu de femmes dans le collège des haruspices, ni à avoir jamais exercé cette fonction. Il y avait par contre des stryges, c’est-à-dire des sorcières ; celles-ci, comme en témoignent les Métamorphoses d'Apulée, étaient particulièrement nombreuses, et réputées, en Thessalie. Certaines magiciennes, telles Circé ou Médée, ou la Pythie de Delphes sont restées célèbres. L'un des devins les plus connus de l'Antiquité était Calchas. Tirésias, cité par Homère, en fut un également.
Les haruspices étrusques et la Rome antique
Les haruspices d’Étrurie se distinguaient du reste de la population par leur costume : ils portaient un manteau court bordé de franges (similaire à la peau de la bête sacrifiée), et non la toge étrusque (la tebenna), fermé par une fibule au niveau du cou, et un couvre-chef à large bord et au sommet pointu, attaché sous le menton car il était de très mauvais augure qu’il tombât durant les cérémonies, et, surtout, ils portaient leurs libri haruspicini et rituales (comme on le constate sur les sarcophages figurés des défunts haruspices).
Chez les Étrusques, les « haruspices fulgurateurs » pratiquent leur art divinatoire, appelé brontoscopie, sur la foudre et le tonnerre.
Ils furent consultés en privé depuis la conquête de l'Étrurie, et durant toute la durée de l’Empire romain. Le Sénat romain tenait la « discipline étrusque » en grande considération, et consultait les haruspices avant de prendre une décision, car, contrairement aux augures, ils pouvaient répondre à des questions complexes. Toutefois, dans son traité De divinatione, Cicéron critiqua durement l'examen des entrailles par les haruspices, jugeant contraire aux lois de la Nature la modification des viscères au gré des prédictions. L’empereur Claude étudia la langue étrusque, apprit à la lire, et créa un « Collège » de soixante haruspices, qui exista jusqu’en 408. Ceux-ci offrirent leurs services à Pompéianus, préfet de Rome, pour sauver la ville de l'assaut des Goths ; l’évêque chrétien Innocent, bien que réticent, accepta cette proposition, à condition que les rites restassent secrets. Elle dura pourtant tout au long du VI siècle ap. J.-C., la religion étrusque étant progressivement supplantée par le christianisme.
La profusion des haruspices à Rome, et des haruspices de villages, pour beaucoup de besoins de divinations privées, les faisaient parfois percevoir comme des charlatans : Caton disait que « deux haruspices ne peuvent pas se regarder sans rire ».
Bibliographie
M. Détienne, J.-P. Vernant, La Cuisine du sacrifice en pays grec, Gallimard, Paris, 1979
Dominique Briquel, « Remarques sur le sacrifice étrusque » in La Fête - La rencontre des dieux et des hommes, coll. Kubaba, éd. L'Harmattan, 2000.
Dominique Briquel, Chrétiens et haruspices : la religion étrusque, dernier rempart du paganisme romain, Presses de l’École Normale Supérieure, Paris, 1997.
Marie-Laurence Haack, Les haruspices dans le monde romain (Bordeaux : Ausonius, 2003).
Marie-Laurence Haak, L'habit fait le devin. Chapeaux à pointe et manteaux à fibule chez les Etrusques et les Romains ; Gerion, 2006, n° 24, p. 163-178
Santiago Montero, Política y adivinación en el Bajo Imperio Romano : emperadores y haruspices (193 D.C.-408 D.C.). Bruxelles, Latomus, 1991.
Articles connexes
Mythologie étrusque
Hépatoscopie
Exemplaires de fegati à Civita Castellana et au musée de la ville de Plaisance : le foie de Plaisance
Tagès
Titus Vestricius Spurinna est un haruspice célèbre pour avoir prévenu Jules César de se méfier des ides de Mars, avant son assassinat.