Les dermatologues déconseillent les séances de bronzage (ou bain de soleil) prolongées.
Le bronzage est le phénomène par lequel la peau prend une couleur plus sombre en réaction à l'exposition à un rayonnement ultraviolet (UV) d'origine naturelle (comme le soleil) ou artificiel. Alors qu'une exposition modérée au soleil peut être bénéfique pour la santé, le bronzage, qui est dû à la production de mélanine par l'épiderme, traduit un mécanisme de défense naturelle en réponse à un excès de rayonnement, lequel peut avoir un effet délétère sur l'ADN des cellules. En effet, une surexposition à ces rayonnements, y compris artificiels, peut engendrer des brûlures (coups de soleil) et à long terme favoriser l'apparition d'un cancer de la peau. Pour une exposition prolongée, l'utilisation de crème solaire filtrant les rayons UV s'avère donc indispensable.
Dans les sociétés humaines, le bronzage est perçu différemment suivant les époques et suivant les cultures. Ainsi, jusqu'au XX siècle dans le monde occidental, le teint clair était valorisé. Mais depuis l'après-guerre, le bronzage est au contraire souvent recherché dans les sociétés occidentales, incitant à l'utilisation de lampes UV ou de produits colorants simulant un teint hâlé (autobronzant). Inversement, dans d'autres régions du globe les populations à teint naturellement hâlé ont tendance à valoriser la peau claire, notamment les femmes des nouvelles classes aisées (Afrique, Asie...) qui ont parfois recours à l’éclaircissement de leur peau. Par ailleurs, les individus diffèrent dans leur sensibilité à l'exposition au soleil et dans leur capacité à bronzer, notamment en fonction du degré de pigmentation de la peau.
Histoire et point de vue sociologique
Le bronzage passe par une exposition régulière aux rayons du soleil, en dépit de son inconfort. Il participe aussi à une érotisation des rapports sociaux.
Pendant l'Antiquité, l'exposition volontaire au soleil, déjà recommandée par Hippocrate, était préconisée dans le cas de l'héliothérapie. Cette pratique médicale était utilisée contre les maladies bactériennes et inflammatoires : la tuberculose sous toutes ses formes, mais aussi les maladies ostéoarticulaires (rhumatisme, arthrose, arthrite, etc.), respiratoires (asthme). On pensait qu'elle avait des vertus microbicide, cicatrisante, analgésique et stimulatrice de l'état général. L’héliothérapie en altitude est repérée dès 1888 par le D Paul Pouzet dans la lutte contre la tuberculose. En 1893, le 1 congrès international sur le tuberculose présente les techniques allemandes de sanatorium au monde médical.
Pour la classe aristocratique, il fallait avoir la peau blanche pour se différencier du peuple paysan à la peau naturellement tannée. La blancheur de la peau était alors synonyme de richesse et d’une bonne situation. Pour garder un teint clair les nobles ont appliqué sur leur peau des produits à base de plomb (notamment la céruse). Ces cosmétiques provoquaient la mort progressive par saturnisme. D'autres moyens pour conserver le teint clair furent l'arsenic, les vêtements couvrants, les poudres de riz et les parasols.
Au XIX siècle, en Occident, la mode pour les classes supérieures préconisait le teint pâle accentué ou rectifié si nécessaire avec un maquillage de poudre de riz. Il s'agissait de se distinguer de la classe laborieuse (cultivateurs, ouvriers du bâtiments, ...) qui, exerçant souvent son activité en plein-air, avait un teint hâlé.
En Europe du Nord, la mode de la peau claire se maintient jusqu'à la fin de l'époque victorienne. La révolution industrielle développe un monde ouvrier vivant dans les usines et ayant par conséquent un teint clair. L'aristocratie, par contre-coup, redécouvre les bienfaits du teint hâlé (sensualité, beauté) grâce au tourisme balnéaire : les bains de mer sur les plages excluent le bronzage au départ puis l'intègrent au début du XX siècle. Certaines pratiques sportives, privilèges des classes aisées, sont également un moyen d'exalter la peau bronzée. Les crèmes de protection solaire, remplaçant les graisses animales qui ont l'inconvénient de rancir, apparaissent en même temps que les grandes industries cosmétiques : Nivea, L'Oréal, où Eugène Schueller, agacé par ses coups de soleil lorsqu'il navigue sur son voilier l'Edelweiss en Bretagne, demandent aux chimistes d'inventer une huile solaire.
La Promenade (1875) tableau de Claude Monet. À la fin du XIX siècle, dans certaines couches de la société, on se protège du soleil par des vêtements longs, ombrelles et chapeaux (enfant à l'arrière plan).
Niels Ryberg Finsen obtint en 1903 le prix Nobel de médecine pour son actinothérapie (thérapie par les rayons lumineux, infrarouges et ultraviolets). Il soignait des maladies infectieuses comme le lupus vulgaris (tuberculose), l'anémie et le rachitisme. On comprit que le rachitisme était provoqué par une carence en vitamine D et que l'exposition au soleil favorisait son développement dans le corps humain.
En 1920, Coco Chanel, souffrit malencontreusement d'un coup de soleil lorsqu'elle se rendit sur la Côte d'Azur. Ses admirateurs apprécièrent son apparence et commencèrent à adopter ce genre de coloration de la peau. La peau pigmentée par le soleil devint un attribut de la mode en partie à cause du statut de Coco Chanel et du mimétisme de son public pour son style de vie. À peu près au même moment les parisiens eurent un coup de cœur pour Joséphine Baker, la chanteuse métisse. Certains de ses fans eux aussi voulurent imiter sa pigmentation. Ces deux vedettes contribuèrent à établir la mode de la peau pigmentée signe de beauté, santé, réussite et luxe. Dès les années 1930, le bronzage devient ainsi une mode incontournable et un « must » social.
Dans les années quarante, les magazines féminins publièrent des publicités qui encourageaient les bains de soleil. À cette époque la couverture du corps par les maillots de bain commença à se réduire. En 1946, Louis Réard imagina le bikini. L’héliotropisme se démocratise et le bronzage populaire apparaît à la fin des années 1950 par la concentration des vacances en été d’abord dans les lieux élevés d’air pur puis à la mer (50 % des congés d'été se passent à la mer en 19**). La pratique d'utiliser de l'huile pour bébé pour accélérer la pigmentation solaire de la peau se développe parallèlement. Les premiers produits solaires apparurent dans ces années : ils avaient souvent pour effet de donner à la peau une coloration orangée.
Ainsi, progressivement, dans la seconde moitié du XX siècle, en Occident, la tendance se renverse. Le teint hâlé par le soleil (visage et corps) est signe de succès et propre à ceux qui ont des loisirs de plein air (montagne, ski, nautisme, randonnée, voyage dans les pays méridionaux) et donc signe d'aisance financière. Les fonds de teint et éventuellement les crèmes auto-bronzantes viennent répondre à ce besoin de paraître bronzé. Le commerce des crèmes solaires se développe : protection à degrés multiples, crèmes après soleil. D'autres accessoires plus folkloriques mais prétendument efficaces viennent sur le marché : matelas pneumatique à réflecteur incorporé, parasol filtrant les UV, lampes et cabine de bronzage, etc. Le fait que les rayons solaires aident à fixer la vitamine D contribuent à renforcer l'idée qu'une peau cuivrée par le soleil reflète un corps sain tandis qu'une peau blanche exprime l'anémie, le manque d'énergie voire la déprime.
La mode de la peau hâlée est accentuée par une érotisation de plus en plus massive de la vie sociale combinée avec un développement des activités sportives comme loisirs. À titre d'exemple on jouait jadis au tennis en pantalon ou jupe mi-longue tandis qu'à la fin du XX siècle, les shorts, mini-jupes et chemises sans manches, largement décolletées, sont la règle.
Dans le parc au pied de la porte de Hal, à Bruxelles, un 31 juillet, plein soleil. Les personnes assises dans le gazon ne cherchent pas à bronzer.
Il est aussi intéressant de voir le changement de comportement des Européens face à l'exposition au soleil dans les zones tropicales. Au début du XX siècle pour leurs sorties au soleil africain, les explorateurs, missionnaires et colons s'équipent tous du casque colonial pour éviter le « coup de bambou ». « Notre grand ennemi, en Afrique, c’est le soleil » écrivit le docteur Schweitzer dans À l’orée de la forêt vierge en 1923. Le casque est progressivement remplacé par des couvre-chefs plus légers : képis, casquettes, chapeaux de toile en combinaison ou non avec des lunettes de soleil. Actuellement la protection du rayonnement solaire dans les zones tropicales pour les personnes à la peau claire se limite au port d'un chapeau léger ou à organiser une exposition progressive pour stimuler la pigmentation progressive de l'épiderme.
En 1971, on vit apparaître la poupée Barbie-Malibu qui avait la peau pigmentée, des lunettes de soleil et son flacon de crème solaire. C'est dans les années 1970 qu'apparurent les premiers systèmes commerciaux de bronzage (les lampes puis les bancs solaires). On estime qu'en 2009, il y a dans le monde 50 000 boutiques de bronzage alors qu'en 1990 il n'y en avait que 10 000.
Processus
Le mécanisme du bronzage est double :
sous l'action des rayons ultraviolets, les kératinocytes, cellules de la couche superficielle de la peau, vont se multiplier et la rendre plus solide et moins perméable aux rayonnements ;
la production de mélanine par les mélanocytes est stimulée. La mélanine a la propriété d'absorber les rayons ultraviolets très énergétiques (UV-B) et donc de protéger la peau. C'est ce processus qui donne à la peau cette teinte mate, dorée, brune spécifique au bronzage.
Buste en bronze d'Albert Goblet par Jef Lambeaux. Couleur naturelle. Quand il est oxydé par l'exposition à l'eau, le bronze prend une coloration bleu-vert.
Sous l’effet des UV, les kératinocytes secrètent l’hormone alpha-MSH par scission de la pro-opiomélanocortine (POMC), grâce à l'action d’une protéine appelée p53. L’alpha MSH s’attache aux mélanocytes et stimule la production de mélanine. P53 étant également une protéine produite en cas de stress, cela pourrait expliquer l’hyperpigmentation qui apparait parfois, particulièrement chez les personnes âgées, en cas d’irritation prolongée de la peau.
Par ailleurs, la formation d’alpha-MSH à partir de POMC produisant de l’endorphine b supposée contribuer à un sentiment de bien-être, David E Fisher, directeur de la recherche ayant mis en évidence le rôle de la protéine p53 dans le bronzage, propose que la libération d’endorphine lors de ce processus pourrait encourager les gens à s’exposer au soleil.
Bronzage et vitamine D
Les rayons ultraviolets B (UVB) du soleil permettent le bronzage mais aussi la formation de vitamine D3 à partir du 7-déhydrocholestérol, dérivé du cholestérol normalement présent dans l'organisme (le HDL). Cette vitamine est également présente en abondance dans certains aliments, notamment les poissons gras. Une peau bronzée a besoin d'une durée d'exposition au soleil plus longue qu'une peau claire pour synthétiser la même quantité de vitamine D.
En hiver ou lorsque l'ensoleillement est rare, une supplémentation en cholécalciférol — vitamine D3 — est possible pour les personnes qui n'en consomment pas suffisamment à travers leur alimentation.
Conséquences de l'exposition au soleil sur la santé
La protection offerte par la peau face aux radiations ultraviolettes n'est pas parfaite. Le bronzage est un processus lent, la peau reste donc très vulnérable lors des premières heures d'exposition. La surexposition aux rayons du soleil (ou aux rayons ultraviolets artificiels), notamment pendant l'enfance et pour les peaux les plus claires, accroit le risque de cancer de la peau.
Coup de soleil sur les épaules et la nuque à la suite d'une exposition excessive aux rayons solaires.
Les principaux facteurs de risque favorisant les cancers de la peau sont :
l'hérédité ;
l'abus d'exposition au soleil avant l’âge adulte ;
la faible pigmentation, chez les roux et les blonds à teint laiteux ;
les composés de goudron, créosote, d'arsenic et/ou radium lorsque côtoyés régulièrement ;
les régimes alimentaires riches en gras.
Cependant une exposition minimale au soleil permet à l'organisme de produire de la vitamine D (également présente dans l'alimentation), qui joue un rôle dans la consolidation de la masse osseuse et dans le sommeil.
Chez les animaux
Les requins-marteaux font partie des rares animaux à bronzer. Nageant à faible profondeur, leur épiderme subit une augmentation de la mélanine cutanée qui brunit leur peau.