Le pastis (du provençal pastis : « mélange ») est le nom donné à une boisson alcoolisée parfumée à l'anis et à la réglisse.
Description
Selon la réglementation européenne, le pastis est le résultat de l'aromatisation d'un alcool neutre d'origine agricole avec des extraits d'anis vert, d'anis étoilé, de fenouil, ou de toute autre plante contenant le même constituant aromatique principal, ainsi que par des extraits naturels issus du bois de réglisse. Cette aromatisation peut être obtenue par trois procédés (ou une combinaison des trois) :
macération et/ou distillation,
redistillation de l'alcool en présence de ces plantes,
adjonction d'extraits naturels distillés de plantes anisées.
La boisson contient donc de l'anéthol (de 1,5 à 2 g/L) apporté par les plantes anisées, ainsi que des chalcones et de l'acide glycyrrhizique (de 0,05 à 0,5 g/L) apportés par la réglisse.
Le titre alcoométrique volumique minimal est de 40 % (45 % pour le pastis de Marseille).
La teneur en sucre doit être inférieure à 100 g/L.
La couleur jaune du pastis est due à un colorant, souvent du caramel. Il existe des pastis blancs sans colorant. Certains producteurs (Janot, etc.) ont même créé des pastis bleus.
Pastis « de Marseille »
Différentes marques de pastis
Pour avoir droit à l'appellation « Pastis de Marseille », le pastis doit avoir un titre alcoolique de 45 % et une concentration d'anéthol de 2 g/L. Du fait de sa teneur en anéthol supérieure à celle d'un pastis commun, il est beaucoup plus sensible au froid. Un trouble apparaît à partir de 8, voire 10 °C. Dès qu'il est remis à température ambiante, le trouble disparaît rapidement, sans que le produit n'ait une quelconque altération de sa qualité, ni de son goût.
Pastis bleu de la distillerie Janot à Aubagne.
Consommation
Selon la société Pernod-Ricard, la consommation de pastis en France représente quelque 130 millions de litres par an, soit plus de 2 litres par habitant chaque année.
Il se boit en apéritif, complété avec de l'eau. On ajoute généralement de cinq à sept volumes d'eau fraîche pour un volume de pastis (en France, la dose usuelle dans les cafés et brasseries est de 2 cL de pastis).
Lorsque l'on fait le mélange en versant l'eau, on passe alors d'une couleur ambrée assez transparente à un jaune trouble un peu laiteux. Ce trouble est dû à une microémulsion d'anéthol, peu soluble dans l'eau ; si l'on attend quelques heures, le trouble disparaît. Ce phénomène, désigné sous le terme de « louchissement » (on dit que le pastis « louchit »), apparaît aussi lors de la réfrigération du pastis pur (on dit alors que le pastis « paillette »).
Histoire
« Le pastis, c'est comme les seins : un, c'est pas assez, et trois, c'est trop. » (Fernandel)
En 1915, l'absinthe et des boissons similaires sont interdites en France. Très floue, la loi laisse des doutes et la production des boissons à base d'anis chute. En 1920, l'État autorise à nouveau la production et rétablit l'autorisation des consommations anisées dont le degré d'alcool est inférieur à 30°. Puis, en 1922, le degré est relevé à 40°. Une véritable frénésie s'empare alors de la Provence où tous les bars vendent du pastis. Chaque marque personnalise ses recettes en ajoutant à l'anis d'autres plantes aromatiques telles que le fenouil, l'anis vert, la réglisse, etc.
Paul Ricard fait preuve d'innovation en élaborant une recette incluant de l'anis étoilé, de l'anis vert et de la réglisse. Son slogan, « Ricard, le vrai pastis de Marseille », apparaît en 1932. C'est la première fois que le mot pastis apparaît sur l'étiquette d'un apéritif anisé. Un très large réseau de distribution permet à ses ventes de décoller et il devient le premier vendeur de pastis au détriment de Pernod.
En 1938, on autorise la production et la vente de pastis et boissons anisées titrant 45°.
Sous le Régime de Vichy le pastis est interdit en août 1940 comme toutes les boissons au-dessus de 16° : l'usine Pernod est transformée en chocolaterie, Ricard produit du vermouth, des jus de fruits, des alcools carburants pour le maquis. À la Libération, la déception est d’autant plus grande que le nouveau gouvernement (principalement la ministre de la Santé Germaine Poinso-Chapuis, surnommée « chapeau pointu » par Paul Ricard) ne révoque que partiellement les dispositions de Vichy en n’autorisant que les apéritifs à 40° : une quarantaine de distillateurs clandestins produisent leur pastis. Une taxe est alors prélevée par leur syndicat pour financer d'éventuels procès. L'État soucieux de trouver de nouvelles recettes fiscales abroge la prohibition en 1949. En 1951, une loi interdit la publicité des produits anisés par affiche et par presse, Pernod relance sa boisson sous l'appellation de "Pastis 51" et envoie alors ses commerciaux (appelés « structure de propagande » à l'époque) qui contournent cette interdiction en développant des produits dérivés (pot à eau, cendrier, bob).
Commercialisation
Jusqu'à leur fusion en 1975, les sociétés Ricard et Pernod se livrent une concurrence rude sur le marché des boissons anisées qui atteint son apogée dans les années 1960. Le groupe Pernod Ricard domine aujourd'hui le marché mondial du pastis avec les marques Ricard et 51 (qui fut d'abord commercialisé en 1951 sous la marque Pernod 51, puis Pastis 51 de 1954 à 1999).
Pastis Henri Bardouin des Distilleries et Domaines de Provence
Pastis de Marseille UN MARSEILLAIS.
D'autres marques de pastis se partagent le reste du marché, notamment les Marseillais Duval et Casanis (tous deux la propriété du groupe Boisset et produits dans la même distillerie) et Berger (deux pastis, un blanc, Berger blanc et un jaune, Berger pastis de la société Gemaco de la maison Marie Brizard, détenue par le groupe Belvédère).
Depuis les années 1990, les marques dites « économiques » se sont approprié près de 40 % du marché français, parmi lesquelles Cigalis, la marque des hypermarchés Cora, ou encore la marque du maxidiscompteur Leader Price.
Des distillateurs locaux sont répartis dans l'arrière pays provençal ou méditerranéen. La société Cristal Limiñana, restée à 100% familiale depuis 1884, fabrique dans son usine située à Marseille intra-muros le pastis Un Marseillais. La distillerie Janot, à Aubagne, produit différents pastis, dont la distribution est centrée en région PACA. Les Distilleries et Domaines de Provence avec leur Pastis Henri Bardouin, médaillé d'or du concours agricole de 2008, visent le marché haut de gamme des pastis plus complexes et raffinés. L'artisanal Pastis des Homs produit à Nant (Aveyron) obtient deux fois la médaille d'or du concours général agricole.
Il existe aussi des producteurs de pastis hors de France, comme la distillerie Charbay, qui produit en Californie un pastis à 45° sans colorant.
Dénominations régionales
Petits pots Ricard
Le pastis est aussi appelé un jaune ou un flai (et non fly) dans le sud de la France. Il peut également d'appeler fenouil, pommade, flan, voire plus récemment flambi si la proportion d'eau est faible. On peut entendre dire qu'un pastis est "gras" lorsque la proportion d'alcool est importante. S'il est vraiment très gras, on l'appelle "yahourt". On dit aussi pastaga dans le sud-est de la France, plus particulièrement du côté de Marseille.
Il est courant de demander « un Ricard » du nom de la société historique ayant réussi à lier le nom de sa marque à cette boisson dans l'esprit collectif.
La momie ou mominette est un pastis servi dans un petit verre. Dans certaines régions, c'est aussi une « demi-dose ». Un Gainsbourg (une des boissons préférées de l'artiste Serge Gainsbourg) est un double pastis 51, c'est-à-dire un 102.
Boissons apparentées
Dans le pourtour méditerranéen, les Balkans et le Caucase, on trouve d'autres boissons aromatisées à l'anis (en général de couleur blanche) :
en Algérie : l'anisette et le cristal
en Grèce : l'ouzo
en Bulgarie: la mastika
en Turquie, Arménie, ex-Yougoslavie : le rakı
au Liban, Syrie, Israël, Jordanie, Palestine : l'arak
en Italie : la sambuca
en Espagne : l'aguardiente, l'anis del Mono (Badalona), l'anis, le chinchon et la cazalla
Cocktails
Pastis californien sans colorant.
La mauresque (ou moresque), à base de pastis et de sirop d'orgeat, aussi appelée avec humour « EPO » eau, pastis, orgeat) par analogie avec l'érythropoïétine (EPO), parfois utilisée par des sportifs comme agent dopant.
La tomate, à base de pastis et de sirop de grenadine.
Le perroquet, à base de pastis et de sirop de menthe.
La commande des trois cocktails précédents se nomme une rasta, les couleurs verte (perroquet), jaune (mauresque), et rouge (tomate) faisant référence aux couleurs panafricaines utilisées par les rastafari.
Le martiniquais, à base de pastis et de sirop de coco
Le key west, à base de pastis et de sirop de coco et de lime
Le rourou, à base de pastis et de sirop de fraise.
Le Violette, à base de pastis et de sirop de lavande.
Le Lanmaderlo, à base de pastis et de Get 27. Ce nom fut donné en mémoire à l'union entre les villes de Landerneau et Saint-Malo. Il est aussi appelé Pélican ou Phoenix (le "perroquet" cramé).
Le sazerac, à base de pastis (parfois remplacé par de l'absinthe ou du Pernod) et de whisky de seigle ou de cognac.
Le Mazout ou le Gasoil ou le Goudron, à base de pastis et soda au cola.
Le Mazout tropical, à base de pastis et soda au cola aromatisé à la vanille.
Le Diesel, à base de pastis et de vin blanc.
Le Saunier, à base de pastis et de sirop de pamplemousse, et qui doit son nom à la couleur rosée qui rappelle celle des salins de Aigues-Mortes.
La Feuille Morte, à base de pastis et de sirop de menthe et de sirop de grenadine.
Le Café électrique, à base de pastis et de café. En Italie, le caffè corretto peut y être assimilé lorsqu'on lui ajoute la sambuca.
Le Pastis espagnol, à base de pastis et de lait.
Le Pélican, à base de pastis et de sirop de pêche.
L'indien, à base de pastis et de sirop de citron.
Le Cornichon, à base de pastis et de sirop de banane.
Le Perroquet sauvage (en référence au Perroquet), à base de Pastis, de Get 27 à la place du sirop de menthe et de Vodka à la place de l'eau
La Tronçonneuse, à base de pastis et de bière.
Le Stoptou, à base de pastis et de Picon.
Le New-Yorkais, à base de Pastis, Whisky et Soda au Cola.
La Rosalie, à base de Pastis et de sirop de rose.
L'Orangezinette, à base de Pastis et de soda a l'orange.
Le Coquelicot, à base de pastis et de liqueur de Cassis.
Le Lama Hurlant, à base de pastis, de Limoncello et de quelques gouttes de Tabasco.
La Cubaine, à base de pastis, de sirop de menthe et de sirop de citron (ou rondelle de citron).
La Limonette à base de pastis, et de limonade.
Le Liégeois à base de pastis, de chantilly et de coulis de chocolat (aussi appelé le "54" dans certaines régions de France).