Traitement des eaux à Cuxhaven, Allemagne.
Les eaux usées, aussi appelées « effluents liquides » ou « eaux polluées », sont constituées de toutes les eaux de nature à contaminer les milieux dans lesquels elles sont déversées.
Origine
Ces eaux sont généralement formées du sous-produit d'une utilisation humaine, soit domestique, soit industrielle, d'où l’usage de l'expression « eaux usées ».
Les eaux usées sont des eaux altérées par les activités humaines à la suite d’un usage domestique, industriel, artisanal, agricole ou autre. Elles sont considérées comme polluées et doivent être traitées.
Elles peuvent être parfois qualifiées d'« eaux grises » lorsqu’il s'agit d'eaux peu chargées en matières polluantes par exemple des eaux d'origine domestique, résultant du lavage de la vaisselle, des mains, des bains ou des douches. On parle d'« eaux noires » lorsqu’elles contiennent diverses substances plus polluantes ou plus difficiles à éliminer tels que des matières fécales, des produits cosmétiques, ou tout type de sous-produit industriel mélangé à l'eau.
Il peut également s'agir d'eau d'écoulement de surfaces imperméables : ainsi les eaux de ruissellement des parcs de stationnement sont considérées comme des eaux usées par la présence de divers polluants comme les hydrocarbures ou les poussières d'usure des pneumatiques.
Pour certaines d’entre elles, les contaminants probables figurent entre parenthèses.
Déchets d'origine humaine (hygiène, ménage, toilettes… ; dans ce dernier cas, on parle d'eau noire)
Eau blanche - résiduaire produite au cours de la fabrication du papier.
Eaux blanches de laiterie - eaux de lavage des laiteries et des salles de traite.
Eau de fumier
Fuite de fosse septique
Déversement de fosse septique
Évacuation d'installation de traitement d'eaux d'égout
Eau de lavage (personnes, vêtements, sols, vaisselle, etc.) également connue comme eau grise
Précipitations collectées par les toits
Eaux souterraines infiltrées dans le réseau d'égouts
Liquides manufacturés en surplus provenant de sources domestiques (boissons, huiles de cuisine, pesticides, huiles de graissage, liquides de peinture, de nettoyage, etc.)
Écoulement urbain des précipitations sur les routes, les parkings, les trottoirs (contient des huiles, fèces animales, ordures, traces de carburant, résidus de caoutchouc, métaux provenant des gaz d'échappement des véhicules, etc.)
Entrées d'eau de mer (sel, micro-organismes, volumes élevés)
Entrée directe d'eau de rivières (micro-organismes, volumes élevés)
Entrée directe de liquides synthétiques (décharge illégale de pesticides, d'huiles usagées, etc.)
Drainage des routes (huile, agents de dégivrage, résidus de caoutchouc)
Drainage de tempête (presque n'importe quoi, y compris voitures, chariots, arbres, bétail, etc.)
Pertes industrielles
Drainage industriel d'un site
Constituants indésirables
Les eaux usées peuvent contenir des polluants ou produits indésirables, que l'épuration de l'eau cherchera à biodégrader réduire et/ou éliminer.
Parmi ces constituants néfastes ou nuisant à une qualité de l'eau irréprochable figurent des métaux lourds et métalloïdes, des sels (phosphates (PO4) et les nitrates (NO3) principalement) et des polluants organiques tels que PCB (polychlorydebiphényl), résidus d'hydrocarbures, de médicaments humains et vétérinaires, de pesticides, etc.
Indicateurs de qualité
Les indicateurs de qualité les plus courants sont la demande biologique en oxygène (DBO5) et la demande chimique en oxygène (DCO), ainsi que les matières en suspension (MES).
Ils sont mesurés dans les eaux usées en entrée de traitement ainsi que sur les eaux après traitement. Leurs abattements nous donnent le rendement de l'épuration des eaux.
Traitement
Dans la plupart des pays et en particulier dans les milieux urbanisés, les eaux usées sont collectées et acheminées par un réseau d'égout (ou réseau d'assainissement), soit jusqu’à une station de traitement, soit jusqu’à un site autonome de traitement.
Dans le cas d'habitat collectif, l'épuration de ces substances est assurée par des stations d'épuration d'effluents d'eaux usées. Lorsqu’il est impossible de raccorder l'habitat à un tel réseau, on installe un système de fosse autonome avec tertre d'épandage. Si ces installations n'existent pas, le milieu naturel recevant ces effluents n'est pas en mesure d'assurer son autoépuration. En milieu liquide, ce sont les micro organismes qui assurent l'épuration en bio-dégradant la matière organique contenue dans les eaux usées. En milieu naturel à l’air libre, la matière organique s’assèche par manque d'humidité selon les conditions du milieu considéré ; pour couvrir leurs besoins, les végétaux pompent toute l'humidité environnante, les failles du sous sol laissent s'infiltrer par des veines de grosses quantité d'eaux usées.
L'épuration de l'eau usée dans le sous sol s'effectue en compost par la fermentation. Travail beaucoup plus long et aléatoire : alors qu’un excès d'eau conduit à la pourriture du compost, une insuffisance l’assèche. La bactérie de biodégradation que l'on trouve en milieu liquide survit difficilement dans ce milieu fermé. De ce fait, une matière organique n'ayant pas subi de pré-traitement avant d'être envoyé dans le sous-sol risque de rapidement le colmater.
En situation autonome (fosses toutes eaux), les filtres à sable (tertre d'épandage) se colmatent très souvent au bout de plusieurs années d'utilisation, preuve que le sol n'a pas vocation d'épurer les eaux usées domestiques.
Réutilisation
Autrefois divers excrétats humains ou animaux, les eaux usées et boues étaient utilisés en agriculture ou jardinage, parfois directement (y compris pour l'alimentation du bétail au Viet-Nam) sans précaution et c'est encore le cas dans certains pays. Puis des législation ont cherché à limiter les risques de parasitoses, de diffusion de maladies hydriques et d'intoxication chronique et parfois en raison de phénomènes d'inacceptabilité socioculturelles ou religieuse ; selon les lieux et les époques, la réutilisation d'eaux usées est interdite ou soumise à certaines restrictions et autorisations, pour des raisons sanitaires (présence de germes pathogènes, de métaux lourds, de résidus de pesticides ou d'autres produits indésirables).
Cependant, l'importance des coûts d'amenée des eaux pour l'alimentation des villes, jointe à celle de leur évacuation, qui va de pair avec la raréfaction des ressources en eau, conduit un peu partout dans le monde, et pas seulement dans les zones arides ou semi-arides, à considérer la question de la réutilisation des eaux usées, alors présentées comme « Ressource non conventionnelle ».
Dans certains pays où l'eau manque comme en Palestine ou en Jordanie et d'autres pays arabes, une agriculture sous contrainte hydrique cherche des eaux alternatives. A Gaza et en Palestine les eaux usées ont été ou sont encore utilisées pour les cultures maraichères avec comme conséquence des produits pollués par des métaux lourds et moins sûrs du point de vue microbien.
Le traitement classique des eaux usées vise généralement à les dépolluer suffisamment pour qu'elles n'altèrent pas la qualité du milieu naturel dans lequel elles seront finalement rejetées : rivières et mers.
L'agriculture permet théoriquement la réutilisation de certaines eaux usées après un traitement minimal (l'eau n'est pas potable, mais peut servir à l'irrigation) (voir aussi "L'irrigation" dans cet article). souvent une utilisation comme eau de lavage d'arrosage (de terrains de golf par exemple ou d'irrigation agricole ou sylvicole (surtout si c'est l'unique source d'eau pour des plantes) ou pour abreuver le bétail ou le gibier ou pour la pisciculture comporte encore des risques notamment parce que l'eau est souvent incomplètement épurée, et parce qu'il peut y avoir des dysfonctionnement de station d'épuration (en cas d'orage, de coupure de courant, de surcharge, etc.) Certaines molécules (ex : résidus d'hormones, prions, certains métaux...) sont en effet mal filtrées, dégradées ou retenues par les stations d'épuration et peuvent alors passer dans la chaine alimentaire ou s'accumuler dans le sol.
En Europe et plus généralement dans les pays du Nord, les eaux usées sont rendues au milieu naturel après traitement (le traitement d'un mètre cube d'eau usée produit de 350 à 400 grammes de boues. Plusieurs millions de tonnes dans le monde de matières sèches sont évacuées chaque année. Environ 75% sont valorisées en agriculture. Le reste est incinéré ou dirigé en décharge).
En France, en période de sécheresse et dans les régions sèches, elle pourrait faire l'objet de prochaines dérogation pour certains usages (ex : arrosage des golfs).
L'industrie
Lavage et transport industriel des matériaux
Dans beaucoup d'industries, le lavage et le transport des matériaux sont très peu exigeants en qualité de l'eau. C'est pourquoi les eaux usées épurées sont utilisées pour :
le lavage des matières premières (charbon, gravier, etc.) et leur transport (craie par exemple) ;
le transport des déchets (cendres d'une centrale thermique) ;
le lavage d'entretien (wagon, sols, bouteilles, etc.) ;
la fabrication de laine de verre.
Refroidissement industriel
Nombre d’industries procèdent à des opérations de refroidissement consommant une importante quantité d’eau :
centrales électriques ;
réacteurs nucléaires ;
pétrochimie ;
chimie ;
industrie du caoutchouc ;
industrie automobile.
L'irrigation
Dans le cas de l'irrigation, les eaux usées sont utilisées après traitement biologique (boues activées ou lagunage le plus souvent). Leur intérêt réside dans le fait que :
Les eaux contiennent des nutriments. Ils accroissent notablement les rendements agri***** et réduisent le recours aux engrais artificiels coûteux.
Les autres sources d'eau utilisable en irrigation se raréfient en raison de leur potabilité tant recherchée.
Les utilisations municipales
Elles peuvent couvrir une assez large gamme d'utilisations, qui ne requiert pas d'eau de qualité potable, par exemple :
l'arrosage des parcs et jardins publics
le lavage des rues
la lutte contre les incendies
le nettoyage des engins de collecte des ordures ménagères
Récupération de la chaleur des eaux usées
Une idée qui se développe est de récupérer les calories d'effluents encore chauds ou tièdes, via l'installation d'échangeurs thermiques dans des canalisations d'égouts reliés à des pompes à chaleur, ce qui permettrait aussi d'améliorer le bilan énergétique de collectivités locales. Chauffer des espaces via des pompes à chaleurs nécessite une source constante de calories, en général prélevées dans le sol (par la géothermie) ou dans l'air extérieur (aérothermie). Les eaux usées sont un autre gisement, largement inexploité. Les trois quarts de la chaleur des effluents domestiques (salles de bains, lessives, cuisine, vaisselles, etc.) sont en effet rejetés à l'égout et perdus ; La température du réseau oscille ainsi entre 13 et 20 °C, selon les saisons, avec une relative stabilité en raison de l'inertie thermique du milieu. Des caractéristiques idéales pour approvisionner une pompe à chaleur, via un échangeur de chaleur posé dans le collecteur. À ce jour, le procédé est surtout utilisé en Allemagne, Suisse, et aux États-Unis, Modèle:Où 20 installations sont en activité. Son développement est spectaculaire : 33 projets se construisent actuellement dans le monde et 100 autres entrent en phase d'étude.
Comment d'un déchet faire un produit ? Un échangeur de chaleur est intégré dans la canalisation neuve ou posé dans celle préexistante. Des conduits envoient le fluide réchauffé vers les PAC, où le fluide est porté à 50–70 °C, pour être redistribué dans les bâtiments. Dès la première année, les économies d'énergie se situent entre 20-30 % et parfois 50 % du poste énergie global annuel. Les émissions de gaz à effets de serre diminuent de 60 %. L'avantage est triple : réduction du poste énergétique ; bénéfice environnemental et moindre exposition aux fluctuations du prix du gaz. Le système s'annonce le plus avantageux dans les régions aux hivers froids, à l'exemple du Nord Est de la France. Ses performances y dépassent celles de l'aérothermie. Le rafraîchissement reste néanmoins possible. Une configuration par réseau hydraulique du circuit de rafraîchissement intérieur du bâtiment s'avère alors indispensable. Comme pour les pompes à chaleur en général, le procédé ne se substitue pas à l'usage d'une chaudière mais vient en complément. Une PAC au coefficient de performance annuel de 3,5 assure 80 % de la chaleur. La chaudière assure les 20 % restants lors des pointes de consommation.
Implantation : Les lieux d'implantation les plus adéquats sont principalement les zones urbaines denses. Les besoins en chaleur y sont importants et l'installation de panneaux solaires et d'éoliennes pâtit des faibles disponibilités d'espace ou des nuisances entraînées.
Le procédé requiert également des débits minimums dans les canalisations. Le débit moyen dans le collecteur doit atteindre les 8 litres par seconde, soit les effluents d'une zone couvrant 8 à 12 000 personnes. Une implantation dans des agglomérations de 20 à 30 000 habitants peut être envisageable, mais de préférence en aval d'un point d'assainissement. Les usages les plus adaptés renvoient à ceux des PAC en général. Les gammes de puissances minimums sont de 150 kW pour le chauffage et l'eau chaude, soit l'équivalent d'une cinquantaine d'appartements. Cela concerne des besoins constants et collectifs : logements, hôpitaux, piscines, maisons de retraite, etc.
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