L'apologue est un discours narratif démonstratif et allégorique, à visée argumentative et rédigé principalement en vers dont on tire une morale pratique.
Histoire de l'apologue
C'est le grec Ésope qui est considéré comme le fondateur du genre. Cet ancien esclave, qui aurait vécu au VI siècle av. J.-C., a laissé quelques centaines de fables mettant en scène des animaux et développant une morale facile à comprendre. L'apprentissage des fables d'Ésope faisait partie de l'enseignement de base des jeunes grecs de l'Antiquité, et La Fontaine considère l'auteur comme « l'oracle de la Grèce » (Fables, II, 20). La tradition ésopique nous est aussi parvenue grâce à La Fontaine par le truchement du fabuliste latin Phèdre au I siècle et par l'humanisme au XVI siècle qui a donné des traductions et des imitations des fables antiques. Mais si La Fontaine reconnaît ce modèle, il s'approprie le genre de la fable pour lui donner des caractéristiques particulières.
Fables et paraboles antiques
L'Antiquité a connu deux formes essentielles d'apologue : les fables en prose du grec Esope (VI siècle av. J.-C.), en vers du latin Phèdre (I siècle ap. J.-C.) et les paraboles de l'Évangile. Les premières utilisent très souvent des animaux comme personnages. Les secondes mettent en scène des êtres humains à qui se trouve délivré un enseignement moral issu des paroles du Christ. À l'époque médiévale, le prosateur et secrétaire omeyyade puis abbasside Ibn al-Muqaffa' (m. en 756) composa également un recueil de fables intitulé Kalila wa Dimna.
Les fables à l'époque classique
Délaissée au profit du fabliau pendant le Moyen Âge, la fable connait un grand succès à l'époque classique : Jean de La Fontaine puise à toutes les sources antiques et à des sources orientales plus récentes - le fabuliste indien Pilpay - pour composer des textes dont la vocation éducative est clairement définie dans la préface. Au siècle suivant, Jean-Pierre Claris de Florian compose lui aussi des fables, mais ce genre semble avoir atteint son sommet avec Jean de La Fontaine ; et après le XVIII siècle, seuls quelques écrivains s'en inspirent, pour en faire des pastiches ou des parodies, comme Victor Hugo, Tristan Corbière et, au XX siècle, Jean Anouilh et Raymond Queneau.
Caractéristiques de l'apologue
Le transfert d'une idée dans un récit fictif à valeur symbolique permet de la rendre attrayante, l'apologue donne chair à des situations parfois lointaines ce qui permet une identification aux personnages : l'apologue séduit avant de faire réfléchir (voir l'expression latine "placere et docere", "plaire et instruire"). De plus, la brièveté du récit évite l'ennui. Le schéma narratif est élaboré pour mettre en évidence une idée, le récit est orienté selon l'axe à démontrer.
Formes et auteurs célèbres
Fable : La Fontaine, Esope, Phèdre, Florian
Conte : Voltaire, Charles Perrault, Les Frères Grimm, Andersen
Utopie : Rabelais, More
Parabole : Matthieu, Marc
Quelques apologues célèbres
Ésope, L'Aigle et la renarde, VI siècle av. J.-C.
François Rabelais, L'Abbaye de Thélème, L'Éducation, dans Gargantua, 1534
Savinien Cyrano de Bergerac, Histoire comique des États et Empires de la Lune, 1657
La Fontaine, la plupart de ses Fables, 1662
Charles Perrault, Le Petit Chaperon rouge, 1697
Fénelon, Les Aventures de Télémaque, 1699
Voltaire, Candide, 1759
Voltaire, L'Ingénu, 1767
Denis Diderot, Jacques le fataliste et son maître, personnage de Madame de la Pommeraye, 1796
Jacob et Wilhelm Grimm, Blanche-Neige, 1812
Victor Hugo, Le Dernier Jour d'un condamné, 1832
Alfred de Vigny, La Mort du loup, 1843
Anatole France, Le Procurateur de Judée, 1892
Alphonse Daudet, La Légende de l'homme à la cervelle d'or, 1869
Charles Baudelaire, Le Joujou du pauvre, 1869
Émile Zola, Le Forgeron, dans Nouveaux Contes à Ninon, 1874
Franz Kafka, La Métamorphose, 1915
George Orwell, La Ferme des animaux et 1984, 1945 et 1948
Dino Buzzati, Les Souris, 1954
Italo Calvino, Le Baron perché, 1957
Georges Perec, W ou le Souvenir d'enfance, 1975
Bernard Le Bouyer de Fontenelle, La dent d'or, dans Histoire des oracles , 1687
Franck Pavloff, Matin brun, 1998
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