La tourelle est
soit un élément de construction fixe dans les fortifications médiévales, soit un dispositif placé sur un véhicule ou une installation fixe militaire, qui permet d'orienter l'armement qu'elle porte, tout en le maintenant sous une protection. Elle se distingue de la barbette, de fonction identique, par sa protection mobile qui peut s'étendre même au toit, alors que dans une barbette le blindage est fixe et l'arme reste à ciel ouvert. Il existe de nombreux types de tourelle, dont le mouvement peut être manuel ou motorisé ; certaines peuvent même être entièrement automatisées, ne requérant pas la présence de servants pour les armes qu'elles contiennent. La gamme d'armes embarquées dans des tourelles va de la mitrailleuse aux pièces d'artillerie de plusieurs dizaines de centimètres de calibre.
Usage dans les fortifications médiévales
Tourelle sur contrefort du château de Brancion
Abbaye du Mont-Saint-Michel. Le châtelet. Tourelles en encorbellement
Dans les fortifications médiévales, les tourelles, ou « tournelles », sont des tours de faibles diamètre et hauteur. Elles servent de tour de guet, à la défense d'un point faible, d'une poterne, etc.
Viollet-le-Duc, dans son Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIauXVI siècle: « On donnait aussi le nom de tournelles à de véritables tours flanquant des courtines, mais dont l'étroite circonférence ne pouvait contenir qu'un très-petit nombre de défenseurs; sortes de guérites ou d'échauguettes. Les portes, les châtelets, n'étaient souvent munis que de tournelles. Aujourd'hui, on désigne habituellement par le mot tourelles les ouvrages cylindriques, ou à pans, portés en encorbellement. Ces tourelles s'élevaient, soit sur un cul-de-lampe, soit sur un contre-fort; elles donnaient un flanquement peu étendu et des vues sur les dehors d'une habitation, d'une porte ou d'une courtine. »
Usage dans les fortifications contemporaines
La tourelle pour deux canons de 155 mm du fort d'Uxegney (place forte d'Épinal).
Dans les fortifications contemporaines (ligne Maginot, mur de l'Atlantique, etc.), les tourelles enterrée dans des puits en béton armé ne sont pas immobiles, mais elles tournent sur elles-mêmes (la rotation permet de protéger les embrasures des cuirassements) et, pour certaines, elles s'élèvent ou s'éclipsent (tourelles blindées escamotables). Ces tourelles sont armées de mitrailleuses, de mortiers, de canons ou de lance-grenades.
Usage naval
Éclaté d'une tourelle triple de 406 mm (16 pouces) équipant les derniers cuirassés de l'US Navy
La tourelle s'imposa dans les marines de guerre avec l'augmentation du calibre et de la masse des pièces d'artillerie. Le nombre des canons de chaque navire dut alors être réduit pour conserver la stabilité sur l'eau, et il convenait d'utiliser chacun de la façon la plus efficace, en augmentant leur champ de tir. Un des premiers exemples de navire équipé d'une tourelle fut le Monitor, utilisé pendant la Guerre de Sécession, suivi du HMS Captain de Cowper Phipps Coles, en 1869, premier navire de haute mer doté d'une artillerie en tourelle. Cependant, peu de temps après sa mise en service, le 7 septembre 1870, le Capitain chavira, démontrant la difficulté d'employer simultanément des tourelles et des voiles.
Les Britanniques réglèrent le problème en abandonnant la propulsion à voile dès 1871, avec les deux navires de la classe Devastation. À la fin du XIX siècle, l'emploi de la tourelle s'imposa sur les plus grosses unités des marines de guerre, comme les navires de ligne ou les croiseurs cuirassés. Les unités plus légères, comme les croiseurs protégés et les torpilleurs gardèrent encore longtemps un armement sur pivot, protégé par un simple bouclier, plus rapide à pointer et plus léger.
Sur la plupart des navires, les canons équipant les tourelles étaient encore à chargement par la bouche. La généralisation du chargement par la culasse allait accroître la cadence de tir, tout en évitant aux servants de s'exposer ; cependant, les obus de plus en plus lourds exigeaient souvent des machines à charger, obligeant encore à ramener la pièce à une certaine position de hausse, voire de site pour introduire la munition, ce qui retardait d'autant l'ouverture du feu. Par la suite, on développa des mécanismes solidaires du canon, ce qui permit de le charger dans n'importe quelle position.
Tourelle de type 15 pouces anglaise, Mark 1
Usage automobile
Hormis quelques automitrailleuses antérieures, le premier usage terrestre notable d'une tourelle apparut sur le char français FT-17. La formule de l'armement orientable sur 360° sur un véhicule blindé connut un succès tel que dès lors, la plupart des blindés l'adoptèrent. Elle permet de s'aventurer au cœur de la zone ennemie en engageant les objectifs et les menaces de tous côtés.
Seuls quelques chasseurs de chars et canons automoteur conservaient un armement en casemate, car ils étaient censés se déployer en appui derrière les forces amies. De plus cela permettait de monter facilement des canons très puissants sur des châssis qui auraient été incapables de les embarquer en tourelle. Le char à plusieurs tourelles fut en vogue au cours des années 1930, en particulier chez les Britanniques et les Soviétiques, afin d'engager plusieurs objectifs simultanément. Mais l'expérience montra de multiples inconvénients : la coordination du tir était quasiment impossible, le champ de tir de chaque tourelle était réduit, et le véhicule était plus volumineux du fait de son équipage accru. La formule du plus gros canon possible dans une tourelle unique redevint rapidement la norme.
Les premières tourelles de blindés, légères, tournaient par l'action du tireur qui opérait debout, une épaule appuyée sur la crosse de l'arme. Le calibre des armes et le poids des tourelles allant croissant, on dut recourir à la motorisation utilisant l'énergie du moteur principal ou des moteurs électriques. Mais on garda un système de secours manuel, manivelle et système démultiplicateur, pour les cas de panne ou lorsqu'on voulait employer le char à l'arrêt. Ce mode de pointage allongeait l'opération, par exemple un tour complet de la tourelle sur un char Tigre prenait 720 tours de manivelle, mais cela la rendait aussi plus discrète.
Tout d'abord monoplaces, les tourelles devinrent bi puis triplaces, en particulier sous l'impulsion des Allemands. Même si la tourelle devenait plus volumineuse, cet effectif accru des servants permettait une meilleure répartition des rôles. La formule regroupant un chef de véhicule, dégagé de la charge de l'arme principale, pouvant observer le champ de bataille et y trouver les objectifs, et un tireur et un pourvoyeur, respectivement pointant et approvisionnant l'arme, démontra sa supériorité au début de la Seconde Guerre mondiale.
Usage aérien
Tourelle arrière quadruple d'un Lancaster
Tourelle d'aéronef de combat de type Erco Ball (National Museum of Naval Aviation, Floride).
Les premiers armements aériens orientables furent d'abord montés sur des pivots, mais on passa rapidement à l'utilisation d'armes sur rail circulaire, permettant au servant un meilleur champ de tir. La vitesse des avions augmentant, le besoin de protéger l'équipage des éléments et d'améliorer l'aérodynamisme poussa à vitrer ces tourelles non protégées, puis à les blinder. La rotation de la tourelle, tout d'abord manuelle, se fit électrique en fonction du poids de l'ensemble. L'évolution suivante, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, fut l'emploi de dispositifs de télécommande, qui permettait au servant de rester abrité dans un compartiment pressurisé au lieu de s'exposer près de l'arme.
L'armement orientable en tourelle concerna surtout les aéronefs lourds, trop peu manœuvrables pour pointer rapidement un armement fixe. La vocation de ce type d'armement est donc plutôt défensive ; quelques tentatives en sens inverse furent décevantes, comme le Boulton Paul Defiant. Il valait mieux employer la masse et la place dans l'appareil à l'amélioration de la maniabilité, de la vitesse et de la puissance de l'armement, alors que la tourelle représentait un gaspillage. De plus, cela requérait des avions multiplaces et donc plus lourds, et posait de nombreux problèmes de coordination entre le tireur et le pilote.
Articles connexes
Artillerie navale
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