La nicotine est une toxine.
Historique
La nicotine doit son nom à Jean Nicot.
Elle a été isolée en 1828 par deux allemands, Wilhelm Heinrich Posselt (de) et Karl Ludwig Reimann (de) à l'université d'Heidelberg. Sa formule empirique a été établie par Melsens en 1843. Son poids moléculaire a été déterminé par Schloesing en 1847. Sa structure moléculaire a été développée par Adolf Pinner en 1895.
Suspecté depuis 19**, le caractère addictif de la nicotine et son rôle dans le tabagisme sont reconnus dans le monde scientifique depuis 1988.
Biologie végétale
Champ de plants de tabac.
La nicotine est un alcaloïde présent dans les plantes de la famille des solanacées.
La nicotine a des propriétés acaricides et insecticides du fait de son caractère neurotoxique : sa toxicité protège la plante des insectes; elle possède également des propriétés fongicides.
Une famille d'insecticide de synthèse, les néonicotinoïdes, est dérivée de la nicotine naturelle.
L'usage de la nicotine comme insecticide est interdit en France.
Biologie animale
Cinétique
Cet alcaloïde agit par inhalation, par ingestion ainsi que par contact.
La nicotine se dégrade en 3-4 jours.
Par inhalation
La nicotine inhalée est absorbée (« résorbée ») par les capillaires sanguins des poumons. Après un passage dans le cœur gauche, la nicotine passe la barrière hémato-encéphalique et arrive en 10 à 20 secondes dans le cerveau, sans passer par le système porte hépatique. Les taux de nicotine sont de six à dix fois plus élevés dans le plasma artériel que dans le plasma veineux.
Une étude a comparé les propriétés pharmacocinétiques des cigarettes classiques, des cigarettes électroniques contenant 16 mg de nicotine et d'un inhalateur pharmaceutique de nicotine dosé à 10 mg de nicotine. L'augmentation maximale de la concentration en nicotine dans le plasma sanguin après utilisation de ces trois produits est de 13,4 ng/ml (6,5 à 20,3) en moyenne avec les cigarettes classiques, 1,3 ng/ml (0,0 à 2,6) avec les cigarettes électroniques et 2,1 ng/ml (1,0 à 3,1) avec l’inhalateur. Le pic plasmatique est atteint en 14,3 minutes (8,8 à 19,9) avec les cigarettes classiques, 19,6 minutes (4,9 à 34,2) avec les cigarettes électroniques et 32 minutes (18,7 à 45,3) avec l’inhalateur.
Par d'autres voies
La consommation de tabac à chiquer a diminué dans la plupart des pays européens dont la France, sauf en Suède où le snus connaît une utilisation assez commune, concernant environ 20 % des hommes, et en Norvège.
La commercialisation du snus est interdite dans le reste de l'Union européenne.
Effets
La nicotine provoque l'augmentation de la pression artérielle et du rythme cardiaque, entraîne une libération d'adrénaline et réduit l'appétit; augmentant par conséquent le métabolisme. Elle a également pour effet d'améliorer la concentration et la mémoire.
Généralités
La nicotine est un agoniste de certains récepteurs à l'acétylcholine : les récepteurs nicotiniques, par opposition aux récepteurs muscariniques. Les récepteurs nicotiniques sont des récepteurs ionotropes : leur activation par la nicotine entraîne une entrée d'ions sodium et une sortie d'ions potassium, et par suite une dépolarisation du neurone post-synaptique. Ce potentiel postsynaptique excitateur a différentes conséquences selon le type de neurone. Les récepteurs nicotiniques sont présents dans le système nerveux autonome, au niveau des jonctions neuromusculaires, ainsi que dans les systèmes cérébraux noradrénergiques et dopaminergiques ; notamment celui du système de récompense. À plus forte dose, il devient un poison violent qui irrite le système digestif, entraîne des atteintes du système nerveux central (convulsions, coma) et des muscles (en particulier le cœur et la respiration). Il arrive que des paralysies et des spasmes vasculaires surviennent. La mort par arrêt respiratoire peut survenir après l'apparition des premiers symptômes d'empoisonnement (en 30 à 60 minutes).
L'effet cancérigène de la nicotine seule n'a pas pu être prouvé sur des rats soumis à des concentrations élevées de nicotine pendant une période significative. Par contre son effet sur les récepteurs d'acétylcholine facilite la croissance des tumeurs en favorisant l'angiogenèse.
Dépendance
Le tabagisme induit une dépendance physique du fait de la présence de nicotine. Le sevrage du tabac peut entraîner des phénomènes indésirables — irritabilité, maux de tête, anxiété, etc. — voire conduire, dans des cas extrêmes, à une dépression. Bien que leur maximum se situe aux alentours de trois à quatre jours, ces symptômes peuvent durer quelques semaines après la dernière consommation. En cas de difficulté répétée, il est possible de recourir à l'une des aides à l'arrêt du tabagisme, sans attendre la manifestation d'effets néfastes à long terme de la cigarette.
L'un des effets de la nicotine est la production anormale de dopamine, qui place le fumeur dans un état d'euphorie. Lorsque le niveau de dopamine diminue, le fumeur se trouve en état de manque, ce qui le pousse à fumer de nouveau. Si la dépendance immédiate (dite « physique ») disparait en quelques semaines, le fumeur garde toutefois le souvenir de cet état d'euphorie, si bien qu'il peut être tenté de recommencer à fumer pendant une période plus longue après la disparition de la dépendance physique. On parle alors de dépendance psychologique.
En 1994, le journal ABC news a présenté des preuves que les fabricants de tabac manipulaient le taux de nicotine des cigarettes afin d'assurer un niveau de dépendance optimal.
Les signalements de dépendance aux spécialités pharmaceutiques contenant de la nicotine chez les personnes n'ayant jamais fumé concernent exclusivement les formes orales. En effet, la dynamique de diffusion de la nicotine par ces spécialités est différente de celle des cigarettes et cigarettes électroniques (les patchs par exemple diffusent la nicotine pendant 16 à 24h). Or, l'intervalle de temps entre l'acte de fumer et l'arrivée de la nicotine au cerveau joue un rôle dans l'apparition de la dépendance.
Surdosage et intoxication
Un surdosage de nicotine se manifeste par les symptômes suivants : nausées, vomissements, pâleur, palpitations, céphalées, insomnies, diarrhées, lipothymies, vertiges, sècheresse buccale, hypersalivation, douleurs abdominales, diminution de l'acuité auditive, faiblesse générale, entre autres.
À doses élevées, peuvent apparaître une hypotension, un pouls faible et irrégulier, une gêne respiratoire, une prostration, un collapsus cardiovasculaire et des convulsions. Les doses de nicotine tolérées par les sujets fumeurs peuvent entraîner une intoxication aiguë susceptible d'être fatale chez les jeunes enfants. À forte dose, elle possède un effet dépresseur et provoque nausées et vomissements, puis la mort par paralysie respiratoire.
La dose létale médiane DL50 pour un rat est de 50 mg·kg, pour une souris de 3 mg·kg. Chez l'homme, une source ancienne mentionne 60 mg, soit en moyenne (0,5–1 mg·kg). Une analyse récente indique une dose létale pour l'être humain probablement comprise entre 500 mg et 1 g.
Utilisation
La nicotine est utilisée en médecine dans le cadre du sevrage tabagique comme traitement de substitution. Elle existe sous plusieurs formes, comme le timbre transdermique ou la gomme à mâcher. C'est un des traitements de première intention.
Controverses
Selon l'équipe du neurobiologiste français Jean-Pol Tassin (INSERM, Collège de France), la nicotine seule ne suffirait pas à induire une dépendance chez l'animal ; il faudrait lui associer par exemple des inhibiteurs de la monoamine-oxydase, présents dans la fumée de tabac. Se pose alors la question de l'usage de la cigarette électronique utilisée par certains fumeurs dans le cadre d'un sevrage tabagique. Pourtant cette dernière ne contient pas d'inhibiteurs de la monoamine-oxydase mais seulement de la nicotine qui provoque une sensation de picotement dans la bouche et la gorge. Ceci pourrait constituer un stimulus précurseur à l’administration de la substance dépendante pour le cerveau du fumeur.
La notion de dépendance à la nicotine est également mise en cause par le professeur Molimard, fondateur de la tabacologie en France, signataire de la préface de l'ouvrage Dépendance à la nicotine : critique d'une théorie.
Culture
Dans le roman policier Drame en trois actes d'Agatha Christie, trois personnes sont empoisonnées à la nicotine.